La présidence à vie est elle une fatalité arabe ?

La présidence à vie est elle une fatalité arabe ?

Par Moncef Marzouki

Bachar Al Asad, en Syrie, Hosni Moubarak en Egypte, Mouammar Kadhafi en Libye, Abdelaziz Bouteflika en Algérie, Omar Al Bachir au Soudan, Ali Abdallah Salah au Yémen, comme Zine El Abidine Ben Ali en Tunisie, n’envisagent nullement de passer la main. Des pseudo élections trafiquées, au vu et au su de tout le monde, leur permettent de légaliser leur illégitimité. Le chef chronique assiégé, assiège la société par ses armées policières. C’est la lutte à mort entre un homme terrorisé par son peuple et un peuple terrorisé par son tyran. Dans tous ces pays c’est l’impasse, tant les régimes en place, comme le dit le politologue Olivier Roy, sont irréformables.

L’année dernière, à cette même époque, les Mauritaniens ont organisé pour la première fois de leur histoire une élection présidentielle parfaitement libre et honnête, fait unique dans les annales du Monde arabe.

Quelle évaluation pouvons-nous faire aujourd’hui de cette première ?

Serait-ce là la fameuse hirondelle annonçant un printemps démocratique dans la seule région du monde restée totalement réfractaire à la vague de démocratisation.

Tous mes interlocuteurs étaient d’accord sur le fait, qu’en matière de libertés publiques, le retour du bâton craint, une fois éteinte les lampions de la fête, ne s’est pas produit.

Mais beaucoup de représentants de la "société civile" semblaient dubitatifs quant à l’enthousiasme soulevé par l’expérience mauritanienne dans les pays arabes.

Leurs arguments appelant à tempérer cet enthousiasme sont les suivants :

- D’une certaine façon, les caciques de la dictature déchue n’avaient pas le choix, surtout après la tentative de putsch de 2003, que d’organiser leur propre soulèvement et sauver leurs propres têtes et privilèges en sacrifiant le dictateur devenu un fardeau pour le système.

- C’est le candidat du régime de l’époque, soutenu par la caste militaire, toujours omnipotente, qui l’a emporté et non le candidat de la "vraie alternance".

- Certes les formes électorales ont été respectées, mais la lutte n’a pas tourné autour de programmes politiques. Les déterminants ont été l’argent et le clientélisme tribal et ethnique.

Il est exact que sans l’intervention en sous main des militaires, le candidat de l’opposition aurait eu de meilleures chances de l’emporter, sans que cela soit absolument certain.

Nul doute aussi que la campagne a été très largement clientéliste et non programmatique. Il faut rappeler aussi que les officiers mauritaniens responsables du putsch avorté de 2003, poursuivis, lourdement condamnés et chassés de l’armée, n’ont pas été à ce jour réintégrés ou indemnisés par leurs collègues qui ont réussi ce qu’ils ont tenté avant eux : débarrasser le pays de la dictature.

Ceci étant dit, empressons-nous de rendre justice aux Mauritaniens.

Il est douteux que la quantité d’argent, ou de manipulation de toutes sortes, ait été plus importante que dans des pays plus chevronnés dans le jeu électoral.

Pourquoi les Mauritaniens devraient-ils davantage se justifier de leurs « identarismes » que les Corses, les Basques ou les Bosniaques ?

De toutes les façons l’apport de l’expérience n’est ni dans la qualité de l’organisation de la consultation, ni dans celle des débats ou des candidats. Il est dans le fait d’avoir débloqué, au coût le plus faible, une situation dangereuse dans laquelle vit aujourd’hui la quasi-totalité des pays arabes.

La Tunisie est conviée en 2009 à sa cinquième mascarade électorale en vingt ans, et instituant de facto la présidence à vie. Ce n’est pas le seul exemple d’un pays bloqué par un système politique, lui-même bloqué par un homme sans solution autre que de continuer à tenir la queue du tigre le plus longtemps possible.

Bachar Al Asad, en Syrie, Hosni Moubarak en Egypte, Mouammar Kadhafi en Libye, Abdelaziz Bouteflika en Algérie, Omar Al Bachir au Soudan, Ali Abdallah Salah au Yémen, comme Zine El Abidine Ben Ali en Tunisie, n’envisagent nullement de passer la main. Des pseudo élections trafiquées, au vu et au su de tout le monde, leur permettent de légaliser leur illégitimité. Le chef chronique assiégé, assiège la société par ses armées policières. C’est la lutte à mort entre un homme terrorisé par son peuple et un peuple terrorisé par son tyran. Dans tous ces pays c’est l’impasse, tant les régimes en place, comme le dit le politologue Olivier Roy, sont irréformables.

A travers l’histoire ce genre de situation se débloque normalement par la révolution ou par l’assassinat du tourmenteur de son peuple. Le sang coule, et il arrive qu’il coule à flots et pendant longtemps comme c’est le cas aujourd’hui en Irak. On oublie que les malheurs de ce pays sont largement dus à la dictature de Saddam Hussein et au processus de son élimination.

Le coût d’une insurrection populaire semble actuellement trop élevé pour les peuples arabes, surtout au vu de la malheureuse expérience algérienne. D’où leur attentisme actuel. Mais une telle attitude ne pourrait être tenue très longtemps car tous les problèmes en suspens ne font qu’empirer. En Egypte, on commence à s’entretuer dans les files pour acheter du pain.

La violence contenue par la répression, n’est pas annulée. On ne fait que reporter son explosion.

C’est dans ce contexte lourd de toutes les menaces, que l’expérience mauritanienne prend toute son importance.

Celle ci ne tient pas tant dans le putsch militaire organisé par les plus proches collaborateurs du dictateur, solution tant de fois utilisée dans le Monde arabe. Elle est dans le fait que les militaires aient accepté de remettre réellement le pouvoir dans les mains du suffrage universel.

Nul ne doute aujourd’hui que cette décision n’a pas été facile à prendre, que la tentation de s’accrocher au pouvoir a été forte, que celle de le récupérer n’est pas moins tenace.

Il n’en demeure pas moins que le dictateur a été renvoyé sans bain de sang, qu’on n’a pas assisté à des purges vengeresses, que des élections honnêtes ont permis de désamorcer la grave crise politique du pays, ce qui lui a permis de concentrer son énergie sur les graves problèmes socio-économiques dans lesquels il se débat.

La question immédiate qui vient à l’esprit est simple : Ce modèle peut-il être reproductible dans les autres pays arabes ?

Nul ne connaît évidemment la réponse puisque l’on ne sait pas de quoi l’avenir sera fait. Au lieu de se laisser aller aux supputations, il faudrait se poser une question plus inquiétante : quelles autres alternatives ont les pays arabes en dehors de la solution mauritanienne ?

Là, la réponse est évidente : la lente agonie de sociétés bloquées, et/ ou la violence.

Si telles sont les deux alternatives, on comprend pourquoi cette solution mauritanienne doit être une priorité absolue tant pour les "sociétés civiles", que pour les femmes et les hommes de bon sens au sein même de l’Etat totalitaire, sans parler des protecteurs occidentaux, qui dans leur obsession sécuritaire n’ont pas arrêté de prendre les pyromanes pour les pompiers.

Par Moncef Marzouki : (Président du Congrès pour la République (CPR, Tunisie), ancien président de la Ligue tunisienne des droits de l’homme et de la Commission arabe des droits de l’homme (CADH/ACHR) : www.moncefmarzouki.net.

Source : Bladi DZ

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Commentaires (16) | Réagir ?

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Amokrane

Tous les regimes arabes sont les memes:

A defaut d'etre roi on devient president a vie.

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Brakna

Je suis un Algérien qui vit en Algérie ; j’y suis né et j’ai grandit comme mes aïeux et les aïeux de mes aïeux dans mon pays l’Algérie. J’ai fais mes études en Algérie et mon service National durant les années difficiles 1992-1994; Quand le feu Boudiaf a été assassiné (Ellah Irahmou) ; j’étais dans la caserne et on ma remis une Kalachnikov pour être le premier à être exposer pour rendre la paix. Je suis Algérien avec mon unique nationalité Algérienne et je remercie le bon dieu chaque jour d’être né dans un pays indépendant grâce aux sacrifices de nos parents véritables preux.

Quant à Bouteflika;

Que connaissons-nous de lui durant les années 80 ? Ancien Ministres des affaires étrangères qui est poursuivit par la «Cour des comptes » (Est-ce vrai ou pas, je ne sais pas; comme je ne sais pas qui et pourquoi on a assassiné Abane Ramdane architecte de la révolution algérienne, il avait déjà son bac Match avec Mention; comme je ne sais pas aussi qui et pourquoi on a assassiné Krim Belkacem en Allemagne, comme je ne sais pas aussi qui et pourquoi on a assassiné Boudiaf président du CRUA, malheureusement la liste est longue).

Je suis sur d'une chose, il y a 36 millions d’Algériens; Bouteflika n'est qu'un élément parmi ces 36 millions; il n'est pas l'Algérie; durant les pires années qu’a connaît l’Algérie monsieur le Président était loin, il était chez les monarchies du Moyen Orient.

L’Algérie ne tombera jamais et le monopole du nationalisme et du patriotisme est loin de se résumer dans des séquences de mots bien arrangées mais dans l’action de tous les jours et surtout dans les moments les plus dures.

Si l’Algérie est debout aujourd’hui, c’est grâce à ses vrais enfants qui étaient à ses cotés durant les années très dures où l’Algérie n’avais pas de quoi importer les produits de premières nécessités pour une période de 03 mois, quand le baril du pétrole se vendait à $9, aujourd’hui le baril est à $135 et bientôt il sera à $200.

L’article 74 de la constitution est le seul garant de l’alternance au pouvoir, ce qui implique une dynamique et donc un besoin de démontrer que les uns ont fait mieux que les autres et surtout que les postes clefs ne soient pas accaparés par les mêmes personnes ou la même secte à vie, ils sauront qu’ils y aura d’autres qui vont venir et qui verront ce qu’ils ont fait et les dénonceront le cas échéant. La situation qu’a vécu l’Algérie a été crée en grande partie par une situation similaire ou une secte compacte qui faisait ce qu’elle voulait de notre pays et n’a jamais laisser les compétences algérienne s’épanouir l’Algérie.

Des petits exemples de la mal gouvernance qui en disent long.

- L’intelligence d’un gouvernement se mesure par le repas de Midi du simple travailleur (usine, chantier, école, fonction publique, …). La situation actuelle dans ce sens n’a fait qu’empirer; prenant le salaire de 1999 et celui d’aujourd’hui et convertissant les en valeur marchande, La preuve que ca va de mal-en-pie

- Il est inacceptable que pour qu’un algérien vive bien en Algérie il est obligé de quitter l’Algérie avec tout les dangers qui existent pour espérer de se frôler un chemin chez lui en Algérie.

Un petit calcul d’épicier pour schématiser cela :

Salaire d’un cadre (bien payé) après 05 années à l’université est de 35 000 DA/MOIS qui égal à 420 000 DA/AN. Prix d’un logement (F3) le moins chère est égal à 5 000 000 DA; le Nombre d’années pour arriver à avoir un appartement est de 12 années en mettant les 100 % du salaire c. à. d. sans compter la nourriture, l’habilement, les jours de maladie et autres charges.

Pour avoir une voiture il faut un minimum de 1 000 000 DA donc il faudrait rajouter 03 années de travail.

Par conséquent ; il faudrait 15 années de travail sans manger, sans s’habiter, sans se marier sans avoir des enfants sans vacances pour un cadre algérien pour qu’il puisse avoir le minimum; c’est à dire au minimum à l’âge de 40 ans.

- Dun ’autre coté un cadre Algérien (Cadre Supérieur) qui a des compétences prouvées qui a la chance et le piston de travailler à Sonatrach, qui a l’autorité de signer des ordres de sévices qui se chiffrent à des millions de dollars par mois pour des sociétés étrangères, ce dernier travaille dans un bureau miteux; qui n’a pas été changé depuis 30 ans (meme chaise, meme table, meme mobiler), n’a même une ligne téléphonique national, n’a pas l’accès à l’internet avec un salaire d'à peine $1 000 par mois et à coté de lui son vis-à-vis étranger qui vient chaque mois lui présenter la facture de Millions de dollars (Est-ce que c’est sa faute s’il est tenté d’être corrompu???, d’autant plus qu’il n’y aucun risque de contrôle ???).

- Le salaire d’un cadre Algérien dans une société étrangère qui opère en Algérie ne rivalise même pas au 1/5 ieme de la prime de logement que l’on donne à l’expatrié (A Compétences égales bien sûr). Le même Algérien n’aura jamais le droit d’avoir des stocks options de cette entreprise, chose qui est possible pour tous les employés de tous les autres pays dans tous les autres pays du monde.

- Pour un poste donné dans une compagnie étrangère; pour les mêmes compétences la loi favorise l’Algérien par rapport à l’étranger (Cette loi est appliquée partout dans le monde, y compris dans les pays les plus corrompus d’Afrique) ; cela n’a jamais été le cas pour les compagnies étrangères opérant en Algérie, Si nous analysons les chiffres dans ce sens c’est vraiment effarent le nombre d’etrangers (égyptiens, libanais, tunisiens sans compter les occidentaux) qui y travaillent dans le secteur du pétrole et croyez moi messieurs cela n’a rien à avoir avec la compétence (ou est l’Etat ou sont les services de l’inspection du Travail).

- La véritable richesse d’un pays est sa ressource humaine par ses ressources naturelles, ces dernières ne doivent être utilisées que pour accroître la première ; Je suis issu d’une promotion de 80 ingénieurs de 1986; plus de 80 % travaillent actuellement à l’étranger (France, Irlande, Allemagne, Pérou, Amérique, Canada, …) qui va construire l’Algérie ce n’est certainement pas Bouteflika encore moins Belkhadem. Pourquoi sont-ils partis ?? ; ils aiment l’Algérie autant que n’importe quel autre Algérien ; la réponse est évidente c’est que notre pays peut offrir les "œufs d’or" à un étranger mais jamais à son propre enfant, elle ne lui offre même pas de quoi subvenir à ses besoins primaires ; l’Algérie est comme la chatte qui mange ses enfants.

Pourquoi je suis contre Bouteflika et surtout un quelconque troisième mandat.

- La présidence à vie est une fatalité.

- Boutef ne respecte pas la constitution.

Des lois arbitraires qui encouragent ceux qui ne sont pas correctes et qui donc par conséquent encouragent les gens de manière indirecte à être contre les institutions. Exemple : Le service National ; je ne suis par contre le fait qu’il soit enlevé mais je suis contre une loi arbitraire qui sanctionne les gens disciplinés qui ont passés leur services national et ont donné 2 ans de leurs vie pour l’Algérie, ils y en a même ceux qui ont perdu leurs vie durant les années noires de l’Algérie. Moralité de notre ETAT : « Ne sois pas correcte, ne sois pas discipliné, ne crois pas en moi sois un Rebelle et l’Etat est miséricordieux il va te récomponser ».

- Donner des postes de responsabilités suprêmes pour ceux qui ont de multiples nationalités, pour se la couler douce dans un pays étranger après avoir pris une retraite dorée.

- La démocratie et les droits de l’homme ont régressés en Algérie depuis la venue de Bouteflika; Aucun véritable projet de société, aucune création de richesse.

- Il n’y a aucun honneur à dépenser uniquement la rente pétrolière dans les infrastructures occtoyés sous fomre de marchés aux entreprises étrangéres, elles ne suffiront jamais à elle seules. L'honneur, le challenge et la réussite d’un gouvernement réside dans la création de nouvelles richesses.

- Pourquoi le gouvernement ment même sur les chiffres de chômeurs (annoncé 11% alors que l’on estime à 35%) ; l’Etat n’est même pas capable de donner les vrais chiffres, Il n’est même capable à mettre une procédure crédible pour faire un compte réaliste (l’ANEM est un leurre «Du n’importe quoi»)

- Etat très faible; incapable de sécuriser ses frontières; incapable de sécuriser les routes (5000 morts presque autant d’handicapés à vie par an).

- Les Jeunes fuient leur pays en masse comme s'ils fuient la peste au risque de leur vie (Pensez vous que la vie d’un simple Harraga ne vaut pas celle du Président ou celle d’un belkhadem ??)

- L’Affaire Khalifa ; 02 Milliard de dollars de perte seche pour l’Algérie à cause d’un état faible, corrompu, incompétent et tout ça durant le regne de Bouteflika.

- Un pays de non droit à cause d’une poigné d’illuminés endoctrinés au moyen orient qui se croient plus proche du bon dieu que tous les autres humains sur terre; ils ont crées des pertes énormes en argent, en espoir, en crédibilité à l’état ; croyez vous vraiment qu’avec tout l’Argent qui a été dépensé par l’état (plus de 40 milliards de dollars, de quoi soulager la misère de tous les algériens) ils ne peuvent pas éradiquer ces poignées de gens.

- L’Algérie est géré par une Secte ; Le Clan de Oujda qui perdure depuis 1962 ; un régionalisme effarant (Plus de la moitié des ministres sont de l’ouest du jamais vu dans l’Algérie indépendante) ; Petit exemples:

- Chakib Khellil ; Né le 8 Août 1939 à Oujda - Maroc

- Abdelaziz Bouteflika né le 2 mars 1937 à Oujda au Maroc

- Yazid Zerhouni né le 1937 à Tunis (Tunisie) ; Études secondaires au Maroc.

La liste est longue …………sans compter les autres expatriés (Double et triple nationalités) qui gouvernent l’Algérie.

Pour moi; Il est clair :

1) L’Algérie ne doit pas être gouvernée par des expatriés (Double ou triple Nationalités). Un poste de cadre Sup. ne doit revenir qu’à un Algérien avec son unique Nationalité (S’ils ont a plusieurs; qu’il se dénaturalise à l’image des autres pays du Monde entier CANADA, France, …) et qui a fait son service national.

2) L’accès aux soins à l’étranger ne doit pas être autorisé à nos super responsables, ils doivent se soigner dans les hôpitaux du pays et s’ils ne sont pas content de la prestation offerte, ils sont la pour l’améliorer sinon qu’ils laissent la place à ceux qui peuvent et veulent s’en charger avec honneur et prestige.

3) Ne doit devenir Président d’Algérie que celui qui est né et a grandit en Algérie à l’image des Etats Unis et des autres pays du monde entier.

En conclusion : Il est clair que celui qui soutient un troisième Mandat de Bouteflika a soit des intérêts occultes, soit il est contre l’Algérie et les Algériens de l’Algérie profonde.

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