Algérie : Grande foule au Colloque sur l’impunité à Tizi-Ouzou

Algérie : Grande foule au Colloque sur l’impunité à Tizi-Ouzou

C’était la foule des grands jours, hier, au Petit théâtre de la Maison de la culture Mouloud-Mammeri de Tizi-Ouzou pour le colloque sur l’impunité organisé par les ârchs et qui a, globalement, tenu ses promesses.

Le cycle des conférences fut inauguré par des interventions de qualité, animées par le professeur maître Haddouche, le professeur Mohand Issad, l’avocat Abdellah Benarbia et le directeur du Matin Mohamed Benchicou. Si maître Hadouche s’est contenté de faire un état des lieux global sur la manière juridique (pas toujours orthodoxe, d’après l’avocat) avec laquelle l’Etat a géré les dossiers des martyrs et blessés du Printemps noir, le professeur Issad a eu, quant à lui, à développer des idées beaucoup plus larges, beaucoup plus inhérentes au thème du jour.

De l’impunité, Mohand Issad parlera beaucoup. En expert juridique, souvent, en observateur agressif, parfois. Pour le conférencier, l’idée même sévit et nuit au sein même du système judiciaire, d’où la nécessité de bien décrypter ce système pour bien localiser le mal. Le professeur Issad a inlassablement expliqué à la nombreuse assistance présente qu’il demeure convaincu que la lutte contre l’impunité passe, immanquablement, par la concrétisation de l’indépendance de la justice. Pour cela, explique-t-il, de nombreux préalables doivent exister. Des préalables qu’il faudrait inculquer dans les mentalités pour qu’ils puissent se traduire par des faits. A ce même propos, l’orateur évoquera longuement le concept de la justice sociale, seule alternative, selon lui, pour une nouvelle conception de la justice algérienne. L’intervention du professeur était donc une analyse, stricte et pragmatique, du fonctionnement judiciaire algérien, avec, à chaque fois, une proposition de changement ou un commentaire lucide.

Instruction de ne pas laisser parler Benchicou

Dans l’après-midi, et compte tenu des incertitudes qui entourent le déroulement, ou pas, du deuxième jour du colloque (pour une bien étrange question de programmation de salle !), les organisateurs ont dû chambouler quelque peu leur programme. En fait, il s’agit d’une instruction visant à censurer Mohamed Benchicou dont la direction de la Maison de la culture, sur ordre du wali, a entrepris d’interdire la conférence. Pour cela, elle a éliminé tout le programme de jeudi ! Belaïd Abrika annonce que la conférence du journaliste-écrivain Mohamed Benchicou est avancée au mercredi et qu’il animera les débats de la deuxième partie de ce premier jour.

De fait, l’ex-patron du Matin parlera devant un public nombreux et attentif. Ses premières phrases étaient courtes et directes. “Je ne suis ni haineux ni rancunier (...) je le dis clairement dans mon recueil de poésies qui paraîtra incessamment et qui s’intitulera, simplement, “ Je pardonnerai...” Mais je n’encouragerai jamais l’impunité, face à l’impunité, je ne peux me taire.”

S’étalant sur le sujet qu’il maîtrise le mieux, le journalisme, Benchicou portera un regard tantôt critique, tantôt indulgent sur la presse algérienne : « Quel journalisme contre l’impunité ? Quel fut notre rôle dans le traitement des cas d’impunité : Charte pour la paix, affaire Khalifa, corruption ? Très discutable. Pour lutter contre l’impunité, il faut un journalisme de conviction, un journalisme qui lui-même ne soit pas asservi à l’argent, un journalisme d'enquête. Un journalisme qui aura fait un choix entre informer le peuple et plaire au pouvoir.

Chiffres à l’appui, il expliquera qu’en s’attaquant à l’impunité, le journaliste risque la mort, la prison, la faillite, la liquidation…Il devient lui-même victime de l’impunité : Au cours des 15 dernières années, selon le Comité pour la protection des journalistes, environ 85% de tous les meurtriers de journalistes n’ont fait l’objet ni d’enquêtes ni de poursuites pour leurs crimes. « Même quand les meurtres ont fait l’objet d’enquêtes plus poussées et quand quelques condamnations ont été obtenues, les commanditaires n’ont été poursuivis par la justice que dans 7% des cas ».

Benchicou affirmera : « Tous les problèmes du Matin viennent de ce qu’il a traité de l’impunité : affaire Saâdaoui, tortures de Tkout, Printemps noir, affaire Sonatrach, La Baigneuse, Shorafa-Orascom…Mais je ne regrette rien, et depuis ma sortie de prison, je persiste à lutter contre l’impunité : je fais comprendre à mes bourreaux qu’il y a un temps pour l’arbitraire et un temps pour l’après-arbitraire, où ils doivent faire face à leur victime. Je ne me tairai pas. »

L.M. (Avec Dépêche de Kabylie)

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Commentaires (1) | Réagir ?

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Mourad

Il serait temps de parler de l`impunite dont beneficie TALEB-BENDIAB Mokhtar l`ex directeur du Centre Culturel Algerien et ectuel DG de l`Institut du Monde Arabe et sa secretaire Louiza sur les detournement des budgets du CCA pendant huit ans avec le protection de l`ex ambassadeur Ghoualmi Mohamed.