Rapports internationaux 2008/2009 sur l’Algérie : Résultats mitigés, corruption élevée

Rapports internationaux 2008/2009 sur l’Algérie : Résultats mitigés, corruption élevée

« Il vaut mieux que l’homme exerce son despotisme sur son compte en banque personnel que sur celui de ses concitoyens » John Maynard KEYNES

A la lumière des différents scandales touchant notamment certains secteurs financiers du secteur privé et la majorité du secteur financier public , du scandale des dépenses faramineuses du Programme National Agricole (PNDA) qui n’a pas encore dévoilé tous ses secrets , de l ‘enveloppe de l’autoroute Est/Ouest dont le projet initial était estimé à 7 milliards de dollars pour passer à 12 selon l’officiel et à plus de 15 milliards de dollars selon d’autres estimations, du récent scandale de Sonatrach qui procure 98% des recettes de devises au pays et avec l’épuisement de cette ressource éphémère avant 2025/2030 , posant une question de sécurité nationale et de l’urgence de la démocratisation de sa gestion et d’une manière générale de l’impact mitigé de la dépense publique entre 2004/2009 d’environ 200 milliards de dollars , El Khabar juge utile de republier l’importante contribution du docteur Abderrahmane MEBTOUL Economiste, Expert international relative au dernier rapport Transparency International 17 novembre 2009, contribution parue dans ces mêmes colonnes le 18 novembre 2009 et largement reproduite au niveau international

1.-Rapport de Transparency International 2009 : l’Algérie rétrogradé en 2009 de vingt places par rapport à 2008

L’organisation internationale Transparency International dans son indice de perceptions de la corruption donnant chaque année une estimation par pays assez fidèle de l’étendue du phénomène de la corruption vient de faire paraître le 17 novembre 2009 son rapport annuel 2009 classant , ironie de l’histoire l’Algérie et l’Egypte sur un même pied d’égalité comme les pays connaissant un haut degré de corruption avec un score déplorable de 2,8 sur 10 et étant tous les deux à la 111ème place sur 180 pays . L’on sait que les auteurs de l’IPC considèrent qu’une note inférieure à 3 signifie l’existence d’un « haut niveau de corruption au sein des institutions de l’Etat et que des affaires saines induisant un développement durable ne peuvent avoir lieu, cette corruption favorisant surtout les activités spéculatives. Si pour l’Egypte , il n’y a pas de changement notable par rapport à 2008, (115 rang sur 180) et gagnant même 4 places , par rapport à 2008, l'Algérie chute de 3,2 à 2,8 sur 10 et de la 92ème place en 2008 à la 111ème en 2009,perdant 20 places la ramenant à l’année 2005 où elle avait obtenu une note de 2,8 sur 10 contre une note de 2,7 pour 2004. Ce rapport, contrairement aux déclarations tendancieuses et contradictoires d’un expert de la banque mondiale récemment à Alger qui affirmait une transparence dans la gestion des grands projets, les rapports officiels 2007/2009 de la banque mondiale concernant les infrastructures en ma possession , notent la même tendance : mauvaise gestion et surcoûts.
Pour les autres pays du Maghreb ,la Tunisie est le pays le plus transparent classée 65 dans le monde bien qu’ayant perdu 3 places ( 62ème en 2008) , 6 ème en Afrique et 7ème dans le monde arabe ,le Maroc 89ème position, la Libye 130ème avec la Mauritanie. Pour les pays arabes , il y a une nette amélioration puisque le Qatar arrive à la 22ème position,Bahrein 51ème position , la Jordanie 55ème position, l’Arabie Saoudite 63ème positon le Koweit arrive à la 66ème positon exepté pour la Syrie 126ème position . Pour l’Afrique, Le Botswana 37 ème positon, le Cap-Vert 456ème position, Seychelles 54ème position, l’Afrique du Sud 55ème position et la Namibie 56ème position. Les notes les plus élevés sont pour la Nouvelle Zélande 1èe position avec une note de 9,4, suivi du Danemark 2ème position avec 9,3, de Singapour et la Suède 3ème position avec une note de 9,2. Les Etats Unis arrivent à 19ème place, la Grande Bretagne 17ème place et la France 24ème place. Parmi les moins transparent on trouve l’Irak 176ème, le soudan 177ème, la Birmanie 178 ème, l’Afghanistan 179ème et la Somalie 180 place. Mais ‘il ya des pays corrompus il y a forcément des pays plus corrupteurs que d’autres. Du côté des corrupteurs, l’organisation réalisant un « indice de corruption » dans les 22 principaux pays exportateurs auprès de 3 000 cadres dirigeants, l’enquête montre que le versement de pots-de-vin à l’étranger demeure une pratique extrêmement répandue, en particulier dans les entreprises des puissances émergentes comme la Russie, l’Inde et la Chine.
« Un certain nombre d'entreprises des grands pays exportateurs continuent de recourir à la corruption pour décrocher des marchés à l'étranger bien qu'ils aient conscience que cela porte atteinte à la réputation des entreprises », selon une enquête réalisée pour 2008 par Transparency International. D'après l'indice de corruption des pays exportateurs (ICPE) établi par cette ONG, la Russie est avec une note de 5,9 sur 10 le pays où les entreprises sont le plus susceptibles de verser des dessous-de-table à l'étranger suivi de la Chine avec une note de 6,5 et se place entre la Russie et le Mexique (6,6). L'Inde, autre puissance émergente, est aussi dans le quatuor des pays exportateurs qui usent le plus des pots-de-vin pour s'assurer un marché, avec une note de 6,8. Parmi ceux qui ont le moins recours à la corruption à l'étranger figurent en tête la Belgique et le Canada (8,8 tous les deux), les Pays-Bas et la Suisse (8,7). La France occupe le 9e rang (8,1), avec Singapour et les Etats-Unis.

2- Urgence d’une moralisation de la gestion de la Cité

Le grand sociologue Ibn Khaldoun a analysé parfaitement les cycles de décadence des sociétés par rapport à cette situation parlant de société anomique durant le cycle descendant et Aristote que des dirigeants de la Cité doivent avoir une moralité sans faille. Dans ce cas, l’Algérie doit-elle on continuer dans l’unique dépense monétaire sans se préoccuper des impacts à moyen et long terme d’autant plus que les deux fondamentaux du développement du XXIèe siècle reposent sur la bonne gouvernance et la valorisation du savoir, les infrastructures n’étant qu’un moyen de favoriser l’entreprise seule créatrice de richesses?
Même si l’on doit prendre avec précaution certains rapports, le constat est amer : tous les rapports internationaux sans exception entre 2008/2009 classent l’Algérie à un niveau qui ne correspond pas à ses potentialités alors que certains organismes d’information nationaux se complaisent dans des déclarations et chiffres fantaisistes (l’Algérie aurait un des taux de croissance (plus de 10% et un taux de chômage moins de 10,5%, qui feraient pâlir les pays développés et émergents en crise), données qui ne font que discréditer l’image de l’Algérie au niveau international. . Doit-on ignorer ces rapports inquiétants où l‘Algérie est rétrogradée dans la majorité des rapports internationaux ? L’ analyse du classement de l’Université de Shanghai 2009 ( The Academic Ranking of World Universities) donne pour l’Algérie, les universités ayant obtenu les meilleurs classements sur 6000 des universités en compétition au niveau mondial et au delà c’est l’élimination puisque hors compétition : a) Universités classées -l’université de Sidi Bel Abbes la 4 116e place- -Université de Tlemcen, la 4 143e place -Université de Batna 5 548e place -b) hors classement – élimination de la sélection-l’université de Constantine, 6766e place à travers le monde ; -l’université des sciences et de la technologie Houari- Boumediene à la 7008e place ;-l’université Abdelhamid- Ben Badis de Mostaganem 7205e ; -l’université d’Alger à la 7849e ; l’Ecole nationale de l’informatique 8960e et l’université Mohamed-Boudiaf d’Oran à la 9004e. N’est –il pas donc démagogique de créer une université par wilaya, et utopique, de vouloir faire revenir les émigrés lorsque qu’on dévalorise ceux qui sont restés sur place. Et où sont donc les différents centres de recherche, les universités de Annaba, d’Oran Es Sénia , l’Ecole nationale d’administration, l’Ecole nationale polytechnique , l’Institut algérien du pétrole, c ayant pourtant formé une génération de brillants cadres et ingénieurs qui n’avaient rien à envier aux grandes écoles occidentales ?
Autre rapport négatif, l’organisme international, le PNUD, dans son rapport final du 04 octobre 2009 après les tests de cohérence, a rétrogradé l’Algérie de la 100ème place en 2008 à la 104 place en 2009. Celui du rapport du FMI du 02 octobre 2009 sur les perspectives économiques mondiales , inquiétant pour l’Algérie remettant en cause les prévisions gouvernementales de création de trois millions d’emplois entre 2009/2013,nécessitant un taux de croissance de 6/7% sur cinq années , le FMI ayant prévu un taux de croissance de 2,1% en 2009 et 3,7% en 2010 en mettant l’accent sur la non proportionnalité entre les dépenses publiques 200 milliards de dollars entre 2004/2009, tirées essentiellement par les hydrocarbures et les impacts économiques et sociaux , une moyenne 2004/2009 inférieure de taux de croissance à 3% alors que ces dépenses auraient du occasionner une croissance supérieure à 7% avec ce paradoxe, le produit intérieur brut PIB moyenne 2008/2009, est presque l’équivalent des réserves de change (144 milliards de dollars) dues à des facteurs exogènes et que le taux de croissance de 5/6% hors hydrocarbures souvent invoqué est lui même tiré à plus de 80% par l’irrigation de al rente des hydrocarbures ne laissant aux véritables entreprises moins de 20% de création de valeur véritable. Cela démontre clairement un gaspillage croissant des ressources financières provenant des hydrocarbures épuisables à terme (1).
Un autre rapport , celui du Doing Business 2009 où l’Algérie figure à la 15ème place sur les 19 pays de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord, juste avant la Syrie , l'Iran, l'Irak et Djibouti avec une nette détérioration du climat des affaires . Egalement le dernier rapport du Forum Euro-méditerranéen des Instituts des Sciences économiques (Femise) sur le partenariat euro-méditerranéen dans son rapport du 02 novembre 2009,qui signale que l’ Algérie ayant longtemps suivi un modèle de croissance à accumulation extensive, subissant les effets du manque de diversification de sa structure productive qui aurait pu assurer une productivité plus élevée et à diminuer les retombées de la crise sur l’économie réelle, les exportations d’hydrocarbures représentant, la quasi-totalité des exportations totales» . L’indicateur de performance logistique (LPI) de l’Algérie place le pays en 140ème place sur 150 pays, montrant, une déficience en matière de réduction de coûts et de barrières administratives et une mauvaise qualité fonctionnelle, analyse confirmée par le rapport de la banque mondiale sur l’évaluation des effets de la dépense publique en Algérie réalisée sous la direction de Theodore O. Ahlers ( rapport n°36270 DZ 15 août 2007 2 volumes), remis aux autorités algériennes montrant, à partir d’enquêtes précises sur le terrain clairement la faible efficacité de la dépense publique du programme de soutien à la relance économique.
Si une personne est innocente jusqu’à preuve du contraire , posant la question de l’indépendance réelle de la justice,( voir mon intervention à la télévision internationale France24 le 15 janvier 2010 concernant le cas de Sonatrach) , c’est que face à cette situation de cette corruption qui s’est socialisée, facteur de démobilisation où les discours moralisateurs des responsables ne portent plus parce disqualifiés, force est de constater que ce n’est pas une question de lois ou de commissions que contredisent quotidiennement les pratiques sociales mais de la mise en place de mécanismes de régulation transparents, avec des responsables ayant une moralité sans faille ( la majorité des cadres dans tous les secteurs sont honnêtes mais bon nombre marginalisés parce ne gravitant pas dans els relations de clientèles) et d’institutions crédibles qui doivent fonctionner normalement sans interférences politiques et administratives. Or, la bureaucratisation produit de la faiblesse et de la crédibilité de l’Etat de droit et donc des institutions envahit toutes les sphères économiques et sociales produisant d’ailleurs la sphère informelle, la dévalorisation du savoir au profit des rentes spéculatives constituant un frein aux investissements porteurs de croissance. Doit t-on rester dans l’autosatisfaction négative et suicidaire pour le pays source de névrose collective ? La mentalité bureaucratique des années 1970 de certains responsables est de ne pas cibler l’essentiel mais pour détourner les vrais problèmes est de vouloir faire et refaire des lois,avec une instabilité juridique perpétuelle montrant la neutralisation des rapports de force des acteurs politiques, économiques et sociaux (couple contradictoire réformateurs minoritaires /rentiers dominants ) et donc le manque de cohérence et de visibilité , alors qu’il s’agit de s’attaquer au fonctionnement de la société par la mise en place de mécanismes de régulation transparents en ce monde impitoyable, la mondialisation irréversible, où toute Nation qui n’avance pas recule.

Docteur Abderrahmane MEBTOUL
Expert International Professeur d’Université en management stratégique

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Commentaires (5) | Réagir ?

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Ghanima

Ne nous voilons pas la face, les plus grands corrompus et corrupteurs de ce pays, ce sont aussi et avant tout, les patrons des banques publiques et des caisses du Trésor. Ce sont eux qui donnent l'aval et qui ouvrent la chasse à la corruption et c'est par eux que bien souvent le scandale arrive. Il n'y a aucun contrôle des dépenses publiques, l'argent du peuple est dilapidé sans scrupules ou carrément jeté par la fenêtre. Qui ne se souvient du big boss en fuite de la BEA de Bouzaréah et Koléa, des Karamane de la BNA, des patrons de la défunte Union Bank, BCIA etc... ? Vous vous rendez compte, ils ont accordé un mégacrédit de complaisance de 3. 000 milliards à TONIC EMBALAGES pour fabriquer des gobelets à café en papier, en plus il n'est même pas arrivé à demarrer son usine de Bou-Ismail. Ce sont généralement l'incompétence, la complicité et la gabégie jusqu'à l'absence totale de patriotisme et d'intégrité morale de ces gens-là qui ont fait que nous en sommes là. Le peuple disloqué et appauvri est réduit à trainer ses espadrilles et à attendre Godot ou la charité de Ould Abbas. Pour l'amadouer et le faire patienter encore plus ils lui balancent sadiquement cette autre brimade :" Arfaâ Rassek Ya Boa ".

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Kader

Il suffit d'être salarié, retraité, un petit commerçant de lait en algèrie pour se rendre compte que la corruption bat son plein nuit et jour chez nous. Sonatrach pis encore!! Socièté mère de tout le peuple algérien mais gérée par des faussaires au plus haut niveau, ceux-là qui marginalisent les hommes intégres, les nationalistes. Bureaucratie à tous les niveaux, Daira, APC, wilaya et ministère! Il était une fois la révolution, une révolution qui nous a arraché les fidèles et grands hommes nationaux et intégres, naifs ils croyaient nous laisser entre de bonnes mains, eh oui, malheureusement voilà où nous sommes. Cheikh nordine, Allah Errahmou, dans une pièce de comidie, a dit: C'est l'homme qui vote les Lois c'est lui qui les piétine!!

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