L’Algérien désespère de trouver son Algérie

Ould Kablia, ministre de l'Intérieur, lors de la publication des résultats.
Ould Kablia, ministre de l'Intérieur, lors de la publication des résultats.

Comme dans les monarchies absolutistes, le pouvoir a décidé du casting de la prochaine assemblée nationale. Les critères sont connus : la soumission au clan, le zèle dans la défense des régnants. Le reste est affaire de manipulations de chiffres à l’ombre de bureaux qu’on ne verra jamais.

Ces courtisans élevés dans l’écrasante majorité dans les batteries pondeuses du FLN, et ses rejetons, le RND et le MSP sont là pour assurer d’abord le service après-vente des décisions prises en haut lieu et se servir au passage des nombreux privilèges que permet la fonction de député ou de ministre. Cette armée de figurants est grassement rétribuée sur les deniers de l’Algérie qui provient de la manne pétrolière.

La prochaine assemblée aura ceci au moins de particulier : 75% des Algériens n’y seront pas représentés. Ceci si on donne quelque crédit au taux de participation. Autrement dit, comment le FLN peut-il prétendre être majoritaire avec 6% de voix ? La question mérite d’être posée si on croit fermement que ce pays mérite mieux que le spectacle qui s’offre à nos yeux.

Le professeur Mebtoul dans son article sur les législatives évoque ses paradoxes qui entachent sérieusement les législatives et par delà compromet la représentativité de la prochaine assemblée. Il rappelle ces vérités simples : le Mouvement populaire algérien a recueilli 165.600 voix pour 6 sièges, le Front du changement a recueilli 173.981 voix pour 4 sièges, le Front national pour la justice sociale a recueilli 140.223 pour 3 sièges, le Front El-Moustakbel a recueilli 174.708 voix pour deux sièges, le Parti du renouveau algérien a recueilli 111.218 voix pour un siège. Pour les partis n’ayant eu aucun siège nous aurons 7.634.979 de voix exprimées moins que le total des partis ayant eu des sièges, soit 1.366.656 de voix. Donc plus que parti FLN et presque le triple du RND.

A ce titre, une frontière a été franchie à la lumière des dernières législatives. L’indécent a été commis sous les yeux du peuple et d’une communauté internationale bien trop complaisante avec le pouvoir. 

Mais une chose est sûre : ses raisons ne sont pas les nôtres. Ce sont les mêmes qui, hier, applaudissaient les élections à la sauce Ben Ali et à la Moubarak, qui aujourd’hui expriment leur satisfaction sur le déroulement des élections en Algérie. Donc, il n'y a rien à attendre de ce côté-ci. 

Comment en effet accepter qu’une minorité de d'"élus" qui s’apparentent plus à des courtisans du pouvoir qu’à  de véritables représentants du peuple décide de l’avenir de notre pays ? Cette élection est l’échec le plus retentissant de la décennie Bouteflika. Elle rappelle le fossé énorme qui s’est gravement creusé entre les institutions et le peuple. Laisser ces députés siéger est inconséquent. 

Poursuivre ce processus de rupture avec la société, ou le cautionner de quelque manière que ce soit c’est inévitablement prendre le risque de pousser le pays réel à la révolte. Que l’on ne se sous-estime pas les tensions qui traversent en profondeur le pays. Ni la conscience politique des Algériens. Les partis qui ont pris part à cette élection ont une grande responsabilité s’il garde encore le silence. A ce titre, l’attitude du FFS est troublante. Car ce parti ne nous a pas habitués aux compromissions. Des partis nés pour la majorité dans la couveuse du pouvoir sont paraît-il en train de réfléchir à la meilleure réponse à donner. Faut-il s'attendre un retrait collectif de certains "élus" ? Difficile à avancer pour le moment car on sait jusque-là qu'ils mangent tous dans la main du pouvoir. Au-delà, il n'y a rien à attendre ni du RND, ni du Parti des travailleurs qui puisse gêner le président. 

Décidément la vie politique algérienne est une succession de recommencements. Cinq décennies n’ont pas suffi à épuiser les scénarios concoctés par le cabinet noir. Plus que jamais l’Algérien désespère de retrouver son Algérie. Celle dessinée dans les masures écrasées par le soleil un certain août 1956. 

Yacine K.

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Commentaires (5) | Réagir ?

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kamel ait issi

De quelle Algerie parlez-vous, monsieur?

En 1954, les populations pour ne pas user du terme qui fache "Peuples" du territoire alors francais, ont trouve un denominateur commun - Le mepris et le colonialisme sauvage - pour en faire un projet actionable en 1954 - La misere coloniale qui les a quelque peu unis, n'a jamais cesse - Cette Algerie-la est bel et bien vivante et bien portante - Elle n'a fait que changer de mains et de moeurs -

A la place du francheese on install le khrabia, et

a la place cretin-sme, l'islamisme.

Dont aucun n'ont vu le jour chez ces Coq-us qui ont leur fumier ainsi mis en flammes. Bref,

Cette Algerie-la est toujours la. Elle demeure presque telle qu'elle a ete cre'e de toute pieces pour simplification administrative - Passant du mepris a la haine et de la simplification a la complication... avec beaucoup de violence, enormemment..... meutre et torture...

"Leur" Algerie n'existe pas et n'a jamais existe' ! Ils ont besoin de la creer, justement, et ca le monde entier s'y oppose...

Tant qu'il y aura des Africains prets a recevoir des armes de ce monde pour-la pour s'en servir contre les leurs, l'algerie ne sera pas...

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khelaf hellal

En plus de cela si on retient que le FIS désobéissant est retourné à la maison de son géniteur le FLN en soutenant la propagande des mosquées actuellement gérées par le père, on comprend maintenant les scores écrasants du FLN des deux derniéres législatives au cours desquelles les votes des anciennes ouailles du FIS, des repentis, des égarés ont été d'un grand secours. On se demande à présent qui se cache derrière le FLN ? Il y a anguille sous roche, que signifie cette déclaration en pleine campagne du Ministre Ghoulamallah qualifiant les abstentionnistes de lâches et d'hypocrites ? Que signifie l'autre appel du pied de Ould Qablia pour un retour au bercail en votant patriotiquement FLN comme les zaouias du Sud ? L'Alliance Verte en a reçu une autre savate à la figure en croyant qu'elle était la seule à rouler pour l'islamisme politique dans le pays aprés le FIS dissous.

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