Syrie : de nouvelles victimes de la répression du régime

Le calme n'a duré que quelques heures.
Le calme n'a duré que quelques heures.

Le régime n'a pas résisté à la tentation de réprimer les manifestants. Le cessez-le-feu n'aura duré que quelques heures avant de faire des victimes.

Des dizaines de milliers de Syriens ont manifesté vendredi à travers le pays pour tester l'engagement du régime à respecter le plan de paix international, mais le cessez-le-feu, déjà précaire, a été de nouveau menacé par la mort de cinq civils tués par les forces gouvernementales. Depuis l'entrée en vigueur jeudi matin de la trêve, les bilans marquent pourtant une nette rupture avec ces derniers mois, au cours desquels les morts se comptaient par dizaines chaque jour. À la faveur de l'accalmie, la communauté internationale examine l'envoi d'observateurs pour surveiller l'application sur le terrain du plan de l'émissaire international Kofi Annan, qui a réclamé vendredi un "accès humanitaire" en Syrie.

Depuis le début des violences en mars 2011, les autorités imposent des restrictions draconiennes à l'accès des journalistes et des humanitaires, empêchant la vérification des informations par des sources indépendantes. Les militants et l'opposition ont dit vouloir faire de cette journée placée sous le slogan de "la révolution pour tous les Syriens" un test pour le régime, qui a pendant plus d'un an essayé d'écraser la contestation dans le sang. "Dès lors que les troupes sont obligées d'alléger la pression, les Syriens peuvent décider par eux-mêmes de se joindre ou pas à cette révolution populaire", estime Karim Bitar, chercheur associé à l'Iris, spécialiste du Proche et de Moyen-Orient.

Le plan en six points de Kofi Annan prévoit, outre la cessation des hostilités, le retrait de l'armée des villes et le "droit de manifester pacifiquement". Damas a toutefois rappelé que toute manifestation devait être autorisée au préalable. Le Conseil national syrien (CNS), principale coalition de l'opposition, a appelé à poursuivre la mobilisation pour obtenir la chute du président Bachar el-Assad. "Le peuple veut la chute du régime" et "Nous allons voir les promesses d'Assad de cessez-le-feu", ont scandé des manifestants, qualifiant l'armée syrienne de "traître", selon des vidéos mises en ligne par des militants.

Plusieurs courants de l'opposition refusent tout dialogue avec Damas avant son départ, ce qui fait craindre aux analystes que le plan Annan ne se limite à son volet militaire en l'absence de réel dialogue politique. L'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) a fait état de la mort de quatre manifestants tués par les forces de sécurité à Hama (centre), théâtre de manifestations géantes à l'été 2011, ainsi que dans les régions d'Idleb (nord-ouest) et de Deraa (sud). Un cinquième civil a été tué par une balle perdue des forces de sécurité à Daraya, dans la banlieue de Damas, selon l'OSDH, qui a évoqué des défilés "plus importants que les semaines précédentes" dans la quasi-totalité des provinces du pays, en dépit d'un déploiement sécuritaire massif.

En outre, des combats à l'arme lourde ont eu lieu le matin à la frontière avec la Turquie, selon l'OSDH. Pour la journée de jeudi, l'OSDH a fait état de dix morts, dont sept civils. Devant le Conseil de sécurité de l'ONU, Kofi Annan a estimé jeudi que Damas n'avait techniquement pas respecté son plan, mais que le fragile cessez-le-feu était "une chance à saisir", tandis que le chef des Nations unies, Ban Ki-moon, a dit vouloir "envoyer une équipe d'observateurs le plus rapidement possible".

La Syrie a un besoin pressant d'"aide humanitaire massive", a estimé à Oslo le général norvégien Robert Mood, chargé de préparer la mission des observateurs, affirmant qu'un million de Syriens manquaient de nourriture, de couvertures, d'eau. Le projet de résolution qui doit être discuté vendredi au Conseil de sécurité prévoit l'envoi d'une équipe avancée "dès que possible" de "10 à 12 personnes", a expliqué Ahmad Fawzi, porte-parole de Kofi Annan, sans préciser qui seraient ces personnes.

Si le cessez-le-feu se transforme en une "réelle cessation des hostilités (...), alors le Conseil pourrait autoriser une mission complète" de 250 membres, a-t-il ajouté, précisant qu'il pourrait s'agir de troupes déjà présentes dans la région et donc susceptibles d'être déployées "rapidement". Le général Mood s'est rendu la semaine dernière en Syrie pour préparer l'arrivée de l'équipe avancée. Mais contrairement à ce qui avait été annoncé, il ne retournera pas vendredi en Syrie, a précisé Ahmad Fawzi.

Le président français Nicolas Sarkozy, assurant ne pas croire à la "sincérité" de Bachar el-Assad ni au cessez-le-feu, a estimé qu'il fallait "absolument déployer des observateurs", un avis partagé par les ministres des Affaires étrangères du G8. Depuis mars 2011, les violences ont fait plus de 10 000 morts, selon l'OSDH, et poussé des dizaines de milliers de Syriens à fuir vers les pays voisins. La Turquie a commencé à recevoir de l'aide internationale pour les réfugiés sur son territoire et la France a annoncé qu'elle envisageait d'envoyer une aide humanitaire à ceux réfugiés en Jordanie.

Moscou, grand allié de Damas, va déployer "en permanence" des navires de sa flotte près des côtes syriennes, a indiqué l'agence d'État Ria Novosti.

Plus d'articles de : L'actu en Algérie et ailleurs

Commentaires (0) | Réagir ?