Désinformation et menace islamiste, Alain Chouet analyse

Alain Chouet.
Alain Chouet.

"Au cœur des services spéciaux, la menace islamiste : fausses pistes et vrais dangers", fruit des entretiens entre Alain Chouet et le journaliste Jean Guisnel est sorti en format poche chez La Découverte.

Le terrorisme est né en pleine guerre froide. Tantôt arme absolue des peuples opprimés, voire de clan sans foi ni loi, parfois moyen de déstabilisation politico-militaire, cet outil de terreur a cependant pris une immense importance dans les préoccupations des services de renseignement. Dans ce livre, Alain Chouet analyse la menace islamiste, plonge dans son origine et brasse largement le cercle d’influence de ce mouvement né il y a un demi-siècle. L'Egypte, le Liban, la Syrie, le Yémen, l'Iran, le Pakistan, les Frères musulmans, Ben Laden, Saddam, Al Assad, Kadhafi, Al Qaida, Aqmi, l'ancien officier du renseignement extérieur français décrypte, avertit parfois et apporte son analyse sur une foule d'événements et de personnages ayant marqué le monde musulman.

Irak. Sur l’intervention de ce pays Alain Chouet est sans concession avec les Américains. "Quand les Américains sont arrivés en 2003, ils ont remis en avant le communautarisme religieux et ethnique en ressuscitant les vieux clivages de l’Empire ottoman. (…) Dans l’idée de pacifier la région à long terme en remodelant tous ces pays, en fonction de l’appartenance communautaire, religieuse ou ethnique de leurs habitants, Washington a réintroduit les ferments de la division et les affrontements civils dont on voit aujourd’hui les résultats dramatiques".

Armes. "Les armes que nous vendons à grand prix aux potentats du Moyen-Orient ne sont pas destinées à servir. Elles sont destinées à rouiller. Ou au mieux à égayer des parades et impressionner la population – Voire à la réprimer. Sur les centaines d’avions de chasse dernier cri que les Américains avaient vendus au Koweït dans les années 1980, un seul a décollé lors de l’offensive irakienne de 1990 contre ce pays". Ces armements vendus aux pétromonarchies "constituent des primes d’assurance que ces pays nous payent dans l’espoir que nous nous précipiterons à leur secours en cas d’épreuve".

Syrie/ Russie. "Pour les Russes, l’équation est plus compliquée. Contrairement à une idée complaisamment répandue, ce ne sont pas les achats d’armes de la Syrie, ni la fameuse « base navale en eau profonde" de Tartous qui les motivent. Les Syriens n’ont jamais payé l’Himalaya de matériels militaires que les Russes leur ont fournis pendant cinquante ans (…) Damas fait valoir que le théâtre syrien constituait une excellente vitrine de promotion des matériels russes et que ce marché devait être considéré par Moscou comme frais de publicité. (…) Plus important pour eux (les Russes) est le souci de ne pas perdre le dernier point d’appui diplomatique et stratégique qui leur permet de rester présent sur les dossiers politiques d’une zone sensible".

Services algériens. "Il y a parmi eux de grands professionnels totalement dévoués à leur mission et qui font remarquablement leur travail. On ne saurait les tenir pour responsables des aléas de la vie publique en Algérie. Ils ont mené et mènent toujours une traque déterminée aux terroristes, au point que le nord de l’Algérie a commencé à devenir irrespirable pour les djihadistes. L’épicentre de la violence s’est donc déplacé vers les confins sahariens et les groupes islamistes de plus en plus rejetés par l’opinion publique se sont criminalisés et professionnalisés. (…) Abdelmalek Droukdel prend la tête du GSPC dans la confusion qui suit l’affrontement Hattab-Sahraoui, et ses « lieutenants », Abderrazak Le Para, Abou Zeid et Mokhtar Belmokhtar. Ce sont tous de vieux chevaux de retour, trafiquants notoires, anciens cadres déserteurs de l’armée passés au banditisme." 

AQMI-El Qaida. "(…) AQMI arrange tout le monde. Les services algériens qui y trouvent bien sûr prétexte à sollicité l’assistance des uns et des autres et à agiter le spectre de la violence si le régime lâchait du lest sur les libertés publiques. L’armée américaine, qui y discerne une justification pour implanter durablement stations d’écoute et conseillers techniques dans la zone. Les médias et le prétendus experts occidentaux qui y trouvent matière à développements vendeurs et juteux. Et surtout les chefs d’AQMI qui vont rentabiliser l’image en termes d’exigences financières. Le prix de l’otage serait ainsi passé de 150 000 euros en 2003 à… 22 millions par tête en 2011."

Dans tout le livre, même si l’on reconnaît une expertise intéressante du monde musulman et du terrorisme qui l’agite, Alain Chouet sera toutefois très discret sur l’action de la France. Même observation concernant les actions de la DST. Ancien membre de la DGSE, l’auteur entretient une certaine réserve et évite même de s’étaler longuement sur ses échecs. En revanche, les interventions américaines sont disséquées, critiquées. Cela dit le propos du livre et son intérêt n’est pas de comparer mais de donner un éclairage sur le terrorisme islamiste et les manipulations qui l’entoure. Décrypter ses idéologues et ses financiers. Son analyse des ressorts du terrorisme est à ce titre intéressante. Reconnaissons-lui également une lecture originale et sincère qui s’écarte largement de la vulgate de la presse française. Les explications concernant l’Iran en sont le meilleur exemple. 

Kassia G.-A.

Au cœur des services spéciaux La menace islamiste : fausses pistes et vrais dangers (Postface inédite). Aux éditions La Découverte.

Alain Chouet est entré au Service de documentation extérieure et de contre-espionnage (Sdece devenue DGSE) en 1972, il a fini sa carrière comme chef de service de renseignement et sécurité. Il est l’auteur notamment de La Sagesse de l’espion.

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Kacem Madani

Services algériens. "Il y a parmi eux de grands professionnels totalement dévoués à leur mission et qui font remarquablement leur travail. On ne saurait les tenir pour responsables des aléas de la vie publique en Algérie »

Evidemment, dans le cas algérien on ne pouvait s’attendre à « meilleur » analyse, tant il s’agit encore et toujours de « l’affaire trucmuche et truc-machin dont on ne retrouve pas l’assassin ! »

Pour nous, les choses sont simples :

L’Algérie a été canalisée de force dans le tunnel de l’intégrisme barbare par les imbéciles qui confisquent le pouvoir depuis ½ siècle.

Trois éléments capitaux sont à l’origine de cette marche forcée vers l’islam et, par voie de conséquence, vers l’islamisme, sa seule et unique résultante :

1) 1962 : Ben-Bella lance à la face des peuples berbères, réputés pacifiques : Nous sommes des arabes ! Nous sommes des arabes ! Nous sommes des arabes ! Enoncé trois fois pour mieux accentuer une certaine spécificité divine, à l’image de la formule qui permet aux « hommes » de rejeter leurs femmes, en toute « hallalitée » en prononçant « talagt, talagt, talagt » avec véhémence et intonation irréversibles, aux allures d’arrêt divin, tout aussi « hallal »!

Traduit en termes politiques, cela veut dire : Nous sommes musulmans ! Nous serons islamistes ! Nous deviendrons terroristes ! Wa dezzou mâahoum !

2) 1977 : Pour accélérer le processus « d’islamisanisation » (clin d’œil à mon ami Saint Augustin, dont la disparition du site m’inquiète) Boumediene remplace le week-end universel par le jour du rassemblement islamique, nous soustrayant, in extenso, du monde qui pense, réfléchit, travaille, et avance.

3) 1989 : Pour parachever la marche forcée vers les ténèbres, Chadli et son parapluie Hamrouche légalisent un parti anticonstitutionnel : le FIS, Fils du FLN et de l’armée algérienne.

La suite tout le monde la connait : Le père, le FIS et « l’armère » s’adonnent à un jeu d’inceste à trois, et accouchent des petits rejetons GIA, GSPC, AQMI et tutti quanti. Et, bien que les géniteurs soient identifiés, à ce jour personne n’en reconnait la paternité ni la maternité. Acculés au statut de bâtards, ce ramassis d’imbéciles se venge en empoisonnant la vie des Algériens depuis ¼ de siècle, encouragés par un président qui se substitue aux parents incestueux. Une main tendue par ci, un pardon par là, et la relation se transforme très vite en affection céleste. Affection qui conduit le Nabot à une surenchère « islamistissime », avec le fameux: « je ne ferais rien qui aille à l’encontre du moindre verset du Coran », réponse donnée à une question sur le code de la famille.

En résumé :

50 ans de mensonges, de pagaille et de gâchis, ca suffit ! Qu’on nous rende l’Algérie, notre pays !

Car, qu’on le veuille ou non, qu’on le comprenne ou non, qu’on l’admette ou non : Nous n’avons jamais été arabes, nous ne sommes pas arabes, et nous ne serons jamais arabes ! Corollaire incontournable : Nous ne sommes pas obligés d’être musulmans !

Que nos dirigeants le confirment, que l’occident l’avalise et tout ira mieux dans le meilleur des mondes, pour nous, pour vous, pour tous !

Quand comprendra-t-on enfin que les peuples algériens, comme tous les peuples du monde, n’aspirent qu’à vivre en paix avec l’humanité, qu’elle se revendique Musulmane, Chrétienne, Juive, Bouddhiste, ou Esquimau, si tant est qu'on nous rende notre identité confisquée!

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laid baiid

Monsieur Alain Chouet, vous montrez que vous êtes toujours un agent en service, vous ne donnez que des demies vérités.

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