Elections de mai : la confiance en tragicomique

Ahmed Ouyahia et Abdelaziz Bouteflika
Ahmed Ouyahia et Abdelaziz Bouteflika

Pourquoi donc ce sont des étrangers qui enquêtent pour une activité "normale" qui ne concerne en premier lieu que la trentaine de millions qui constitue la population algérienne, libre et indépendante ?

Qu’est-ce qu’il faut interpréter comme raison cohérente lorsque des Etats qui exigent un visa d’entrée dans leur pays respectif pour un pays donné mais qui traient avec lui déjà sur des relations commerciales engageant des milliards en monnaies fortes s’ingèrent-ils dans ce même pays pour des affaires qui relèvent de la confiance entre les citoyens et leurs dirigeants ?

C’est ce qui a été décidé par le pouvoir algérien et c’est la question que les citoyens algériens se posent quand ils n’ignorent pas que toutes les affaires que traite l’Etat avec les étrangers sont du seul ressort de ses dirigeants où les décision de souveraineté sont prises, de la plus anodine à celles qui engagent l’essentiel de la garantie nationale, unilatéralement par des groupuscules d’individus qui parlent et agissent de leur chef au nom de l’Algérie.

Un citoyen ordinaire circonspect

Un contribuable qui, la veille, a fait convenablement son travail et son devoir de citoyen obéissant à l’ordre établi, se réveille tôt le matin et écoute à la radio en lisant les informations sur le net, il apprend que le gouvernement reçoit des délégués de l’Union européenne pour enquêter sur les modalités de préparation des prochaines élections législatives. Il se pose beaucoup de questions à la fois. Pourquoi ce ne sont pas des envoyés de l’Onu, de l’Union africaine, de la Ligue internationale des droits de l’homme, tout compte fait, mais surtout pourquoi donc des étrangers qui enquêtent pour une activité "normale" qui ne concerne en premier lieu que la trentaine de millions qui constitue la population algérienne, libre et indépendante ?

Puis, pris de panique, il consulte la Constitution et la loi électorale dans le net pour tenter de comprendre si cette "mesure" est prévue par quelque article dans les textes. Nada. Il appelle des amis dans le mobile et dans le facebook pour essayer d’en savoir plus. Un de ses partenaires dans le réseau social tente de lui expliquer que c’est peut-être à cause de la dette extérieure contractée auprès du FMI qui relève en gros des grands consortiums financiers européens. Il vérifie encore dans la toile mais il se rend compte que l’Algérie est grosso modo quitte avec ce Fonds. Contrairement au Maroc qui n’a pas fait appel aux enquêteurs de l’Europe pour organiser ses dernières consultations législatives.

Le passif de la "main étrangère"

Ensuite il se rappelle que le chef de l’Etat s’est adressé récemment à la nation, alors il repasse le discours enregistré dans youtoube malgré le temps qu’il prend pour être à l’heure au boulot. Bref, le Président n’a pas dit un mot sur ce sujet. Il a parlé du rôle de la jeunesse et de la femme dans les "nouvelles réformes politique" comme si plus de la moitié de la population n’est pas au féminin dans le pays et la même marge n’a pas vingt-cinq ans. Il a insisté sur le devoir d’aller aux urnes pour plus de démocratie et pour le maximum de choix susceptibles de développement. Le citoyen remarque que, d’habitude, comme par réflexe, le chef de l’Etat ne résiste pas à cette idée récurrente que les étrangers s’immiscent dans notre politique pour contrecarrer nos efforts d’émancipation mais dans le discours autour de la convocation du corps électoral, il n’en fait pas allusion. A contrario, ses services laissent le soin à la presse inféodée au régime de parler de ces visiteurs incongrus invités dans les palaces aux frais du Trésor public, chargés de remettre un rapport détaillé à propos de leur séjour, qui ne répond à aucune logique institutionnelle légitime, à l’Administration de Bruxelles. Pour en faire quoi ? C’est sur cette interrogation que le potentiel électeur éteint son micro pour aller vite capter un taxi qui l’emmènerait à l’heure dans son bureau.

Un Algérien qui se respecte ne monte pas à côté du "taxieur" sans s’empêcher de lui faire la conversation. Ça tombait bien parce qu’il s’agit d’un ancien chauffeur du ministère de l’Intérieur qui connaît les directeurs de ce département de l’Etat comme un chauffeur de presse qui a l’expérience des journalistes à la recherche de scoops qu’il emmène dans les reportages et les couvertures ou celui des cadres supérieurs de Sonatrach les promenant vers les aéroports internationaux pour des missions auprès des fournisseurs mondiaux d’intrants, les uns et les autres habitués à partager le gros de leur conscience avec lui – sur ce point si vous voulez faire une sérieuse biographie sur un personnage ne vous avisez surtout pas d’oublier son vieux chauffeur.

Des conditions de vote tragicomique

Entré dans le sujet qui préoccupe le brave concitoyen, il lui dit de but en blanc : "J’ai conduis des directeurs importants qui connaissent les département français dans les moindres détails mais qui ne savent absolument rien de la manière dont évoluent les wilayas du pays ; ils connaissent les walis et les chefs de daïra, les responsables des grandes entreprises publiques ou privées, pour le reste, sur le plan des activités politiques surtout, ils suivent avec minutie les débats émanant des personnalités partisanes françaises, il leur arrive de donner même leur point de vue sur un problème ou un autre apostrophant le vécu par les ressortissants français en terre française ; ils sont du FLN, du RND ou patentés de la mosquée mais ils s’en fichent éperdument de ce qui se passe dans les réunions au sein des kasmas et des fédérations parce qu’ils savent qu’il s’y trouve des chargés de mission pour agir au pied de la lettre selon des directives qui confortent leur pouvoir administratif et leur statut social. Maintenant que des étrangers viennent enquêter, ça fait ouvertement pour faire bailler les portes de l’Organisation mondiale du commerce en attendant l’accès définitif de l’Algérie afin de liquider pour de bon ce qui reste de valable dans le pays, sinon en matière de surveillance internationale, la CIA et sa soeur électronique la NSA, leurs alliés du Sdec, du MI6 et du Mossad, ont partout des agents bien rémunérés dans notre pauvre administration, même dans les écoles, les mosquées et les clubs de foot."

Le contribuable fortement secoué par les assertions du taximan paye la course en s’estimant quitte pour le casse-croûte frites qu’il sautera à midi, se surprend en descendant pour courir rejoindre son bureau en train de deviner qui pouvait être l’espion dans son service.

En tout cas, une chose était acquise et arrêtée dans son esprit, il n’ira pas au vote en mai prochain. Non pas spécialement de ce qu’il venait d’entendre dans le taxi mais parce qu’il ne participera pas dans un tragicomique national où un gouvernement organisant des élections veut s’accréditer la confiance des populations en leur prouvant, par l’invitation de l’argument étranger, qu’il n’est pas digne de confiance.

Nadir Bacha

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Commentaires (6) | Réagir ?

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braîdji jabess

salam à tous, j'aimerais pour mon premier commentaire pousser un grand coup de gueule par apport à vous journalistes du journal le matin mais aussi à la majorité des commentaires des internautes. depuis le temps que je lis vos articles et les commentaires qui suivent, je n'ai lu que du régionalisme, du blasphème, et j'en passe. Pourquoi toute cette haine gratuite? pourquoi ces critiques sans cesse envers le pouvoir (je ne le porte pas dans mon coeur), pourquoi cette haine envers les Arabes? Et même parfois envers l'islam? si je peux me permettre vous êtes dans le faux le plus complet. Le plus grand problème de notre chère Algérie c'est je pense le peuple lui même. Certes le pouvoir a une responsabilité, mais pas sur tout par exemple : je vais un petit peu caricaturer mais l'Algérien est trop opportuniste, il faut se poser la question suivante ce gouvernement là s'il venait à proposer un portefeuilles à n'importe qui de nous je pense qu'on hésiterait pas ? Vous journalistes ou nous internautes on serait comme ces gens qui nous gouvernent ; on deviendrait tous porte-parole de Boutef. Alors arrêtons de juger sans cesse les autres, jugeons nous déjà.

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Notproud

@Nadia Ramane

Votre commentaire est digne d'une bande dessinée, je pense que vous n'avez jamais vécu en Algérie et que vous n' êtes au courant de rien du tout. Votre écrit est un courant d'air glacial qui refroidit que des esprits rétrogrades comme le vôtre. Parler SVP en connaissance de cause et pas depuis un HLM de Vaulx en Velin.

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laid baiid

Ces observateurs européens choisis savent biens que c'est de la poudre aux yeux... Du moments qu'ils seront grâcement payés... vu que leur solde sera trop correcte par rapport à nos richissimes députés..

Il y a eu des observateurs venu dans les années 1990, on a jamais vu leur rapport ! Et le RND avait battu tous les records de fraude et même que son chef (Ben hamouda) a été assassiné pour laisser place!!!!!!!

L'OUA ou la Ligue arabe n'ont pas de crédibilité...

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