MUHAND : Scandalisé je le suis, meurtri que les lâches d'hier souillent le sang des martyrs je le suis aussi. Ma rage est tellement grande que si j'avais les moyens de faire griller sur des braises ces voyous du système, je le jure que je les mangerais, avec dégout car ils puent, mais je le ferais pour être sur qu'ils ne nuiront plus jamais. Débaptiser une école, quelle honte et que c’est vil et lâche ! Non il faut qu’on arrête de juste dénoncer, il faut agir, agir vite par tous les moyens pour que cesse cette provocation, car il s’agit bien d’une provocation. Il faut que la population de Guelma se mobilise pour laver l’affront, rebaptiser toutes les écoles qui ne portent pas des noms de chouhadas, mais aussi toutes les routes, tous les quartiers, places, tous les chemins, impasses, juste pour dire à ces gueux qui nous gouvernent que nous sommes là bien vivant. S’il faut prendre les rames pour les chasser du pouvoir, il faut le faire, aucune démocratie n’a été donnée au peuple pacifiquement, elles (les démocraties) ont toutes été acquises par la force, au prix de bien des sacrifices. Nous n’aurions rien inventé si demain on pendait haut et court le président et sa cour, ce ne sera que rendre justice à nos parents morts pour l’indépendance de ce pays, se taire et ne rien faire c’est tuer une deuxième fois nos valeureux chouhadas. Cher frère Rahabi, je partage ta peine et je pleure. Je serais le premier à marcher sur El Mouradia si….

ABDELAZIZ RAHABI : Mon cher Muhand . Je vous remercie de votre solidarité et vous exprime toute ma reconnaissance .Tout comme vous et comme beaucoup d’algériens et d’algériennes j’estime que le pays ne peut pas avancer sous une chape de plomb qui nous interdit de réagir, de nous exprimer de dire nos joies et nos tristesses .En somme le peuple se déshumanise faute d’avoir les espaces nécessaires pour porter ses revendications. Les gens de Guelma ne sont pas différents du reste de l’Algérie ils subissent les mêmes pressions, les mêmes craintes et les mêmes menaces .Merci de me donner l’occasion de leur dire réagir et de protester contre une atteinte à la mémoire des chouhades qui dure depuis 1964 : La débaptisation de TOUTES les inscriptions tombales du cimetière des Chouhadas de Guelma sous le prétexte fallacieux - à l’époque du slogan vertueux - mais malheureusement perverti : un seul héros : le peuple. Dans la réalité ils l’ont fait parce qu’ils se sont rendus compte que trois 3 rangées de 15 de chahid portaient les même nom : Meddour et Oumeddour (cette famille est constituée de deux branches des Ath Meddour : les Mouhoub et les Chorfa ) . Elles comptent une centaine de chahids du 8 mai 1945 à Juillet 1962 . est-il dû, à votre avis, au fait que le peuple Algérien est opposé à ce projet, ou bien parce que les leaders de ce mouvement ne sont pas à la hauteur ou peut être pour les deux raisons à la fois. Merci de m'eclairer.

BENYAMINA : Maali El Wazir, si ce que vous dites est vrai, pourquoi donc l'Organisation Nationale des Enfants de Chouhada et l'Organisation Nationale des Moudjahidine ne vous ont-elles pas soutenu ? Il s'agit peut étre d'une affaire comme celles de Rabah Noel et de Salah Bouakouir, qui seraient selon l'ONM, de faux Moudjahidine. Je m'excuse pour ma franchise et j'espère que je ne serai pas censuré ?

ABDELAZIZ RAHABI : A Benyamina , Vous avez tout le droit de poser cette question et ceux qui ont débaptisé le collège cherchaient peut être à provoquer ce type de réaction. Je suis heureux de voir que votre question m’a été soumise pour y répondre : Je n’appartiens pas à la famille de faussaires et c’est aussi à ce titre que j’ai rendu publique cette violation de sa mémoire .Les indications historiques sur la famille de mon père sont portées dans ma réaction ‘’ honte à vous ‘’.Elles sont publiques et vérifiables et je défie une quelconque autorité de quelque nature que ce soit d’y apporter la moindre contradiction. Je n’en ai jamais fait mention avant cette malheureuse affaire .Je n ‘en parlais qu’à mes enfants en leur précisant que j’étais avant tout héritier de l’effort et des sacrifices inestimables ma mère .Elle-même est d’ailleurs descendante d’une tribu , les Oumeddour de la région de Sidi Aich- Bejaia , exilée dans la région de Guelma après la révolte de Cheikh Aheddad en 1871 .Veuve de chahid à 33 ans elle a également perdu son jeune frère Touhami enterré sous sépulture anonyme dans le cimetière des chouhada de Guelma où les pierres tombales ont été débaptisées il y a 45 ans…..

HOCINE : Personnellement,je ne fais jamais totalement confiance aux hommes politiques quels qu'ils soient.La politique les rend cyniques et froid,surtout sous les cieux du tiers monde.La démocratisation de la société n'est pas simple à réaliser et aucun politicien algérien n'est capable de changer la culture sociale et politiques des algériens .Il faut pour cela commencer par une reforme profonde du système d'enseignement.Pensez vous que cela serait possible à court ou moyen terme?

ABDELAZIZ RAHABI : Mon cher Hocine , Vous devez avoir des raisons de ne pas trop faire confiance aux politiques .Dans ma vie j’ai rencontré ceux qui répondent au profil que vous tracez d’eux comme j’ai connu de grands serviteurs de l'Etat qui aiment leur pays et le servent avec abnégation, compétence et intégrité. Il est vrai par ailleurs que les règles du jeu ne sont pas toujours claires et les coups bas fréquents. La démocratie est un apprentissage, un chemin long mais reste le moins mauvais des systèmes .L’école est un des espaces privilégies pour la diffusion des valeurs démocratiques dans la société. Cela passe à mon avis par le retour à la considération due aux enseignants et révision du manuel scolaire son adaptation .Il doit diffuser des connaissances mais également des valeurs de liberté, de justice et d’égalité. Donner à l’enfant le sentiment d’être en rapport avec le temps réel et ne pas le cantonner dans la passé, rendre son raisonnement plus rationnel plus pragmatique, lui faire aimer la lecture et la curiosité .En somme le préparer au monde d’aujourd’hui qui, hélas, est défini ailleurs chez les plus puissants .Ceci ne sera possible que s’il y a une volonté politique de faire des algériens des citoyens du monde .Tel n’est pas le cas aujourd’hui et je le regrette. Chez nous l’école forme à l’idéologie (c’était compréhensible au lendemain de l’indépendance), prépare à l’irrationnel ne favorise pas la compétition et déprécie l’élite synonyme de caste. Comme le pouvoir n’est t pas fondés sur le savoir ni sur la légitimité populaire ces deux valeurs se trouvent dévalorisées. L’école en paie les conséquences.