Démocratie : le cordonnier canadien est mal chaussé

Démocratie : le cordonnier canadien est mal chaussé

Le gouvernement canadien se promène actuellement un peu partout sur la planète en donnant des leçons de démocraties alors qu’il en diminue sciemment la portée pour ses propres citoyens.

Quand il va à Kiev, ce n’est pas tant la défense de la démocratie qui motive le Canada que ses intérêts politiques. En même temps qu’il accorde des soutiens financiers à répétition à l’Ukraine, il tente de faire adopter à domicile le projet de loi C-23 qui aura pour effet de diminuer cette démocratie pour ses propres citoyens.

En réaction, le 11 mars, plus d’une centaine de professeurs des universités qui enseignent les principes et les institutions des démocraties constitutionnelles ont écrit une lettre publique pour souligner que si cette Loi devait être adoptée, elle ferait des torts importants à la démocratie. C’est que cette nouvelle réglementation viendra réduire l’accès au vote des étudiants et citoyens des Premières Nations, deux groupes qui sont connus pour ne pas voter pour les conservateurs.

Même le chef d’Élections Canada dénonce C-23. Le directeur général des élections du Canada, Marc Mayrand, envisage de démissionner si cette "réforme électorale" est adoptée telle quelle. La future loi restreint les pouvoirs de surveillance et d’éducation de l’organisme fédéral qui est responsable de maintenir l’impartialité du vote. Elle diminue sa capacité à protéger l’équité du processus électoral et élimine le pouvoir de contrainte de l’agence dont le Commissaire ne serait plus responsable devant le Parlement. Les inspecteurs d’Élections Canada ne pourront plus contraindre des témoins ou exiger des partis politiques qu’ils fournissent des reçus et autre documentation concernant leurs dépenses électorales. L’organisme ne pourra plus communiquer avec les citoyens et avoir les pouvoirs dont il a besoin pour enquêter sur les cas d’infractions électorales. Ce projet de loi interdit même à Élections Canada de promouvoir la participation politique par le moyen de campagnes pour inciter les gens à voter et de publier ses rapports de recherche sur le processus électoral.

Pendant qu’il réduit sciemment à domicile la portée de la démocratie pour des motifs électoralistes, le Canada a créé en 2009 une nouvelle agence gouvernementale avec un budget de 30 à 70 millions par année pour en faire la promotion dans le monde. Mais qui prendra au sérieux les conseils du cordonnier canadien qui est si mal chaussé ?

Michel Gourd

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