Djazairouna, l’Etat et l’application des Pactes Internationaux en Algérie

« L’Etat algérien a signé des pactes internationaux à la pelle. Cette inflation de signatures n’avait d’autre but que de soigner son image d’Etat légaliste moderne auprès de la communauté internationale. »
C’est l’une des vérités révélée par l’un des intervenants lors de la journée d’études organisée par l’association Djazairouna, à Blida, le 20 novembre 2008. Une heureuse initiative soulignée par tous les participants, en majorité des représentants de familles de victimes du terrorisme ; à l’heure où tous les espaces d’expression démocratique ont tendance à disparaître les uns après les autres sous les coups de boutoir, les menaces et les interdictions prononcés par les organes de l’Etat.
« Si nous avions eu accès au théâtre Mohamed Touri nous aurions refusé du monde. Il est malheureux que pour des manifestations d’intérêt public nous ayons à nous serrer, à quarante, dans un espace aussi que le siège exigu d’une association !»
A lancé, dépitée, l’une des organisatrices. Or la fonction fondamentale d’une association est de travailler, le plus largement possible, dans l’intérêt public. Restreindre son espace d’intervention c’est porter atteinte à des libertés essentielles. En empêchant la société de s’exprimer, au déni de tous les droits reconnue par la Constitution algérienne et tous les pactes internationaux, économiques sociaux et politiques, le pouvoir en contraignant et en comprimant les forces qui la constituent, risque, tôt ou tard une conflagration, aux imprévisibles conséquences.
Deux exposés introductifs ont nourri et ouvert le débat. Puis des communications spontanées, relatives à la situation des droits des femmes et des enfants, ont été faites par les représentants du Réseau Wassila et de l’Association Nationale de Défense des Droits de l’Enfant(ANADDE).
Le débat a mis en évidence le fait que les textes nationaux étaient insuffisamment appliqués ; que dire alors du respect des Pactes Internationaux, censés être supérieurs, dans la hiérarchie des textes, à la législation nationale. Et de toutes les dispositions qu’ils énoncent en matière de respect de droits de la personne humaine, au droit à l’expression libre de ses opinions, comme le droit de réunion publique ou de manifestation, rien n’est respecté, sous prétexte que nous vivions sous état d’urgence, en vigueur depuis une vingtaine d’années. Et pourtant, à en croire les promoteurs et les servants de la Charte de la réconciliation nationale celle-ci aurait atteint son but, à savoir éteindre les feux de la fitna et du désordre. S’il en était réellement ainsi, pourquoi continuer à appliquer l’état d’urgence, si ce n’est pour justifier les atteintes et répressions de toutes les libertés constitutionnelles ? Mais au royaume d’Ubu Roi, nous n’en sommes pas à une contradiction prés.
Par ailleurs, l’assemblée s’est interrogé sur les gesticulations du pouvoir à propos du droit des femmes, lorsque dés la Constitution de 1963, ce que l’on a ré exhumé en 2008, y était déjà contenu dans l’esprit et la lettre. L’essentiel, pour convaincre de sa réelle bonne foi, était de prononcer purement et simplement l’abrogation du Code de la famille. Cependant, il faut bien reconnaître qu’en période électorale, il est difficile de plaire à tout le monde. Alors on plaît, en toute priorité, aux détenteurs du plus grand nombre de voix ; tout en se dédouanant auprès du « deuxième collège » des femmes modernistes et démocrates, par des pirouettes langagières et l’affirmation de principes, désormais vides de sens et de réel impact.
Puis, un père de famille , victime du terrorisme, s’est levé, intimidé et, la voix mal assurée, a posé une question :
« Je suis titulaire d’une pension en tant que victime du terrorisme ; mais à ma mort, mes enfants n’auront plus rien…pourquoi les autres et ceux de la famille révolutionnaire sont-ils assurés à vie .. . Pourquoi ? »
Les deux avocats ont levé les bras au ciel avouant leur impuissance « Que voulez-vous, les textes sont les textes » Ce qui, en clair, veut dire, que nul ne peut rien devant les inégalités et les discriminations flagrantes.
Une réunion qui a permis à des algériennes et algériens, toutes classes mêlées, de se rencontrer et de se parler ; d’informer et d’offrir un espace de débat, d’expression et de propositions et, pour le plus grand nombre, de découvrir l’existence de ces pactes internationaux. Et, surtout, que l’on pouvait déposer une plainte auprès de ces juridictions internationales lorsque, au plan national, toutes les voies ont été épuisées. Encore du travail pédagogique en voie, car tel est le rôle du mouvement associatif : éveiller les consciences et former les esprits à tout ce que l’école algérienne a oublié d’apprendre à nos enfants. Mais c’est là l’histoire de toutes les réformes à venir !

Si Mohamed Baghdadi

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Commentaires (8) | Réagir ?

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cherifa kheddar

c'est vraie que je ne réagis que un mois plus, parce que prise ailleurs, mais je tiens à dire merci à monsieur Baghdadi d'avoir permis au débat de se poursuivre, au delà de notre conférence.

je dis aussi que Djazairouna ne bouge que selon ses moyens de bord, entre autres " ses compétences réglementaires, ses capacités humaines, et ses convictions politiques". ne nous demandez pas de faire autrement, nous ne saurons pas le faire. Dites vous bien, que la majorité des membres de notre association, ne leur reste même plus des larmes pour pleurer.

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E. Caminade

@ Si Mohamed Baghdadi

Cet article, publié sur Mediapart, n'a pas été écrit par les journalistes du site d'Edwy Plenel, mais par une lectrice/abonnée (ce journal est payant), en l'occurence moi-même.

La moindre des choses serait de mentionner mon nom !

(Personnellement, quand il m'arrive de reproduire un article du Matin sur mon blog, sur ce même site, je n'oublie pas d'en signaler l'auteur)

A votre décharge, le fonctionnement de ce site avec une partie Journal, une partie Club (animée par les abonnés) est un peu compliqué pour un non-initié.

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