Turquie : Le coup d’Etat raté et celui dont on ose dire le nom

Le projet d'Erdogan est lisible pour veux bien voir
Le projet d'Erdogan est lisible pour veux bien voir

Comme celle de "l’incendie du Reichstag", "la nuit du blocus du pont du Bosphore" restera dans les annales. Ankara et Istanbul ont vu une petite soldatesque s’ébranler pour, disait-elle, sauver la Turquie de l’ogre AKP et tout ce que la planète compte de démocrates s’est élevé contre ces factieux bambins en armes qui n’ont même pas réussi à publier leur proclamation.

Le Calife, plus chanceux qu’Omar, Othmane et Ali réunis, s’en est sorti plus déchainé que jamais ! Juges, journalistes, enseignants, fonctionnaires, universitaires, militaires, généraux et amiraux ; journaux, radios et chaînes de télévision,…. ont subi son courroux. Les troupes de l’AKP sont appelés à occuper les rues en appuis à une purge qui n’a le temps ni de l’instruction, ni du jugement. Sommaire et violente. Elle écrase alliés d’hier et ennemis de toujours. Au final, la Turquie aura véritablement connu un coup d’état en cet an 2016. Il est Islamo-nationaliste, sans que personne n’ose le nommer et dire que c’est un coup de force comme l’histoire politique en a rarement registré.

Les nationalistes, épargnés par la répression, semblent être appâtés par la politique de rupture et de guerre qu’esquisse Erdogan à l’égard et contre les Kurdes. Par haine atavique à l’égard de ce peuple, ils se font les marches pieds d’une totale négation du Kémalisme. Parions qu’ils finiront eux aussi, un jour, peut-être pas si lointains, sur le gibet, à se balancer sous l’étendard du néo-Califat. Pour le moment, ils détournent les yeux et consentent à jouer le rôle de potiches d’opposition en condamnant un coup d’Etat raté sans oser nommer celui qui réussit au-delà de ses plus folles espérances.

En Algérie, nous avons à maintes reprises eu à connaître ce type de coups d’Etat. A l’occasion du Conseil National du Caire, en 1957, où les partisans de l’inféodation à l’arabisme ont pris le pas sur les souverainistes algériens. A l’été 1962, quand le noyau dure de l’état néo patrimoniale, la caste militaro-bureaucratique de l’extérieur, a balayé l’Etat ALN-FLN de l’intérieur accusé de wilayisme. Puis, en 1988. Les principales caractéristiques de "la nuit du blocus du pont du Bosphore" ont pu être inspirées de la fameuse machination d’octobre 1988, avec son pluralisme de façade manigancé au prix de centaines de morts. Enfin, lors de la décennie sanglante où la confrontation avec les islamistes a servi à écraser les forces démocratiques et à amener Bouteflika au pouvoir au service d’une oligarchie militaro-bureaucratique au summum de sa puissance.

A partir de notre expérience propre, nous pouvons donc comprendre, un peu plus vite que d’autres, le fond des manigances Erdoganiennes. D’autres peuvent le faire à partir d’une approche comparative avec l’expérience Hitlérienne, mais le veulent-ils ?

Mohand BAKIR

Plus d'articles de : Analyse

Commentaires (3) | Réagir ?

avatar
Bachir Ariouat

Pas toute à fait, ça commence à noircir, mais il reste une toute petite lueur d'espoir, c'est on veut que notre pays s'en sort, c'est à nous qu'il revient d'agir pour redresser la barre du bateau ivre.

avatar
khelaf hellal

Tout a l'air de prendre des allures de "la nuit des longs couteaux " des SS après le coup d'Etat manqué de ces derniers temps en Turquie. Une occasion exquise pour Le Sultan pour opérer une purge à grande échelle dans les rangs de l'armée, de la justice, de l'administration, les médias etc... Le fascisme en marche ne s’accommode plus des dispersions de pouvoir ni des sorties des rangs entièrement acquis à un seul et unique tyran. Un coup d'Etat manqué qui a fait précipiter le grand nettoyage et la mise à l'écart de tous les adeptes et sympatisants de l'autre gourou et rival exilé Fethulah Gulen. La Turquie n'est sortie de l'auberge avec ces rivalités dans la même religion, le même combat idéologique

visualisation: 2 / 3