Djaffar Aït Menguellet, du Mont d’Ibudraren au Mont Royal

Djaffar Aït Menguellet. Photo Kamel Harani.
Djaffar Aït Menguellet. Photo Kamel Harani.

Depuis le découpage administratif de 1985 l'ex-commune de Tassaft est scindée en trois communes que sont Akbil, Yattafen et Ibudraren. Cette dernière, composée de neuf villages dont Iɣil Bbamas, a donné de grands hommes de combat amazigh, de lutte anticoloniale, de la littérature, l’art et le théâtre.

Il convient de citer le colonel Amirouche Aït Hamouda, chef de la wilaya III pendant la guerre anticoloniale, Djaffar Ouahioune, membre fondateur du Mouvement Culturel Berbère, assassiné le 10 mai 1997, Chabane Ouahioune écrivain et auteur de plusieurs ouvrages, Mohya, poète dramaturge et militant de l'identité amazighe, Amar Ould Hamouda et M'barek Ait Menguellet, deux immenses militants de la première heure au sein du PPA-MTLD, militants pour l'identité Amazigh, assassinés par leurs frères de combat en 1956 mais aussi de Mustapha Bacha, militant de la cause amazigh et acteur du printemps 1980. Et surtout, le grand poète et philosophe Lounis Ait Menguellet.

Djaffar Ait Menguellet est un autre fils d’Ibudraren. Il est indéniablement sur les traces des premiers cités pour apporter, avec son bel art, sa touche pour ne pas dire sa brique à l’édifice culturel kabyle et amazigh en général.

Djaffar Ait Menguellet a traversé 6340 km d’Ibudraren, situé au versant nord du massif montagneux Djurdjura, au Mont Royal, une colline de laquelle découle le nom Montréal, pour donner un magnifique spectacle samedi dernier. Il a débarqué comme un artiste accompli et au palmarès bien établi, fort de cinq albums. Il s’est produit le 12 novembre au théâtre le Château en vrai professionnel inondant la soirée en chants et en rythmes variés allant du moderne au traditionnel tiré de la pure tradition musicale Kabyle, comme Tizemmarin, un moment fort de la soirée.

Le théâtre Le Château, faisant partie du groupe des trois salles les mieux préservées de Montréal, est conçu par l’architecte René Charbonneau, et construit en 1931/32 par l’entreprise générale Acadian Construction Co. Ltd. C’est le lieu où s’est produit pour la première fois le regretté Lounes Matoub en 1993, mais aussi plusieurs autres chanteurs Kabyles tels que Ali Amrane (2012), Si Moh (2013), Assam Mouloud (2015) et L’autre regretté Lounes Kheloui (2016).

C’est justement en rendant homme au grand maitre, qui vient de nous quitter, que Djaffar Ait Menguellet a commencé son spectacle. En effet après une minute de silence, le fils d’Ibudraren a formidablement repris la chanson Anda-ten yemɣaren-nni (Ou sont-ils les sages de jadis). C’était le moment émouvant de la soirée.

Il s’en est suivi un total de 15 chansons triées parmi les dizaines que renferme la discographie de Djaffar Ait Menguellet, et que sont : Yuli wass, Mi walaɣ, Dumminu, Asteqsi, Ay yussan-nni, Isem, Sin-nni, Lukan, Ṣalḥin, Ameyyez, Ay yiḥbiben, Ɛawen-iyi, Telt yam, Tiqbayliyin, A bu laɛyun.

Tizemmarin étant le dernier morceau joué par l’artiste en utilisant sa fameuse flûte traditionnelle kabyle, et qui a porté le nombreux public dans une ambiance indescriptible au point où le chanteur est descendu de la scène en se mêlant avec le public pour une danse qui restera gravée dans les mémoires.

Il est à noter que les organisateurs ont innové en portant sur un écran géant les paroles de chaque chanson chantée par l’artiste, ce qui a fait dire à un des spectateurs Bouaziz B. ceci : "Elle est formidable cette idée d’afficher au fur et à mesure chaque chanson. Ça permet non seulement aux spectateurs de suivre les paroles, mais aussi et c’est très important : Apprendre à lire et à écrire Taqbaylit. C’est ce qu’on appelle joindre l’utile à l’agréable. Bravo aux organisateurs!".

Pour finir, Gateaways Picture Productions vient de réussir superbement sa première production où la synergie avec la fondation Tiregwa et l’orchestration sous la direction artistique de l’excellent Abdeladim Rafik a porté ses fruits.

Un grand merci pour tous ceux et celles qui ont contribué, de près ou de loin, à ce succès dont les sponsors Karim Ihil, Youcef Ait Seddik, Zahir Hami, Tahar Aouane, Said Yacoub, l’animatrice Zahia Belaid et les partenaires Kamal Harani, Sabrina At Sayd, Berbère TV, Belmedia TV Web de Hocine Bellahdjel, la troupe de danse Tafsut et enfin le chanteur Achour Zanoutene qui a assuré formidablement la première partie du spectacle.

Il est à signaler que la fondation Tiregwa a rendu hommage à Djaffar Ait Menguellet pour la beauté de son art.

Racid At Ali uQasi

Ottawa, 15 novembre 2016.

Voir quelques extraits du spectacle :

https://www.youtube.com/watch?v=MHBz8xKXVjI&list=PL39r_dm_prqBUmPzsFfNpIOklK7VN23LT

Note

C’est l'explorateur breton Jacques Cartier, lors de son second voyage en Amérique en 1535 qui était à l’origine du nom de Montréal dérivant de Mont Royal, la colline montagneuse qui surplombe la ville.

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