DEBAT : Non, Boumediene n'a jamais construit un Etat (1ère Partie)

Houari Boumediene
Houari Boumediene

Je ne sais quelle est la définition d’un homme d’Etat. Mais Boumediene n’était pas un Homme d’Etat et n’avait jamais construit un Etat car l’Etat, si Etat est, doté d’institutions solides, survit aux hommes comme a survécu la Vème République fondée par un véritable Homme d’Etat, le Général de Gaulle, après son retrait des affaires, quoique je n’ai jamais cru à l’homme providentiel. Qu’a laissé Boumediene après sa mort à part un système de cooptation et de clientélisme qui perdure à ce jour et dont on mesure à présent les dégâts immenses causés depuis 1962 ?

Non, Boumediene n’était pas un homme d’Etat mais un Putshiste qui a régné sur notre pays d’une main de fer en laissant derrière lui un pays en déliquescence total entamé déjà depuis 1962 par tous ceux qui s’emparèrent du Pouvoir non pour servir et aider à construire un véritable Etat mais pour se servir ou pour assouvir leur désir au Pouvoir. L’homme providentiel n’existe pas comme vous le prétendez et notre peuple a démontré sa maturité et son sens politique en se soulevant contre le colonialisme, en s’organisant à partir de 1945, en déclenchant Novembre 1954, en sacrifiant leurs meilleurs enfants dans les bataille de Souk-Ahras, l'Akfadou, les gorges de Palestro, les montagnes des Aures, en résistant au Napalm aux Aures, dans le Constantinois, l’Ouarsenis et en Kabylie, en subissant la torture, et en affrontant les chars, torses nus à Belcourt et dans toutes les villes d’Algérie pour qu’il puisse prendre son destin en main de façon démocratique sans pour autant attendre le Messie Boumediene qui leur légua un pays en déliquescence morale totale après la confiscation du pouvoir quelles que furent ses intentions, ses performances conjoncturelles et son bilan.

Pendant la période de la guerre, homme complètement à l’écart et pas du tout connu pour ses faits d’armes, Boumediene commence déjà à réfléchir comment arriver au Pouvoir. Homme très intelligent, aguerri dans les intrigues, il surpasse ses pairs qui, après l’indépendance, certains courent derrière les villas laissés par les colons et d’autres derrière les affaires, alors que lui est obsédé par le Pouvoir, tout le Pouvoir et rien que le Pouvoir. D’ailleurs après sa prise du Pouvoir, la stratégie que Boumediene utilise pour neutraliser ses opposants est une des options suivantes : 1) leur permettre d'emprunter des sommes colossales du Trésor qu'ils n'arriveront jamais a rembourser; 2) les pousser à l'exil après une période d’emprisonnement (H. Ait Ahmed, Boudiaf, Mahsas, Harbi, etc…) ou 3) la solution finale, c'est à dire l'assassinat entre autres, Khider en 1967 à Madrid et Krim Belkacem en 1970 à Frankfurt.

Déjà, en 1961, il envoie un émissaire à la résidence d'Aulnoy pour sonder les chefs historiques. Boudiaf flaire le piège, rejette illico l’offre alors que BenBella, se sentant l’égal de Nasser sur la scène internationale est séduit et ne comprend l’arnaque qu’un 19 juin 1965. Ainsi, en 1962, il utilise Ben Bella et le groupe de Tlemcen pour une période courte avant de s’emparer du Pouvoir en écartant le Rais brouillant avec l’aide d’autres hommes qui pour certains, il devait payer pour son opposition au congrès de la Soummam et pour d’autres pour ses frasques pendant le CNRA de Tripoli (Boubnider, etc…) ou pendant ses complots de la prison en France.

Une fois au pouvoir sans légitimité aucune, et bourré de complexe par rapport à ses contemporains, vrais déclencheurs de Novembre 1954, il s’attelle à rapatrier les ossements de l’Emir Abdelkader malgré la dernière volonté exprimée par notre héros resistant d'etre enterré en Syrie, proche de ses maitres spirituels. A l'occasion, il érige une sépulture pour en faire un lieu de recueillement pendant les fêtes nationales et ainsi créer une référence autre au nationalisme algérien. De temps à autre, la presse évoque brièvement certains de nos chouhadas, Didouche, BenBoulaid, Ben M’Hidi, Zighout, mais point leurs compagnons vivants. La guerre de mémoires quoi ! Dans l’école, l’histoire d’Algérie s’arrête en 1857 pour reprendre en 1965. A ce jour, la majorité de nos compatriotes formés à l’école de Boumediene ignorent tout de Messali ElHadj, du congrès d’Hornu de 1954, du CRUA, de la réunion des 22 et encore moins nommer les signataires des accords d’Evian ! Une société sans mémoire.

Pour maintenir l’équilibre de son pouvoir, il utilise et oppose les différents courants, berbéristes contre baathistes, arabisants contre francophiles, communistes contre islamistes, et il confie les hautes commandes de l’ANP aux anciens officiers de l’armée française pour s’assurer de ne pas être évincé et aussi pour contrer les authentiques maquisards de l’intérieur qui sont finalement écartés à la suite de la tentative de putsch de Tahar Zbiri. D’ailleurs ce dernier, lors de leur dernière rencontre : «On enlève Sidi Rabbi et on retrouve un autre Sidi Rabbi». Petit à petit, il consolide son régime et commence à éliminer tous ses camarades putschistes de 1965 jusqu'à ce qu’il se trouve seul maitre à bord. Mais étant seul au sommet de l’Etat, il réalise que la légitimité populaire lui manquait et que son regime s'essouflait. Il ne tarde pas à lancer un débat sur la charte nationale (une sorte de défouloir pour les gens dont la fin de la recréation est sifflée juste après les élections présidentielles dont il est le candidat unique). Juste avant sa mort, tous les pouvoirs étaient entre les mains du seul homme sans partage aucun.

Mr. A. Soltani
Ancien Moujahid
Base de l’Est

LIRE LA SUITE : DEBAT : Non, Boumediene n'a jamais construit un Etat (2ème Partie et fin)

Plus d'articles de : Débats

Commentaires (98) | Réagir ?

avatar
fateh yagoubi

merci pour le partage

avatar
fateh yagoubi

merci pour le partage

visualisation: 2 / 87