Gaz de schiste : la France ne veut pas changer ses lunettes de colon (II)

Présenter donc l’option du gaz de schiste comme un choix entre la peste et le choléra comme fait le gouvernement en place est une simple solution de facilité pour poursuivre dans la voie de l’économie de rente.
Présenter donc l’option du gaz de schiste comme un choix entre la peste et le choléra comme fait le gouvernement en place est une simple solution de facilité pour poursuivre dans la voie de l’économie de rente.

Parce que tout simplement elle maîtrise la recherche, l’exploration, le traitement et le transport du gaz conventionnel. Il faut souligner qu’elle a construit la première usine de liquéfaction au monde en 1964, la Camel dans l’ouest du pays.

2- Pourquoi Sonatrach spécialement n’a aucun intérêt à investir dans le gaz de schiste ?

En dépit des difficultés liées à la gestion de ses ressources humaines, elle dispose d’une expertise dans tous les procédés de liquéfaction. Avec le temps, elle s’est imprégnée des avantages et des inconvénients des deux modes de transport du gaz conventionnel. Elle exporte actuellement prés de 62 milliards de m3 et ambitionne porter ce chiffre à 85 milliards de m3 d’ici 2015. Pour cela des capitaux ont été consentis et le moindre $ reste nécessaire. Elle a tout intérêt à capitaliser, consolider et fertiliser cette expérience qu’elle pourra fructifier dans le cadre d’un partenariat du type win win. Les Russes l’ont déjà souhaité. Ses réserves en gaz naturel fin 2014 sont estimées à 4,5 trillions de m3, en augmentation avec de nouvelles découvertes que Sonatrach a réalisé seule. Ceci la place au rang de la deuxième en Afrique après le Nigeria avec 5,3 trillions de m3 (03). L’Algérie dispose aussi d’un vaste domaine minier avoisinant les 2 millions de km2, exploré sur à peine 35%. Etant donné le contexte du marché de l’énergie mondial actuel, elle a donc tout intérêt à développer le montage de partenariat pour s’imposer dans son marché traditionnel qui reste l’Europe de part sa proximité. Dans le forum des pays exportateurs de gaz FPEG, elle aura à surveiller les Russes pour leur gazoduc Southstream et qui ne sont que membres observateurs dans cette assise et le Qatar qui tente d’investir le marché Européen. Ces deux pays totalisent à eux seuls prés de 56% des réserves de l’ensemble des pays de ce forum. Les voies sont simples pour un pays comme l’Algérie qui n’a plus intérêt dans les contrats long termes : Monter des partenariats pour vendre son savoir-faire et lancer les jalons de l’après pétrole, transformer son gaz pour créer de la valeur ajoutée, tenter de s’intégrer dans la distribution du gaz en Europe et surtout vendre là où le prix est le plus haut pour valoriser son gaz et non le brader quitte à le laisser dans le sous-sol.

Présenter donc l’option du gaz de schiste comme un choix entre la peste et le choléra comme fait le gouvernement en place est une simple solution de facilité pour poursuivre dans la voie de l’économie de rente. 

3- La fracturation hydraulique n’a aucun avenir dans le monde

Tous les pays de par le monde ont abandonné ou en voie de le faire l’exploitation du gaz de schiste par la fracturation hydraulique en attendant la mise au point d’autres méthodes. Les Russes ne veulent pas concurrencer leur propre gaz conventionnel, les chinois négocient avec Gazprom leur avenir énergétique, l’Europe, quant à elle peine de trouver un consensus sur cette question. La Pologne continue son exploitation par manque flagrant d’alternative. Entre se soumettre au dictat de Poutine et le gaz de schiste : le choix est évident. En ce qui concerne les Etats-Unis, cette euphorie du nouveau Eldorado n’est qu’une bulle comme celles qui l’ont précédée (Subprimes et Internet) et qui commencent à atteindre ses limites. D’abord par son ravage environnemental qui se généralise dans les Etats qui l’ont permis et dissuadent ceux qui n’ont pas commencé son exploitation par l’imposition d’un moratoire qui est en train de s’élargir de plus en plus dans les Etats américains. Ensuite plusieurs investisseurs dans l’exploitation du gaz de schiste aux Etats-Unis connaissent en ce moment un niveau d’endettement fortement élevés en raison des grosses dépenses mobilisées dans les forages, tandis que les chiffres d’affaires s’avèrent plutôt faibles, a rapporté, début juin, Bloomberg, une agence américaine spécialisée dans l’information économique et financière. Les gisements du gaz et du pétrole de schiste ont atteint le pic de productivité et demandent de nombreux forages non prévus dans les calculs d’investissement et contraint plus de 61 entreprises de cette activité à rentrer dans le cycle infernal de l’endettement comme l’ont été avant eux les propriétaires de l’immobilier. Il faut préciser par ailleurs que les réserves mondiales de gaz de schiste font presque le double de celles du gaz naturel. C’est cet élan qui fait pousser les compagnies américaines, au demeurant pionnière dans ses techniques d’exploitation à vanter ses qualités d’ailleurs en vain. Les Etats-Unis ont par rapport à tous les pays de la planète plus de contrainte d’environnement. L’expérience a montré par le passé que les réserves abondantes même virtuellement sous forme de bluff, influence le marché. Pour rappel, la compagnie Shell n’a-t-elle pas sous-évalué ses réserves de pétrole et de gaz pour falsifier ses comptes comptables ? L’ouverture d’une enquête par le SEC a entraîné le départ prématuré de son directeur du groupe Phillip Watts. BP a triché sur ses réserves en mettant de côté délibérément les cessions forcées .La firme Brésilienne Braspetro a annoncé avoir découvert un gisement géant au large de Sao Polo pour juste augmenter la valeur de ses actions. La Douma russe a voté en 2002 une loi punissant de 7 ans d’emprisonnement toute personne qui divulgue les réserves. L’OPEP triche sur les réserves pour avoir les quotas les plus élevés, donc sur la production. Les experts de l’Aramco ont affiné à 10,15 millions de barils par jour la production du pays en 2011 alors que le ministère de l’énergie du royaume la situe à 13,6 millions de baril par jour en 2010 et 19,5 millions de baril en 2020 et, selon le royaume pour répondre aux besoins mondiaux. En 2003, Téhéran a publié une revalorisation de ses réserves de 35,7% sans citer de nouvelles découvertes. Ce pays a justifié cette revalorisation par l’amélioration du taux de récupération des gisements en place etc. On peut citer de nombreux exemple qui font dire à un expert de la compagnie Total : "Les chiffres officiels des réserves pétrolières et gazières sont loin d’être des données purement scientifiques. C’est le reflet d’un patrimoine financier que les Etats valorisent ou déprécient selon leur intérêt du moment." Donc les Etats-Unis et certains pays européens demeurent viscéralement dépendant du gaz naturel d’autres pays pour leur consommation interne, font de la surenchère avec son potentiel important en gaz de schiste. Ils ont réussi à influencer le marché de gaz. (Baisse des prix, abandon de l’OPEP gaz, découragement des alliances etc.)

Dans le fond, la forte poussée des Verts, les prive de l’exploitation de ce potentiel comme celui du gaz de charbon. L’Algérie qui ne maîtrise pas cette fracturation hydraulique déjà en difficulté n’a aucun intérêt à s’y encombrer opérationnellement et risquer de compromettre les réserves d’eau pour les générations futures. Déjà, elle le fait amplement en soutirant du brut, le vendre contre des dollars qu’elle place à l’étranger au moment même où le pic pétrolier a entamé sa descente.

4- Conclusion

Il faut peut-être préciser que les réserves de gaz de schiste dans le monde révélées par le département américain de l’énergie, ne sont en fait qu’au stade hypothétique. Il s’agit d’une évaluation sur la base des dimensions des pièges qui renferment ces ressources. On ne peut donc vérifier tout cela qu’en procédant à des forages de délinéation pour tester les réserves prouvées et, partant évaluer leur exploitation économique. Ce n’est qu’on mettant sous équation les capitaux engagés face aux cash-flows qu’ils dégageraient qu’on appréciera l’opportunité de la poursuite ou non des recherches, l’exploitation et le développement du gaz de schiste dans le contexte algéries. Il est évident qu’au stade actuel, cette équation dégagera une valeur actuelle nette (VAN) négative jusqu’à ce que la technique de la fracturation hydraulique soit affinée. Ceci n’est certainement pas pour demain. Ces 11 forages autorisés en Algérie pour évaluer ce potentiel sur le long terme sont donc utiles puisqu’ils vont mettre fin à ce débat stérile et qui prend une tournure d’entêtement. Le gouvernement ne veut pas que société civile lui dicte ce qu’il fait ou croire bien faire. De l’autre côté, certains sautent sur l’occasion pour faire pression pour des raisons souvent politiques. Une telle approche ne servira pas la nation. Il faut débattre dans la sérénité. Quant à la France s’il est légitime de tenter de placer ses entreprises pour partager avec les Algériens la croissance dans le secteur des hydrocarbures, elle devra par contre abandonner l’idée de prendre l’Algérie pour un terrain d’expérimentation et un champ de tir. La France a le devoir historique d’intercéder auprès de la commission européenne pour appuyer la cause Algérienne afin de l’aider de passer du statut de fournisseur de matières premières à celui de d’associé dans les opérations de distribution des produits pétroliers et surtout le gaz en Europe. Les investissements consentis par l’Algérie dans le domaine du transport du GN et GNL ne visent-ils pas cela ?

Rabah Reghis, Consultant, Economiste Pétrolier

Renvoi

(03) Voir la revue Stastical Review of World dans sa dernière édition 2013

Lire la 1re partie : Gaz de schiste : la France ne veut pas changer ses lunettes de colon (I)

Plus d'articles de : Analyse

Commentaires (6) | Réagir ?

avatar
adil ahmed

merci

avatar
elvez Elbaz

pierre peant, zâama, sera à alge, invité OFFICILELLEMENT PAR LE MAKHZEN de said bouteflika, le nouveau parrain de cette pauvre algerie. ce journaleux, qui soi disant, zâama zâama, comme dirait l autre, s'est spécialisé dans la dénonciation de dictateurs corrompus, mais ne "pipe"et ne dis pas un "mot" sur les prédateurs de l'algérie qui claniquement gérent par la corruption tout azimuth ce pauvre pays!!!

La saga des ripoux qui auraient "dépouillé" de quelques milliards de dollars, la société nourriciére de l'algérie, SONATRACH, Chekib khelil et son clan présidentiel, comme il le revendiquait en menaçant les journaliste, avant qu il ne soit en "fuite", ne font ils QUE DE LA BONNE CORRUPTION de bougnoules aux yeux de ce "journaleux français" qui semble ne voir la corruption qu'à l'aune des deux poids deux mesures, ou trouve t il son intérêt, comme beaucoup de responsables français, à se taire, dés lors qu il s 'agit de cette pauvre algerie entre les mains du makhzen de said et de son clan?

Ou serait il un éniemme relai français, de cette france qui a fait et fera tout, depuis 1962, pour que l'algérie reste captive d un systéme qui l'enchaîne dans le sous développement, systéme prédateur de l'algerie à qui cette france prête main forte pour que les algeriens ne releveront jamais LA TÊTE devant cette france neocoloniale ;main forte que degaule a prêté à benbella, mitterand à chadli, sarkozy et hollande au makhzen bouteflikiste et de son parrain said?

Ces français tant qu ils tournent autour de l'algérie c'est juste pour aider dans "leurs intéressées tournéees", les maîtres du moment qui tiennent captive l'algérie et les algériens, les privant de développement et de prospérité!

Tout le monde a en mémoire "le conseil de ministres" restreint tenu AU VAL DE GRACE!!

La france neo coloniale éxulte!

Elle ne lâchera jamais l'algérie, ou plutôt SES RICHESSES!!

LA SAGA DU GAZ DE SCHISTE est là pour nous en convaincre, n'est ce pas LAURENT FABIUS?

visualisation: 2 / 6