L'attentat contre SNC-Lavalin vu par la presse canadienne : "L'Algérie après l'Irak", selon le quotidien Le Devoir

 L'attentat contre SNC-Lavalin vu par la presse canadienne : "L'Algérie après l'Irak", selon le quotidien Le Devoir

"En Algérie, ces jours-ci, un attentat n'attend pas l'autre. Entre eux, ils se caractérisent évidemment par le nombre de morts et de blessés. Les cibles, elles, sont toujours les mêmes: les gendarmes, les militaires et les employés d'entreprises étrangères, comme ce fut le cas hier pour ceux de SNC-Lavalin. Signe des temps? La nébuleuse terroriste s'avère plus résistante que ne le prétend le gouvernement algérien.

Au cours des cinq derniers jours et après autant d'explosions, 70 personnes ont été tuées et davantage estropiées. Outre celles qui travaillaient pour la firme d'ingénierie montréalaise, on retiendra tous ces gamins d'à peine 18 ans qui s'étaient massés devant un bureau de recrutement de la gendarmerie. Lorsque les militants d'al-Qaïda au Maghreb islamique, car c'est d'eux qu'il s'agit, ne s'en prennent pas aux membres des forces de la sécurité, ils saignent les femmes et les enfants de ces derniers. Car tous sont considérés comme des sujets du takfir, soit ce concept coranique qui stipule que tout individu collaborant avec le régime «ennemi» est un apostat.

Cela rappelé, cette récente série d'attentats confirme une recrudescence des violences, mais aussi, voire surtout, le «réveil» du réseau salafiste en Algérie après une mise entre parenthèses de quatre, cinq ans maximum. Dans cette histoire de bruit et de fureur, il y a un avant et un après. Quoi donc? Le 11 septembre 2001.

Au terme d'une guerre civile dans laquelle environ 200 000 personnes ont péri au cours des années 90, le Groupe islamique armé (GIA) ainsi que le Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) avaient été sérieusement affaiblis. Ils n'étaient plus que l'ombre de ce qu'ils furent lors de la décennie antérieure. C'est à noter, voire à retenir, ces mouvements étaient strictement nationaux. Autrement dit, des mouvements algériens regroupant des Algériens qui ne s'étaient pas greffés à des réseaux saoudiens, égyptiens ou encore marocains.

Après avoir transformé le GSPC en al-Qaïda au Maghreb islamique, plus exactement après avoir prêté allégeance à Oussama ben Laden, les dirigeants de la filiale algérienne et de la filiale mésopotamienne ont fait ce qui se fait souvent dans l'univers de l'économie: une fusion. À l'automne 2004, Abdelmalek Droukdai et Abou Moussad Zarkaoui, alors basé en Irak, ont signé une entente.

Dans la foulée de celle-ci, des camps d'entraînement ont été construits en Mauritanie, donc en dehors de l'Algérie. Des Marocains, des Tunisiens, des Égyptiens et d'autres se sont joints aux rangs jusqu'ici formés uniquement d'Algériens. Quoi d'autre? Les sources de financement ont été diversifiées. Bref, on a fédéré.

Après la mort de Zarkaoui et le changement de stratégie de l'armée américaine en Irak, qui s'est traduit par une série de revers pour al-Qaïda, les patrons de ce dernier ont décidé le rapatriement d'un nombre non négligeable de ses militants. Certains ont pris la direction du Pakistan, d'autres celle de l'Algérie. CQFD: des vétérans du conflit en Irak combattent aujourd'hui en Algérie.

Au milieu de tout ce fatras, ici et là on a relevé l'empreinte libyenne. Eh oui, le colonel Mouammar Kadhafi s'est mêlé de la partie. La cause ou la raison de son implication indirecte sur l'échiquier algérien est simple: à l'instar de son voisin, Kadhafi prétend au titre de puissance régionale. Chose certaine, il ne veut pas que l'ascendant de son concurrent sur le Maghreb soit trop prononcé.

Au ras des pâquerettes, l'ambition du Libyen s'est traduite notamment comme suit: en 2007, des touristes européens sont kidnappés par al-Qaïda à des fins de rançon. Que fait ce cher Kadhafi? Il libère 90 islamistes emprisonnés sans que des demandes aient été formulées en ce sens. En un mot, Kadhafi s'emploie à agacer les chefs de gouvernement de l'Afrique du Nord.

Entre la mue du GSPC, la coalition avec al-Qaïda, l'addition de Mauritaniens, de Nigériens, de Marocains et d'autres, l'addition surtout de vétérans de la guerre en Irak, l'activisme moins sourd qu'on ne le croit de Kadhafi, sans oublier les hésitations des autorités algériennes, il va sans dire que les agissements d'al-Qaïda au Maghreb islamique vont aller croissant. D'autant que le président Abdelaziz Bouteflika et ses ministres ne donnent pas l'impression d'être sur la même longueur d'onde.

Serge Truffaut

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Commentaires (27) | Réagir ?

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algerien

en algerie, ils mettent cet article dans la meme page q'un autre, tres interessant: "Algérie : le gouvernement déclare la guerre aux entreprises étrangères"

ce n'est ptetre qu'une coincidence;

mais bon....

afaire a suivre.

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Radmo

Les certitudes de Serge Truffaut dans son article sont bizarres.

Pour les manipulations, Truffaut sait très bien que les américains sont plus forts que Muammar mais il ne le dira jamais car son pays le Canada est un allié de poids des USA dans sa lutte du "bien contre le mal ".

L’ancien ministre libanais des télécommunications, Issam Naam, a confirmé ces manipulations dans une tribune publiée dans Al Quds al-Arabi, où il relate sa conversation avec la délégation américaine menée par Nancy Pelosi : « On a appris de la délégation américaine que des services de renseignements de Washington avaient commencé à rassembler, armer et entraîner des groupes islamistes extrémistes pour effectuer des attaques contre le Hezbollah, conformément au plan de l’administration Bush consistant à opposer les populations sunnites et chi’ites, dans les régions où elles cohabitent habituellement. Et cela sera organisé en camouflant les vrais commanditaires et exécutants de ces opérations qui pourront être facilement attribuées à Al-Qaïda ".

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