Le candidat-président Nicolas Sarkozy piège la France

Nicolas Sarkozy, candidat à la présidentielle
Nicolas Sarkozy, candidat à la présidentielle

"Toujours le chef est seul en face du mauvais destin", Charles de Gaulle

Les Français et bien entendu beaucoup d’Algériens qui croient encore que quelque part dans les affaires de l’Elysée quelque chose de sérieux puisse rouler pour l’intérêt de l’Algérie, sont en train d’assister au dernier coup de bluff du socialisme. Le socialisme comme dogme et en temps que pratique d’économie politique définissant les fonctions individuelles et sociales.

Le pays de Jean Jaurès, depuis l’avènement il y a une quarantaine d’années de Georges Pompidou le "littéraire" et la triangulation banques, assurances, fisc, qui l’encercle dès ses premiers pas sur le parvis du palais présidentiel, entre de plain-pied dans la civilisation yankee. Sur le paradigme du profit de l’entreprise et de ses actionnaires où le travailleur salarié est déterminé dans la relation qui lie les contributions et les bénéfices du patronat. Pendant que tout ce qui noue les rapports entre individus et groupes devient forcément produit commercial, y compris la culture.

La France et la culture de l’argent

Johnny Hallyday va le plus normalement du monde usurper la place de Claude François qui compose des musiques et fait des paroles typiquement françaises et Marshall MacLuhan occupera, petit à petit, les espaces-temps intellectuels un moment légués par Jean-Paul Sartre. François Mitterrand ?

C’est curieusement pendant les quatorze années de son "règne" que la France ait accompli, en vérité, son apprentissage dans la fusion de l’économie planétaire par la grâce de la Communauté européenne qui achève l’intégration de la Méditerranée occidentale pauvre en faisant, en cours de route, semblant de ne pas trop faire attention à l’un de ses grands membres, le Royaume-Uni, dont se méfiait-il tout au début de l’idée de l’Europe Charles de Gaulle. Par la puissance de ses organismes financiers et par sa suprématie sur le marché de l’assurance, Londres commence, pour ainsi dire, à servir de goulot d’étranglement face à la menace développementielle du Vieux continent qui risquerait de remettre en cause le totalitarisme économique et financier des Etats-Unis.

Autrement dit, c’est paradoxalement François Mitterrand qui a confortablement installé la mondialisation en France et à travers elle dans tous les pays qui partagent la confiance dans sa langue et sa culture, dont l’Algérie grand hypocrite francophone. Les échanges avec son principal partenaire en affaires avec elle, la France, débute au sein même de son organisation administrative et civile, qui a pour nom le code napoléonien. Comme le Maroc, comme la Tunisie. Où le socialisme est une dangereuse menace pour la pérennité des équilibres socioéconomiques dans l’agriculture, la manufacture, le tourisme et les services. L’Algérie a échoué lamentablement dans ces quatre créneaux fondamentaux qu’elle achéte aujourd’hui avec l’argent des hydrocarbures.

L’Europe prisonnière de la finance mondiale

A l’époque du premier mandat du leader de la rue de Solferino, le seul organisme Lloyd’s, par exemple, activait dans plus de 140 pays et territoires, aujourd’hui il est dans 200. Il ne réalise pas de faramineux chiffres d’affaires mais sa régularité dans les exercices en agence et en succursale font de ce groupe financier un redoutable canal de "décantation" des pertinents actifs européens, de sorte que ces derniers ne piétinent pas dans les plates-bandes traditionnelles permettant la circulation des produits et des services britanniques et, bien sûr, américains.

Aujourd’hui Nicolas Sarkozy, plus que maints autres ténors politiques européens s’admettant un destin national, conseillé par des roublards de la finance ayant intériorisé le stade de la mondialisation qui privilégie l’abstraction capitaliste monétaire au détriment de l’essor industriel qui ne se fait pas en dehors de la charge sociale, s’assimile donc le rôle qu’il doit tenir devant le super géant américain. Qui consiste au premier chef à protéger contre tout danger "égalitariste" les grandes fortunes. C’est-à-dire de défendre, coûte que coûte, les matériaux capitalistiques indispensables à maintenir la domination de la monnaie contre tout schéma d’agression sociale. Quitte à sacrifier les formes traditionnelles de l’infrastructure industrielle, voire pour le comble, l’éliminer carrément : pour la préservation de l’empire monétaire, la mondialisation ne se soucie pas d’effacer de la carte planétaire de l’entreprise une multinationale de grande carrure en jetant dans la rue ses dizaines de milliers de salariés.

L’ultime nostalgie idéologique

Le socialisme de François Hollande se laisse accroire être en mesure de se mesurer à cette déferlante qui rase sur son chemin tous les édifices censés protéger les acquis sociaux. Ce n’est pas son programme ni ses discours de campagne qui le placent à la tête des résultats du premier tour. Ce sont les Français et les Françaises qui bouclent difficilement le mois ou ceux et celles qui ne trouvent pas du travail qui laissent le Parti socialiste encore espérer. Par la preuve de l’anéantissement de quasiment toute trace communiste dans l’habitus social en hexagone, la revendication syndicale aujourd’hui tient à demi-mot le langage de la défense de l’outil de travail, des infrastructures de production, de l’organisation des affaires agraires, son discours a la couleur de la défense du pouvoir d’achat, de la rémunération.

Le socialisme postmitterrandien ne peut se comprendre que comme nostalgie ayant nourri tant de passion idéologique devant les inégalités sociales et les écarts dans les mérites du labeur. Les termes exacts du capitalisme à travers lequel existe "réellement" le monde dans cette seconde décennie du troisième millénaire, ne sont désormais plus déjà les mots du libre échange – des anciens caciques de la finance nationale travaillent aujourd’hui dans les banques étrangères installées un peu partout dans les villes et les campagnes algériennes, d’autres sont même actionnaires dans des groupes financiers internationaux – mais ceux de l’anti-libre arbitre, où les choix de l’individu ou de la communauté doivent résolument être définis par une nécessité, laquelle nécessité n’est pas forcément quantifiée et qualifiée selon les besoins authentiques de la majorité.

Dès lors, les Etats échappent complètement au contrôle de la majorité parce que les plus gros capitaux n’appartiennent pas à la majorité qui ne peut pas financer l’Etat. Et hélas celui-ci tombe sous la coupe du leadership financier. C’est ce cercle infernal qui fait que le 6 mai prochain François Hollande a très peu de chance de prendre la place de Nicolas Sarkozy qui sait au fond de lui-même, parce que certain de son raisonnement du tout capitalistique, financier, monétaire, qu’il ira jusqu’à 2017. Sauf si la France la plus pauvre continue à vouloir rêver.

Nadir Bacha

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