Al-Jazira et nos Barbie pleureuses Par Mohamed Benchicou

Al-Jazira et nos Barbie pleureuses Par Mohamed Benchicou
Elles ont quelques Noëls de retard mais le cœur y est : les Barbie pleureuses sont de retour à Alger, à l’heure pour le sapin de 2007, prêtes à nous émouvoir ou à nous émerveiller – c’est selon - de leur inépuisables réserves lacrymogènes. Oh, bien sûr, toutes ne ressemblent pas à la fille aux cheveux blonds, certaines ont même de vraies moustaches, d’autres de vraies barbes, il en est même qui sont ministres, journalistes ou directeur général de l’ENTV, mais toutes connaissent parfaitement leur métier : pleurer à la demande, sur ordre du capricieux bambin qui a commandé toutes ces Barbie pour les fêtes de Noël.

Peu importe qu’on ne ressente aucun chagrin. Le but du jeu n’est pas de pleurer sous le poids de la douleur mais d’offrir une représentation théâtralisée de la douleur qui soit plus authentique, plus impressionnante que la douleur elle-même ! Réussir un simulacre de l’affliction qui en arrive à surprendre les affligés eux-mêmes.

Sur ce registre, nos Barbies pleureuses, Ould Abbès et Habib Chawki en chefs de file, suivis de ces créatures asservies au proxénétisme politique, qu’ils soient politiciens-supplétifs vivant de leur mercenariat ou journalistes officiant dans de serviles organes vivant de l’obole de l’ANEP, nos Barbies pleureuses ont honoré la réputation de la célèbre poupée : elles ont versé sur la mémoire des victimes des attentats du 11 décembre, « souillée par le sondage d’Al-Jazira » tellement de chaudes larmes qu’elles ont fini par interloquer les familles endeuillées elles-mêmes ! Le secret est pourtant simple : il faut du temps pour épuiser les larmes « rechargées » en quantité sur le corps de ces Barbie car elles n’obéissent qu’à une seule touche : pleurer sur « l’offense Al-Jazira » à l’exclusion de toutes les autres offenses à la mémoire des victimes des attentats du 11 décembre. Nos Barbie pleureuses sont, par exemple, insensibles aux graves insultes proférées publiquement par le chef-terroriste Ahmed Benaïcha qui menace d’autres « 11 décembre » si le FIS n’est pas réhabilité et accuse nommément les services algériens d’être derrière les attentats ! De même que nos poupées n’ont aucune émotion à l’idée que les victimes du 11 décembres aient été assassinées par un terroriste fraîchement libéré de prison.

Elles ne sont pas programmées pour s’émouvoir des crapuleries politiques du régime algérien, mais seulement de celle d’Al-Jazira ! Nos Barbies ne s’indignent pas du terrorisme islamiste, elles ne dénoncent pas l’intégrisme, elles s’acquittent juste d’une mission dilatoire pour laquelle elles ont été actionnées.

De ce point de vue, on doit reconnaître que nos Barbies sont parfaitement fidèles à l’antique tradition des « pleureuses », ces femmes rétribuées pour sangloter, gémir et implorer le Ciel lors des obsèques et dont on louait les services pour ajouter au climat d’affliction : les « femmes pleureuses » ne pleurent que sur le défunt pour lequel elles sont payées. Elles ne se trompent jamais de funérailles. Dans la tradition judéo-arabe, on les appelait « El hazniates » ou « El Hjaniyè » en hébreu. Toute vêtues de noir, en robe ample et les bras entièrement couverts, elles s'asseyaient à proximité du corps étendu à même le carrelage et s’adonnaient parfaitement à l’art du simulacre, n’hésitant pas à hurler ou à se griffer le visage jusqu'au sang pour la perte d’une personne qu’elles n’ont jamais vue et pour laquelle elles n’éprouvent aucune peine.

Il y a cependant quelque motif de se réjouir que nos Barbies aient su ressusciter avec brio une coutume qui date quand même de l’Antiquité et qu’aujourd’hui encore, dans la vallée du Nil, est évoquée dans une des plus belles scènes représentées sur les murs des tombes thébaines, celle des pleureuses de la tombe du souverain Ramose (voir photo). A l’heure où la fantomatique « Alger, capitale de la culture arabe » s’achève dans l’indifférence on peut en effet considérer que la prestation de nos Barbies clôture avec bonheur une manifestation qui manqua singulièrement d’exhibitions de qualité.

Quant au public, il semble bien qu’il n’ait comme spectacles pour l’année 2008 que la parodie du pouvoir…

A moins qu’il n’entre lui-même en scène.

Mohamed Benchicou

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Commentaires (19) | Réagir ?

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khelaf hellal

Pardon fouzia ;je vous respecte et je respecte ce que vous avez dit, pardon.

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khelaf hellal

J. P. Sartre est un philosophe athée ; respecté dans les plus grandes universités du monde. Il sait que la mort existe (El mout kaina), et le Néant existe aussi. Il n'y a pas de raison de vouloir mourir avant l'heure sauf si les terroriste islamistes décident autrement. Sartre ma 3endou la dine la mela, ce qui ne l'a pas empéché de décrocher le prix Nobel et d'être un exemple pour les jeunesses du monde contemporain.

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