"FFS contre dictature" : Yaha Abdelhafidh livre ses Mémoires aux Algériens

La couverture de l'ouvrage
La couverture de l'ouvrage

Avant d'aborder le tome II de ses mémoires, il nous a paru essentiel de présenter un tant soit peu (Ne serait-ce qu'en rappelant à notre façon, un passage du premier tome, Ma guerre d'Algérie), cet homme humble, cet homme juste, cet homme de parole et de principe, cet homme qui était naïf et confiant, qui avait tout sacrifié pour son pays et qu' un certain député du parti d'Ait Ahmed a traité tout récemment de menteur après publication de l'ouvrage tant attendu par les éditions Koukou à Alger il y a quelques jours.

Le 04 avril 1956, le clairon de midi venait de sonner. C’était l’heure pour De Flogny et ses compagnons (Des officiers de l’armée) de se séparer et pour l’administrateur, accompagné d’un certain Si Larabi de rentrer chez lui pour le déjeuner.

"Un seul coup de feu avait suffi. La balle avait traversé sa tête d’un bruit sourd. Le sang avait giclé, maculant mon pistolet, un 7.65 et mon avant-bras…"

Raconte Yaha Abdelhafid, qui venait ce matin-là, d’abattre non loin de sa maison, le successeur de Dumont, l’administrateur de Michelet mort également dans une embuscade tendue par Amar Ath Cheikh vers la fin 55 du côté du lieu-dit Timedwin.

Il y a lieu tout d'abord de saluer l’ouvrage qui ne manquera pas de remettre les pendules à l’heure, s’agissant d’une période très peu connue des générations nées à l’indépendance ou bien après.

Un grand hommage est à rendre donc à l’un des rares témoins encore vivant, grand révolutionnaire devant l’Éternel, celui-là même qui a escorté Ben M’hidi et Abane depuis les Ait Ouabane pour le congrès d’Ifri Ouzelaguène, qui a demandé et qui a obtenu de voir le colonel Amirouche en personne en vue d’attirer son attention sur le fait que la plupart des victimes du capitaine Si Ahcène était de braves maquisards, connus pour leur patriotisme sans faille ; celui-là même qui a permis à Ait Ahmed d’intégrer le mouvement d’opposition naissant qui portera le nom de Front des Forces Socialistes, en lui faisant quitter discrètement et à l’insu du colonel Mohand Oulhadj Alger où l’ex député occupait une villa à Hydra qu’il a vendue tout récemment ; celui-là-même qui a permis à Bessaoud Mohand Arav de vivre, comme il s’était opposé à la liquidation de Si Tayeb Izarouken, maire de Michelet et chef de milice qui aidait les soldats de l’ANP à procéder aux ratissages dans la région ; celui-là même qui a réussi à retourner des soldats de l’armée française (Attaque du poste militaire de Taskenfouts) avec la participation du jeune Nafaa At Oussadi durant la révolution et à gagner à la cause des harkis ; celui-là même qui avait amené Bélaid Ait Medri au FFS, bachelier en 48 déjà, alors qu’il occupait le poste de premier chef de la daïra d’Azazga et en compagnie de qui il se trouvait quand la radio annonçait "l’arrestation d’Ait Ahmed et de Bélaid Ait Medri" à Ait Zellal, alors qu’il s’agissait tout simplement d’Ali Mécili ; celui-là même qui a mené à terme les négociations avec les représentants de Ben Bella à quelques jours du 19 juin 1965 et qui a permis au Che de découvrir notre région et de saluer le courage de nos valeureux combattants.

Parler de Yaha Abdelhafidh n’est pas chose aisée et ce n’est pas en quelques lignes qu’on pourrait raconter le personnage et son engagement précoce pour l’indépendance du pays, avant de poursuivre un combat qu’il pensait juste, après l’indépendance. Lors de son discours historique de l’ Akefadou en 1958, le colonel Amirouche en personne avait fait comprendre à ses compagnons que l’indépendance une fois acquise, un autre combat restait à mener.

Un hommage est à rendre également à l’auteur Hamid Arab sans qui ces précieux témoignages sur des pans entiers de notre glorieux passé auraient sombré dans l’oubli.

L’auteur de cette contribution invite le lecteur à prendre connaissance du contenu de l’ouvrage et, comme pour l'inciter à découvrir la suite, il lui suggère, ce faisant, certains extraits de l'avant-propos :

"Fallait-il se taire ? Écouter l’herbe pousser au lieu d’agir ? Abandonner l’héritage de Novembre et de la Soummam, bradé par les tenants du pouvoir ? Non, je ne pouvais me résoudre à laisser faire. Je n’étais pas le seul, car le pouvoir s’était construit contre l’Algérie profonde. La vraie. Nous étions nombreux à croire que la lutte devait continuer pour l’Algérie. Celle dont nous rêvions pendant les maquis de l’indépendance".

(..) "S’opposant avec brutalité au Gouvernement provisoire (GPRA), un groupe d’officiers, surnommé le «clan d’Oujda», avait dès le fameux congrès de Tripoli (juin 1962) entrepris de détourner, avec la complicité fort intéressée de quelques membres du CNRA le fleuve de la révolution au profit de leur avenir politique. Parmi ces conjurés, il y avait bien sûr leur chef, Houari Boumediene et cet autre fidèle lieutenant Abdelaziz Bouteflika qui comme une injure au temps et à l’histoire se retrouve président du pays un demi-siècle plus tard".

(...) "Le FFS, ce mouvement pour lequel j’avais tout sacrifié, était notre réponse aux injustices des nouveaux apparatchiks au pouvoir. Au FFS, nous avions refusé que le bâillon soit l’étendard de notre pays. C’était parce que nous estimions que renoncer à l’esprit de Novembre c’était condamner l’avenir du pays. C’était la raison pour laquelle nous, anciens maquisards de l’indépendance, nous avions repris le chemin de la montagne. Et… de la lutte armée contre le régime du duo Ben Bella-Boumediene".

(…) "Au sortir de la guerre, des pans entiers de la société se débattaient dans une grande misère. Ouvriers sans travail, déclassés, désargentés et sans pitance. Des djounoud erraient sans le sou. Des veuves démunies et des enfants de martyrs pointaient chaque matin par centaines devant le PC pour nous demander à manger ou à travailler. Nous les accueillions et aidions comme nous pouvions. Avec peu de chose car nous ne recevions pas d’argent de l’intérieur. Ni de l’extérieur".

(…) "La création du FFS était notre réponse politique pour mettre un terme aux errements autoritaires du régime de l’époque. S’opposer à la prise du pouvoir par la force. Ce n’était pas une région d’Algérie, comme le pouvoir l’avait diaboliquement répété, qui se dressait contre le reste du pays. Non, car d’abord le moindre empan de cette terre nous étaient cher. Elle était nôtre dans toute sa splendide immensité. Ensuite, il y avait parmi nous des femmes et des hommes de plusieurs régions. Des Algériens désappointés par le pouvoir personnel, révoltés par l’arbitraire et la chasse à l’homme lancée contre les opposants".

(…) "Le Front des forces socialistes était le seul mouvement d’opposition organisé avec un bastion de militants et de sympathisants et une structure d’adhésion assez large. Sa profondeur sociale, ses prolongements auprès des moudjahidine, des politiques, des syndicalistes et des étudiants en faisaient un parti redoutable aux yeux du régime. L’alliance des figures de proue des anciennes wilayas III et IV avec des personnalités politiques de divers horizons suffisait pour constituer un casus belli pour Ben Bella-Boumediene.

La réponse de Ben Bella fut l’envoi de la troupe pour nous combattre par les armes. En un temps éclair, le ministère de la Défense dépêcha d’importants renforts en Kabylie".

Un trésor inestimable d’informations et de révélations. Un livre à lire et à relire s'il le faut.

Nacer Achour

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Commentaires (11) | Réagir ?

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departement education

merci

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algerie

merci bien pour les informations

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