Algérie-corruption : Dites-nous tout, M. Hadjadj (Forum, 3ème partie et fin)

Algérie-corruption : Dites-nous tout, M. Hadjadj (Forum, 3ème partie et fin)

Troisième et dernière partie du Forum. Suite des réponses de Djilali Hadjadj, porte-parole de l’Association algérienne de lutte contre la corruption (AACC) et représentant de Transparency International en Algérie, aux lecteurs du Matin.

Assoun : Allo monsieur, digne fils d'Algérie, monsieur Hadjadj, tu ne penses pas qu'il est temps de d'évoquer, Touati, Toufik, tous ces bourreaux, est d'aller droit au but ? DE CETTE justice qui s'en prend à Habiba, Chawki Amari, au lieu de wali de Ghardaïa, Chlef ? Tout le monde sait ce qui se passe, alors ma question est simple : c'est quoi la solution extrême, pour en finir avec tout ça ? Puisqu'il ne reste que l'extrémisme pour revendiquer la moindre des choses, le peuple est prêt pour versé son sang.

Djilali Hadjadj : L’AACC est partisane exclusivement de l’action pacifique et non-violente, même si elle n’exclut pas d’utiliser des actions spectaculaires pour se faire entendre et surtout pour rassembler sur le terrain de l’action le plus grand nombre d’algériens intègres.

Albert Piu : Tout d'abord, grand merci pour le travail que vous faites. Ma question est : comment expliquez-vous que les tramways en Algérie coûtent plus de 300 M € (Oran, Constantine) pour une seule ligne, alors que celui de Rabat coûte moins de 100 M € pour deux lignes ? Merci de votre réponse et bonne continuation.

Djilali Hadjadj : Si c’est réellement le cas, et c’est vérifiable, ce ne serait pas une surprise : le gouvernement algérien est un très mauvais gestionnaire de la commande publique, et les exemples similaires à celui que vous citez sont nombreux, d’autant plus que les écarts de prix sont énormes. Le comble, s’agissant de tramways, c’st quand il s’agit du même fournisseur ! Si vous pouvez nous en dire plus, vous serez bien aimable de nous contacter à l’adresse électronique suivante : < [email protected] >.

Moussa Haouache : OK, c`est bon de signaler tout ça. Et ça change quoi dans l`affaire ? Comme l`a dit le monsieur dans sa déclaration lors de l`affaire Khalifa des hauts responsables ont confirmé avoir trafiqué et usé du faux et usage de faux. Qu`est qu’on leur a fait ? Rien du tout. L`affaire Khalifa, on n’en entend plus parler .C`est la même chose pour l`affaire BRC et j`en passe. Maintenant les scandales en Algérie ne font plus scandales : ça vient et ça disparaît dans le temps. Donc les gens escrocs deviennent plus escrocs, les trafiquants deviennent plus trafiquants, les voleurs plus voleurs etc. Donc ça ne sert à rien de dire que nous avons une AACC. Ça change quoi dans l`affaire : absolument rien. Je fume du the et le cauchemar continu.

Djilali Hadjadj : Je ne partage pas le constat que vous faîtes, même si je peux comprendre votre dépit face à l’impunité dont continuent de bénéficier les grands corrompus et corrupteurs. Le changement se construit à pas de fourmis, surtout dans un contexte aussi difficile. Il faudrait qu’il y ait des dizaines d’AACC, qu’il y ait une société civile plus forte plus déterminée, qu’il y ait une presse plus libre, des syndicats autonomes plus puissants et plus unitaires, etc.

Un lecteur : Un citoyen algérien qui observe et qui prie Dieu de punir tout ce monde. Dieu et seul capable de les anéantir à jamais. Amen.

Djilali Hadjadj : Aux yeux de l’AACC, la question de la spiritualité doit demeurer une affaire strictement privée, et la lutte contre la corruption, l’affaire des citoyens intègres.

Dr. Chiboune Lyes : Salut Mr Djilali. Dans votre dernier rapport, vous avez mentionné au passage la mutation du wali de Bejaïa, d'une façon rapide. Alors que vous pouvez même écrire des livres sur la corruption à Bejaia au niveau de la wilaya, les daïras ou les communes, surtout celle de Darguina que vous connaissez bien. Mr Hadjadj est ce que vous pourriez nous honorer par une conférence-débat sur le rôle du citoyen dans la gestion de la commune, à Darguina ?

Djilali Hadjadj : Je suis tout à fait disposé à répondre à votre invitation, à bénéficier de l’expérience des citoyens de Béjaïa et à vous faire part de nos propositions d’action figurant dans le communiqué de l’AACC sur les wilayas.

Mourad Meghdas : Bonsoir Mr HADJADJ. Tout d’abord, je salue votre courage et je vous prie de nous communiquer les coordonnées de votre association, afin y adhérer. Nous habitons le lotissement OUED TARFA 3 de EL ACHOUR, nous rencontrons quotidiennement des problèmes au niveau de notre lotissement. La mafia du sable, du bitume et des engins s'est installé à coté de notre lotissement, par la force des choses, il est devenu une zone industrielle. La mairie, la gendarmerie, le wali délégué, sont incapables de chasser ces indus occupants : trouvez vous que le silence de ces autorités est normal ? Nous vivons un cauchemar car le quartier est dépourvu de son caractère résidentiel et le bruit et les allergies ont pris la place du calme et de la propreté devant cette MAFIA !!! Dernière nouvelle : une autre mafia du sable est en train de construire un parc pour vendre les matériaux de construction sans que les autorités ne bougent le moindre petit doigt, dans cette république bananière !!! Je vous laisse le soin de vérifier nos dires.
Salutations.

Djilali Hadjadj : Est-ce qu’il y a des citoyens « victimes » des pratiques que vous dénoncez qui ont commencé à agir ? L’AACC est disposée à les accompagner dans leur combat.

Tarik Salhi : Bonjour Monsieur HADJADJ. BRC (Brown Root and Condor) fut un chantre de la corruption et de la malversation, après les quelques révélations faites par l'IGF qui faisaient office de parties émergées de l'iceberg, les hautes autorités de ce pays ont pris la décision de la dissoudre très probablement pour garder la plus grosse partie sous l'eau. Mes questions alors, il y en a deux si vous le permettez, sont les suivantes: quelle a été votre position et celle de votre mouvement concernant cette affaire? Y-a-t-il à votre avis des marges de manœuvres et surtout d'enquête lorsque la corruption est à ce point institutionnalisée?Merci. Tarik.

Djilali Hadjadj : L’AACC a dénoncé publiquement plus d’une fois et dans des écrits notamment, même sur les ondes de la radio chaine 2 le 22 novembre 2007, l’affaire BRC, les propos révoltants du ministre de l’énergie à l’encontre de l’IGF (ce qui a sonné le glas de la neutralisation de cette dernière) et le fait que les pouvoirs publics aient tout fait pour enterrer cette affaire. Il faut cependant préciser que l’éclatement de l’affaire BRC qui éclabousse de nombreux secteurs, notamment en matière de violation de la réglementation des marchés publics, est dû à des règlements de compte au sein de clans du pouvoir, par « dossiers » de corruption interposés. La marge de manœuvre de l’AACC seule dans cette affaire et bien d’autres, est relativement étroit : par contre si d’autres partenaires potentiels dans la classe politique par exemple, chez les syndicats et la société civile, fédéraient leurs efforts, accompagnés par les médias, cette marge serait plus importante. Il faudrait œuvrer à la mise en place d’un front anti-corruption sur le terrain. Il faut y travailler.

Un lecteur : Je voudrais adhérer à votre association : que dois-je faire? EST CE POSSIBLE ?

Djilali Hadjadj : Vous êtes la bienvenue. Dans une première étape, le mieux serait de nous écrire via Internet (< [email protected]>).

Siham : Tous les Algériens savent conjuguer le verbe manger, « la blague ». Maintenant vous dites que la corruption existe de haut en bas et de bas en haut, sans dénoncer ni corrompu, ni corrupteur et vous ne provoquez pas la justice : c’est le constat de tous les algériens. Donc si c’est pour dire ce que tous les Algériens pensent : cette association n’a pas raison d’être, mais mon intuition, mon raisonnement par l’absurde, me dit que vous allez créer un scénario pour les blanchir.

Djilali Hadjadj : C’est votre point de vue. A la lecture des réponses que l’AACC a apportées aux questions des Internautes du journal « Le Matin », vous aurez peut- être une meilleure vision sur les objectifs de l’AACC et sa façon de concevoir la lutte contre la corruption.

Job : Le jour où on connaitra la reponse a la question suivante, on aura touT su: QUI A TUE MOHAMED BOUDHIAF ? La réponse à cette question comporte toutes les réponses à la corruption.

Djilali Hadjadj : Une chose semble certaine aujourd’hui, l’assassinat de Boudiaf a un lien avec ses tentatives visant à en savoir plus sur les détournements opérés par nombre de dignitaires du régime.

Rouibah : M. Hadjadj! Lutter contre la corruption lorsqu'elle est un phénomène "à la marge" est certainement un domaine d'intervention qu'une association comme la votre peut avoir. Mais est ce possible lorsqu'elle prend les proportions-énormes- qu'elle a chez nous? Ne faut-il en faire un domaine de l'action politique, au sens noble ? En fin de compte, seule une minorité profite de ce système bâti sur la prédation!

Djilali Hadjadj : Je suis d’accord avec vous : la lutte contre la corruption doit surtout s’inscrire dans l’action politique, et pas uniquement partisan. Ce combat doit être l’affaire de tous les hommes intègres, dans leurs activités professionnelles, dans leur entreprise, dans leur syndicat, dans leur association et dans leur parti. Mais il ne peut y avoir un combat dans l’absolu contre la corruption.

Un lecteur : Bonjour monsieur Hadjadj. Avez-vous les prérogatives de vérifier les comptes des hauts gradés de l'ANP ? A votre avis qui est le corps le plus corrompu en Algérie? Djilali Hadjadj : L’AACC est une association issue de la société civile, qui n’a pas les prérogatives de vérifier les comptes des hauts gradés de l’ANP, mais regrette que ces hauts gradés aient été « dispensés » par Bouteflika – cadeau empoisonné ? -, de leur déclaration de patrimoine par la loi du 20 février 2006 relative à la prévention et à la lutte contre la corruption, alors qu’ils étaient astreints à le faire jusqu’à cette date selon l’Ordonnance de 1997 portant déclaration de patrimoine signée par le président Zéroual.

Dergaz : Azul mass Hadjadj. Le combat que vous mener est noble, parce que vous touchez toute les couches de la société. Ce que je vous demande c’est pourquoi vous ne revendiquez pas à ce que la justice et les finances soient libres ?

Djilali Hadjadj : Cela fait partie de nos « revendications » essentielles, mais il faut y travailler et accentuer la pression à tous les niveaux pour que ces secteurs et bien d’autres, puissent acquérir leur indépendance dans le respect des lois de la République.

Un lecteur : Seule la transparence peut venir à bout de la corruption ! Partout en Algérie, tout Algérien et toute Algérienne a droit de fourrer son nez dans tout compte public qui au demeurant doit être publié comme le journal officiel (sur papier et sur écran).Ainsi, tout le monde étant au courant des mouvements des budgets, pourra signaler à la justice ce qui ne va pas en informant la presse qui à son tour informe le grand public dont nos administrateurs qui agiront en conséquence pour remettre de l'ordre...

Djilali Hadjadj : Il faut notamment agir dans ce sens : accéder à l’information, faire éclater le culte du secret et diffuser les dénonciations lorsque sont vérifiées, faire pression sur les institutions concernées pour qu’elles agissent.

Tahar Grandi : La corruption en Algérie n’est plus le fait de quelques personnes véreuses, c’est un fait qui est sociologiquement glorifié et culturellement accepté. Ne dit-on pas Qfez (débrouillardise) au lieu de vol? Les gens honnêtes de Djayeh? La lutte pour la corruption est un travail de longue haleine et si de surcroit il y a une volonté politique. Ce qui malheureusement n’est pas le cas. Le monde politique s’accommode à la corruption et certains politiques s’y abreuvent allégrement. Le Cas de Khalifa est patent, quand des personnes affirment, devant le tribunal, en public: j’ai falsifié, j’ai usé du fait et usage de faux, ils sont maintenus, reconduits et même promus, les limites à la corruption n’existent plus. Au fait, concernant Khalifa, combien se fait par année le liquidateur? Les organes chargés du contrôle sont les nids de la corruption à savoir les douanes, les impôts, la banque centrale etc., Tout le monde le sait mais à tous les niveaux, on dit que celui qui à des preuves n’a qu’à les exhiber. Y a t-il plus vrai que la réalité? Les signes extérieurs de richesses est une preuve éclatante. Il suffit d’une simple investigation. Mais qui a intérêt à procéder de la sorte. Tous les systèmes de contrôle deviennent caducs quand il y a collusion, en Algérie il n’y a que des collusions à tous les niveaux. C’est de véritables toiles d’araignées qui se tissent au sein des entreprises et autres institutions. Au niveau local (wilaya, daira et commune), c’est tellement bien organisé que tout contrôle ou enquête s’avère infructueux.

Djilali Hadjadj : Très juste constat. Il faut être de plus en plus nombreux à agir : en menant un certain nombre d’actions, même partielles, l’AACC et ses partenaires, ont pu remettre en cause certaines situations de totale impunité, notamment dans quelques entreprises, wilayas et communes.

Une lectrice : Y a t'il vraiment un espoir que la corruption soit éradiquée un jour, surtout parce qu'elle se situe en haut niveau, c'est à dire au sein du pouvoir, lui même censé éradiquer ce genre de fléau. Je ne pense pas que ce soit l'affaire d'une simple association qui se limite uniquement à des constats, malheureusement sans effet, hormis un léger effet médiatique.

Djilali Hadjadj : Bien sûr que ce n’est pas uniquement l’affaire d’une association, aussi déterminée soit-elle. Il ne faut pas attendre grand-chose du pouvoir en place dans la lutte contre la corruption : il doit y avoir un changement radical et il faut œuvrer pour y parvenir. L’AACC ne fait pas uniquement des constats : elle agit aussi sur le terrain, parfois avec quelques succès, et elle avance des solutions et des pistes d’action pour tous ceux qui veulent agir.

Bounta : Mr Hadjadj, bravo pour le dernier rapport de l’AACC et pour votre courage qui n'a d'égal que celui de nos valeureux chahids! Mais pouvez-vous nous dire ce qu'est devenu le dossier relatif à la dilapidation du foncier dans la commune de Bordj el Bahri qui vous a été remis il y a quelques années? Savez-vous que depuis, l'ex P/APC, en l'occurrence BENOUAR Noureddine, est devenu MINISTRE de la République et actuellement représentant du peuple au Parlement? Quant à son adjoint BENCHABI Nacer, après avoir garder le poste pendant cinq longues années achevant l'œuvre de son maitre avec beaucoup de succès: il faut reconnaitre que l'élève a dépassé son maitre puisque au cours de son mandat, ni l'assassinat de son adjoint et son compagnon au mois d'octobre 2004, ni l'intervention de l'ex-ONRB en 2005 n'ont pu venir à bout de l'appétit de ce personnage puisqu'il vient de rempiler pour un 4éme mandat avec le Sénat comme ligne de mire! Selon la presse nationale, de nombreux magistrats de la Cour de Boumerdès seraient relevés de leurs fonctions pour mauvaise gestion du dossier du foncier de Bordj el Bahri se trouvant au niveau de cette institution judiciaire. Mais les véritables responsables de l'hécatombe qu'à connu la commune de Bordj el Bahri continuent à trôner sur les institutions de la République en toute impunité! Au fait qui est le véritable responsable de cette situation..??? BOUNTA

Djilali Hadjadj : L’AACC a toujours ce dossier, incomplet au demeurant, mais il aurait fallu que les preuves des accusations soient irréfutables et que les contacts se poursuivent avec la (ou les) personne (s) qui nous l’a remis. L’AACC est tout à fait disposée à reprendre ces contacts.

FIN

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Commentaires (13) | Réagir ?

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taleb salah eddine

bonjour mr hadjadj jespere que tu te porte bien bon courage a + salah eddine de bruxelles

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pompier

Je ne sais pas si Mr Djillali Hadjadj peut nous informer des actions entreprises par lui et transparency international pour soutenir certains cadres algériens qui ont eu l’audace de lever le voile sur des grandes affaire de corruption et qui se sont retrouver dans des situations terribles. Je cite le cas d’Abdelkader Souhabi (cadre des douanes) et l’affaire du D15. Benyoucef mellouk (Cadre du ministère de la justice) et l’affaire des magistrats faussaires et Omar Saada (Cadre de la protection civile) et les détournements des deniers public par des responsables de la protection civile.

Je voudrais savoir aussi si Mr Hadjadj assume toujours la fonction de conseiller du DG de la CNAS (l’une des l’institution les plus corrompue d’Algérie) dont le président du conseil d’administration n’est autre que le corrompu Abdelmadjid Sidi Said, le secrétaire général de l’UGTA.

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