"Iguersafen ou l’esprit de tajmaat réinventé"

Le monument d'Iguersafen investi par les artistes.
Le monument d'Iguersafen investi par les artistes.

Ce village niché sur un mamelon à l’est d’Azazga a accueilli pendant une semaine le festival Raconte-Arts.

Il y a une boutade qui circule dans ce coin reculé de la Kabylie pour illustrer la différence entre villages. On dit, malicieusement que pour rejoindre Bouzeguène, il suffit de suivre les cadavres de bouteilles de bière et de vin qui parsèment son chemin. A contrario, pour gagner Iguersafen, c'est une autre histoire synonyme de leçon de civisme commence à l’intersection appelée Assif U Serdun. Un lieu écrasé par ce soleil impitoyable de juillet. De ce coin de nulle part, le visiteur prend à gauche pour suivre une route assez bien tenue jusqu’à le chef-lieu de la commune d’Ath Idjer. De là, commence Iguersafen et une ligne de démarcation marquante, qui dénote la formidable organisation villageoise de ce dernier. D'emblée, le visiteur est frappé par les lignes blanches qui bordent la route, les coussins-berlinois qui remplacent les insupportables dos-d’âne et la propreté quasi-irréprochable du parcours. Ce village de 4500 habitants n’usurpe pas son titre de village kabyle le plus propre en 2014.

Le profane côtoie le sacré. La mosquée a accuelli en son RDC des expositions.

Raconte-arts s’invite au village

"C’est une organisation digne d’un gouvernement", souligne un invité. D’où l’organisation de la 12e édition du festival Raconte-arts. «On ne dort presque plus depuis une semaine», raconte Malek Haddad, un jeune vigilant. Le festival a commencé le 24 juillet et s’est achevé le 31 avec un spectacle de rue et un immense concert. «On a mobilisé 1367 adultes pour toute la semaine, plus de 500 jeunes sont affectés pour la vigilance. Tout est filtré, surveillé», raconte Karim Raab, vice-président du comité de village. Durant toute la semaine, on pouvait observer des artistes jouer dans les rues des villages, des peintres comme l’immense Denis Martinez, ont immortalisé leur passage par des fresques sur plusieurs murs.

A l’heure des bilans, les organisateurs affichent le sourire et quelques signes de fatigue d’une semaine intense. "Ce festival était un pari pour nous, reconnaît Karim. C’est un moyen d’aider la culture ou du moins de lui donner une impulsion, ce festival a fait faire au village un saut de 30 ans en avant. Aujourd’hui, dernier jour du festival, on n’a enregistré aucune réclamation. On peut désormais organiser n’importe quel festival".

Des troupes de plusieurs régions d'Algérie et de l'étranger se sont produites durant ce festival.

L’organisation du festival

Les organisateurs ont la banane. Le village a nourri et hébergé quelque 380 artistes ou participants. Il accueilli Plus de 4500 visiteurs et 45 journalistes de la presse nationale. "On a là l’exemple d’une construction de la Kabylie autonome par la base !", observe un grand journaliste. Les autres villages devront en prendre de la graine. Cependant, cette organisation citoyenne a une histoire. Ce village a été rasé par l'armée française le 4 décembre 1957. Ses habitants ? Certains furent embarqués en prison, d'autres ont trouvé refuge dans les villages environnants. A l'indépendance, il fallait tout reconstruire. "Devant la démission de l'Etat, on a fait face seuls à la tâche, depuis cette époque, on a maintenu ce mode d'organisation", raconte Karim. Depuis quelques années une nouvelle génération sensible aux questions environnementales a pris la relève. Le résultat est là : un village exemplaire.

La place à palabres

Des projets

Le village possède un cybercafé, un système de tri sélectif mais surtout une organisation d’airain. Iguersafen veut aller plus loin : arriver à zéro déchet. Ironie de la géographie : à quelques kilomètres les routes sont malheureusement jonchés de détritus, de bouteilles de toutes sortes. Les villageois ne se découragent pas. "On se réunit avec les villages environnants pour impulser une dynamique environnementale. On veut bâtir un centre d’enfouissement au profit des villages", pronostique Karim.

Hamid Arab

Les martyrs reposent à l'ombre dans un sommeil mérité.

Plus d'articles de : Algérie

Commentaires (1) | Réagir ?

avatar
masin at waevan

appremment l'imam de ce village s'est oppsé a ce que la mosquée soit mise a la disposition de ce féstival comme si il s'agit de son propre bien. j'espere que cet incident va reveiller les kabyles pour qu'ils oeuvrent a faire retrouver a el djamaa, lieu de rangement et de reunions des villageois, sa vocation ancienne!