L'EUROPE A L'ÉCOLE DE L'AFRIQUE DU NORD ET DE L'ANDALOUSIE

Les deux régions, Afrique du nord et Andalousie, ont connu sous l’autorité almohade (1250-1237) un haut niveau d’organisation. Sur le plan politique, des gouvernements furent installés un peu partout :Tunis, Bédjaia, Tlemcen, Fès, Andalousie, etc. Au plan économique, une gestion des affaires et des finances, hautement efficace, procura à l’État almohade, la richesse et la stabilité. Le commerce se développa entre les deux régions ainsi qu’à travers les ports de Bougie, Constantine, Oran, Tlemcen, Ceuta et les ports européens (Venise, Pise,, Gènes et Marseille).Cette situation raffermit la puissance de l’empire, augmenta ses richesses et donna à L’État almohade un prestige éclatant et considérable ainsi qu’une stabilité fructueuse. Cette situation allait permettre de mettre en place un environnement ou un système donnant lieu à un développement intellectuel phénoménal, une évolution qui va avoir comme conséquence un transfert de la culture en Europe à travers la Sicile et l’Espagne. La diffusion va se faire par le biais de la traduction. Les traductions européennes touchaient de nombreux domaines :la littérature et l’art, la philosophie, la religion, l’alchimie, l’astronomie, la géologie, la botanique, la zoologie, la médecine, les mathématiques et la nautique. Les traductions se faisaient de l’arabe en langue romane et en Latine. Dans ce mouvement, des noms de traducteurs vont s’imposer, parmi lesquels, Gérard de Crémone, Platon de Tivoli,Léonard de Pise alias fibonnacci, Michel L’allemand, Raymond Lulle, Herman contractus, Maimonide. Certains travaillaient pour leur compte personnel, d’autres autour des cercles de traduction de Tolède ou de sicile. Ce foisonnement culturel, produit de la fabuleuse ouverture de la société, bâtie par les Almohades, se développa dans tout l’empire: Afrique du nord (Marrakech, Tunis, Bougie, Tlemcen...) et Andalousie. Cette dernière fût un centre de production intellectuelle remarquable. Les auteurs andalous étaient de coyances et d’ethnies diverses: chrétiens, musulmans, juifs, berbères, arabes, espagnols et autres. Dans ce regroupement, l’élément humain berbère était important. Et pour cause l’Andalousie a connu différentes vagues de berbérisation: première vague, au 7ème siècle, les conquérants étaient un mélange d’Arabes et de Berbères. Ensuite trois mouvements humains de composante berbère, en provenance de l’Afrique du nord, vont élargir cette berbérisation :en premier, la vague berbère-zénète qui a mis fin au dernier émirat arabe (Cordoue), en deuxième lieu, la conquête almoravide, enfin ,la conquête almohade. Cela dit, la diversité des groupements humains à la base de la créativité culturelle et intellectuelle, montre un haut niveau de tolérance et d’ouverture des autorité almohades.Une ouverture aussi par rapport aux thèmes abordés.L’exemple le plus fabuleux de cette ouverture d’esprit des émirs qui aimaient faire venir dans leurs cours des érudits, se concrétisa dans la relation entre Yacoub Ben Youcef dit El Mansour,(1184-1199) et le philosophe Ibn-Rouchd (Averroes).Lors de leur première entrevue à Marrakech, El Mansour, qui sera à la base de l’impulsion culturelle et intellectuelle dans l’empire, étonne Averroes par son érudition philosophique, étonnement d’autant plus grand qu’on vivait à une époque ou les pouvoirs se méfiaient des philosophes car ces derniers étaient soupçonnés de vouloir remettre en question les dogmes, les traditions et les principes, tous ossature de l’ordre social. Lors de cette rencontre, El Mansour demande à ce dernier de réaliser une tâche marquante pour l’histoire, à savoir ni plus ni moins que la traduction d’Aristote, le philosophe grec. La réalisation de ce travail par Ibn-Rouchd, sur encouragement de l’émir va avoir un impact phénoménal sur l’évolution de la culture en Europe, d’autant plus qu’elle s’inscrit dans une situation de transfert de la culture vers l’Europe, de grande envergure.De fait, Le soleil d’Afrique du nord va illuminer l’Europe.Cette décision émane d’ El mansour.Cela mérite d’être soulignée car les historiens, dans leur étude de ce mouvement de transfert, se concentrent le plus souvent sur les auteurs, mais on oublie que derrière tout ce foisonnement, il y’a tout un cadre humain et institutionnel qui encourage, impulse et stimule. Derrière le formidable progrès américain, il y’a un système politique, des institutions qui soutiennent le mouvement vers l’avant. Derrière,l’évolution du Japon féodal au 18ème siècle (ère du Meiji), il y’eût bien sûr, d’abord, le rôle de l’empereur, mais aussi, ensuite, surtout la mise en place d’un système démocratique qui allait soutenir le formidable progrès du Japon et en faire une puissance mondiale. De fait, il est évident que le développement extraordinaire de la culture en Afrique du nord et en Andalousie n’aurait pu se faire sans la mise en place, par l’État almohade, d’un cadre institutionnel approprié, dynamique et stimulant, donnant lieu à ce mouvement et à celui de la traduction qui va faire connaître Ibn-Rouchd et irriguer l’Europe, région déjà initiée au génie berbère par le biais de Saint-augustin. En plus, ces deux auteurs font connaître à travers leurs œuvres, les hommes, qui aujourd’hui, sont considérés comme étant les deux plus grands philosophes de l’Occident. Il s’agit, d’un côté, de Platon, le philosophe grec, mentionné dans les livres de Saint-augustin, et de l’autre, d’Aristote, philosophe grec aussi, dont les idées ont été commentées par Ibn-Rouchd.En plus de cet apport, ces deux auteurs formeront aussi par leurs idées l’ossature de la pensée philosophique occidentale. En effet, les idées d’Averroes seront à la base des discussions sur la relation entre la science et la foi.S’agissant de Saint-augustin, sa pensée donne naissance à un ensemble de thèses philosophiques que l’on rassemble sous la dénomination d''Augustinisme''.Les débats suscités par l’Augustinisme ont largement contribué aux conceptions modernes de la liberté. Au 12ème siècle, l’augustinisme est la doctrine générale enseignée, et ce, jusqu’à l’introduction, d’Aristote en Europe, à travers les ''commentaires''d’Averroes. C'est la base de l’enseignement philosophique. Ainsi, si Saint-Augustin fut connu dans le cadre de l’empire romain, Averroes le fut dans celui de l’empire nord-africain. Sa connaissance par l’Europe ainsi que ses œuvres , notamment sur Aristote, l’ont été grâce à l’organisation politique et institutionelle mise en place par El Mansour , un cadre ayant permis la créativité culturelle et intellectuelle et un système de transfert de cette culture vers l’Europe, notamment par le biais de la traduction.Ce cadre, à l’origine de la formidable évolution de l’Europe trouve sa source dans la grandeur de l’État almohade, lui-même trouvant son origine dans le fondateur de la dynastie almohade.Il s’agit de Abdelmoumen, statège et organisateur hors-pair, né à Tagrart, un village proche de Tlemcen, c'est-à-dire dans l’espace algérien, comme d’ailleurs Saint-augustin qui est né à Souk-Ahras (Thagaste).La formidable aventure européenne trouve sa source en ces deux hommes, ayant comme point commun une origine berbère et un caractère berbère. Aujourd’hui on dirait un caractère algérien. Ainsi si la culture nord-africaine et andalouse a illuminé l’Europe à partir du 12ème siècle, aujourd’hui, étant donné la division de l’Afrique du nord en trois pays, il est normal de dire que, grâce à Abdelmoumen et Saint-Augustin, le soleil d’Algérie brille sur l’Europe. L’Algérie organise chaque année une journée de savoir (Youm el îlm) en l’honneur du cheick Ben badis.Ne devrait-elle pas organiser une journée en l’honneur de Saint-augustin, un de ses fils les plus illustres, pour sa contribution grandiose au développement de la culture mondiale?

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Madih

Krimo. Je commence donc par le premier que tu as cité bêtement mais qui se retourne fatalement contre ton ignorance et qui te dévoile dans toute ta nudité de médiocre menteur et d‘amateur d‘histoire en petit « h», à savoir Saint Augustin. A suivre en 4 parties.

Partie 01. Saint Augustin. Pour André Chouraqui, nul doute que les Berbères parlèrent encore plusieurs siècles après la chute de Carthage (-813/-146 av. è. c.), le punique. Il rapporte que d’après Gsell, les autochtones du Maghreb, « par leur langue et par leurs mœurs, étaient devenus des Phéniciens ». (…) Chouraqui précise que les documents puniques les plus anciens connus, datent des IV -II° siècles avant è. c, et proviennent de Malte, de Sicile, de Sardaigne, mais il poursuit ainsi : « Saint Augustin, dans ses sermons, recourt volontiers au punique, manifestement familier à ses auditeurs, pour expliquer les termes hébraïques ou araméens de l’Ecriture. M. Simon verse au débat une nouvelle précision. Saint Augustin signale que les Circoncellions appelaient les gourdins dont ils se servaient pour convertir de force les populations au christianisme du nom d’Israël. Les redoutables sectaires appelaient ainsi les armes de leur propagande d’un nom qui signifie en hébreu « Dieu combat ». De ce détail, M. Simon induit que probablement : « Les Circoncellions et avec eux vraisemblablement de larges masses de la population rurale lisaient et comprenaient la Bible dans sa langue originelle. En cela sans doute réside l’essentiel : l’étroite parenté de l’hébreu et du punique devait, dès les origines, assurer, inévitablement, une profonde interpénétration des Juifs et des Berbères dans le Maghreb. Saint Jérôme, dont l’autorité à elle seule pourrait en la matière emporter la conviction, suivi par Priscien, insiste déjà sur les similitudes des deux langues sœurs. La science moderne confirme l’antique tradition en affirmant l’étroite parenté du punique et de l’hébreu. Ces similitudes, sur lesquelles nul ne saurait trop insister, expliquent l’extraordinaire diffusion d’idées juives en Afrique du Nord préparant la voie au christianisme, puis à l’Islam. " Pour revenir à la littérature chrétienne antérieure, un texte de Saint Augustin est particulièrement révélateur : « Demandez à nos paysans ce qu’ils sont ; ils répondent : « Des Chenani. » Dans leur patois corrompu, une lettre est tombée. Il faut entendre des Cananéens. " André Chouraqui poursuit ainsi, « Tels sont les divers échos de cette antique tradition. Son importance est considérable pour notre objet puisqu’elle fait des Berbères des frères de race, de langue, et nous le verrons, de religion avec les Juifs. Rapportée à la fois par des Juifs, des Chrétiens et des Musulmans, elle ne pouvait être purement et simplement rejetée. (…) La vérité de la légende c’est que, dès le VIII° siècle avant notre ère, l’Afrique du Nord subit ses premières influences sémitiques aux débuts de la colonisation phénicienne. " Asuivre

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Madih

Partie 02. Ibn Khaldoun, dans les limites des connaissances récoltées propre à son époque mais dont les découvertes archéologiques et anthropologiques modernes contredisent, a néanmoins parlé des berbères et des juifs. En effet, il constitue la source principale de connaissance de l’origine des Berbères ; après avoir décrit une population diverse, composée de nomades éleveurs de moutons et de bœufs, parfois de chameaux, parmi ces nomades « la haute classe parcourt le pays la lance à la main ; elle s’occupe également à multiplier les troupeaux et à dévaliser les voyageurs.. Après avoir rapporté toutes les légendes qui circulent à leur propos, il tranche ainsi : (…) « Maintenant le fait réel, fait qui nous dispense de toute hypothèse, est ceci : les Berbères sont les enfants de Canaan fils de Cham, fils de Noé…ils reçurent leur judaïsme de leurs puissants voisins, les Israélites de Syrie.. Ainsi que nous l’avons déjà énoncé en traitant des grandes divisions de l’espèce humaine. Leur aïeul se nommait Mazigh, leurs frères étaient les Gergéséens (Agrikech) ; les Philistins, enfants de Casluhim, fils de Misraim, fils de Cham, leur était apparentés. Le roi chez eux, portait le titre de Goliath (Djalout en arabe et Aghelid en Berbère). Il y eut en Syrie, entre les Philistins et les Israélites, des guerres rapportées par l’histoire, et pendant lesquelles les descendants de Canaan et les Gergéséens soutinrent les Philistins contre les enfants d’Israël. Cette dernière circonstance aura probablement induit en erreur celui qui a fait de Goliath un Berbère, alors qu’il faisait partie des Philistins, apparentés aux Berbères. On ne doit admettre aucune autre opinion que la nôtre ; elle est la seule qui soit vraie et de laquelle on ne peut s’écarter. " Deux groupes ethniques selon Ibn Khaldoun : Toujours selon Jean Servier, Ibn Khaldoun propose une division ethnique des Berbères en - Botr de qui descendraient les At Betroun, une confédération de la Grande Kabylie disparue après la répression de la révolte de 1871, - Branès de qui descendraient les Zénètes nomades puis sédentarisés dans les Aurès avec les Beni Snous à la frontière algéro-marocaine, au sud de Tlemcen.

Les deux grands peuples qui habitaient autrefois les Aurès auraient disparu : les Djarawa et les Harawa, dont il ne resterait que des monuments mégalithes près de Batna. On sait que les tribus juives ou judaisées étaient issues des Branès ou Baranès sédentarisées, dont les Djarawa sont une branche essentielle à laquelle appartenait la Kahéna, reine juive berbère qui opposa une résistance farouche aux conquérants arabes. « Les autres tribus juives étaient les Nefouça, Berbères de l’Ifrikya, Les Fendelaoua, les Mediouna, les Behlouda, les Ghratha et les Fazaz, Berbères du Maghreb el-Akça. On sait que c’est chez les Botr nomades que le prosélytisme juif eut le plus grand succès. Il existait des tribus entièrement juives, et des poches ou des clans juifs à l’intérieur d’autres tribus. A travers les patronymes juifs d’Afrique du Nord parfois déformés ou francisés, on retrouve encore aujourd’hui le nom de leur tribu d’origine (Médioni, Bénichou pour Aït Ichou, Darmon pour Djarmen..) Asuivre

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