Sonatrach-sociétés de gardiennage : un tandem aux saccages récurrents

L'attaque de la base de Tiguentourine en janvier a montré les limites des sociétés de gardiennage.
L'attaque de la base de Tiguentourine en janvier a montré les limites des sociétés de gardiennage.

Chronologie d’un massacre qui ne dit pas son nom !

Dans le sillage du contenu de l’article précédent "État Sonatrach – forces de sécurité : Un couple aux dessous soudés", pour éclairer davantage l’opinion publique sur le sujet, cette deuxième partie complémentaire est surement nécessaire. Le récit qui suit, montre dans les moindres détails la catastrophique application par la direction générale du groupe Sonatrach des dispositions légales relatives au volet "sûreté interne d’établissement", évidemment, des actes de gestion entrepris dans l’insouciance totale, engendrant de fatales pertes humaines, matérielles et financières pour le pays.

Envers la lourde menace terroriste que vivait Sonatrach à partir de 1991, la note n° 462/97-DG du 8 Juin 1997 émise par le directeur général de l’entreprise à l’époque est venue pour mettre en œuvre le décret exécutif n° 96-158 du 4 mai 1996 fixant les conditions d’application des dispositions de sureté interne d’établissement prévues par l’ordonnance n°95-24 du 25 Septembre 1995 relative à la protection du patrimoine public et à la sécurité des personnes qui lui sont liées et les décisions A-491 du 12 mars 1997 et A-287 (R1) du 23 mai 1997 portant respectivement création de la Direction Protection du patrimoine et suppression du poste d’Assistant du Directeur Général chargé des questions de sécurité préventive des postes, structures et/ou activités et personnels liés à la sécurité préventive ou à la sureté interne au sein de Sonatrach, rattachés à la direction protection du patrimoine (DPP).

La suscitée décision, n’a jamais été remise en cause par qui que ce soit au sein du groupe Sonatrach ou de sa tutelle, d’ailleurs les présents patrons du pétrole algérien n’en ont jamais parlé, ni expliqué son contenu dans leurs interventions auprès des médias lourds et la presse ! Dans le début de ce contexte sécuritaire, la direction Ressources Humaines de Sonatrach diffusa une information par note n° 2850/DRS du 24/07/1997 destinée à toutes les structures de l’entreprise Sonatrach portant insertion de la filière «Sureté interne» avec cotations et codifications des 12 fonctions créées pour sa gestion, marquant par la, le premier pas, engageant Sonatrach à gérer et administrer la sûreté interne d’établissement.

Le 12 août 1997, une note référencée DPP n° 350 émanant du conseiller du directeur général, chargé de la protection du patrimoine (poste figurant dans l’organigramme de l’entreprise, occupé par un officier militaire du DRS depuis que Sonatrach existe) est venue dans le souci d’harmoniser la gestion du récent personnel de sureté interne, donnant ordre à ses structures de veiller à sa stricte application, en l’absence de réglementation adéquate pour cet imprévu ! L’instruction en question dont l’objectif est l’assainissement de la gestion du personnel affecté à la protection du patrimoine au sein des détachements de sécurité et de protection de Sonatrach (DSP), car au départ, il a été déjà constaté que de nombreuses disparités dans la gestion du patrimoine humain relevant de la DPP ont vus le jour (recrutement anarchique au niveau central de candidats envoyés par vagues au Sud, indues attributions de poste de travail à des agents de sureté interne loin du profil exigé, etc.)

Afin d’y remédier et de mettre un terme aux écarts intolérables, des instructions d’harmonisation de toutes les démarches concourant à cette gestion disparate ont été communiquées aux structures Sonatrach pour être respectées en attendant que soient définis les pouvoirs attribués aux différents niveaux hiérarchiques de cette nouvelle structure. Dans l’immédiat il a été dicté par ledit conseiller à la sécurité de l’entreprise en solo, la procédure à suivre pour tout recrutement de personnel, le positionnement et la rémunération adéquate, la manière du renouvellement et/ou de résiliation des contrats à durée déterminée (contrat d’une année), l’attribution des indemnités et primes spécifiques de port d’armes liées à l’activité de sureté interne. La DRH de Sonatrach se contentait à observer de loin la chose !

Devant l’absence de réglementation émanant de la direction générale de Sonatrach régissant cette nouvelle filière, le directeur général adjoint de la Branche hydrocarbures décida de créer une réglementation pour ce corps, concevant à son niveau une directive référencée n° 284/98-HYD du 29 Décembre 1998 portant conditions de sélection et de recrutement des agents de sureté interne en référence au règlement de ce corps établi le 1/09/1998, ou il est dit que l’effectif pour chaque poste de travail dans la dite filière, est fixé par le plan de sureté interne (PSI) décidé par la direction de l’entreprise, validé par le wali pour chaque site à protéger.

Dans cette autoritaire directive, il a été demandé aux directeurs régionaux relevant de la Branche hydrocarbures, de veiller à ce que le personnel de sureté interne provienne des régions du pays les plus diverses, dont le niveau académique requis au minimum est la 4éme année moyenne ou 9e année fondamentale, ou avoir un grade inférieur à sergent des services de sécurité, l’âge requis pour les candidats a été situé entre 25 et 35 ans.

Le personnel sélectionné devra faire l’objet d’une demande d’habilitation formulée par toute direction régionale Sonatrach (l’employeur) à la wilaya. Le recrutement ne pourrait être réalisé qu’après habilitation par les services de sécurité de wilaya territorialement compétente.

Une confuse réglementation en plus à Sonatrach, mais vite foulée aux pieds sans crainte par son concepteur et les clans autoritaires et managériaux qui gravitent dans son environnement, pour que tous continuent de recruter par affinité familiale, amicale, syndicale, etc. Poussée à la réaction pour stopper l’hémorragie de gestion de ce nouveau corps de sécurité à Sonatrach, la direction des ressources humaines (DRH) a réagi à son tour en élaborant une circulaire d’application n° 2.06 du 17 mars 1999 portant dispositions régissant le recrutement à Sonatrach en général et particulièrement, le cas des agents de sureté interne, ouf, enfin ! De nouvelles précisions ont été édictées, il a été dit que compte tenu des missions de sureté interne, le recrutement du personnel de cette activité devait impérativement s’opérer conformément aux dispositions principales ci-après :

- Les besoins en recrutement sont définis par le plan de sureté de chaque site (pour arrêter l’envoi en continu de personnel par vagues de 10 à 20 agents à partir du siège de Sonatrach)

- Le recrutement se fait dans le cadre d’un contrat à durée déterminée (une année)

Les candidats au poste d’agent de sureté doivent : présenter une aptitude physique et avoir une formation ou un grade approprié leur permettant d’accomplir convenablement les tâches inhérentes à la sureté interne, avoir accompli leurs obligations vis-à-vis du service national ou servi pendant au moins cinq ans dans les rangs de l’ANP et/ou des services de sécurité relevant des ministères de la Défense et de l’Intérieur (recrutement massif de retraités des corps constitués- double paie !), avoir satisfait impérativement à l’enquête sécuritaire d’habilitation et aux examens médicaux, la formation, le grade et l’âge requis pour chaque poste sont arrêtés conjointement par le service de sureté interne de l’entreprise et le DRH de la branche d’Activité (Dérive de classification entre les différentes régions, excluant le droit du mérite à la promotion !)

Il a été décidé aussi qu’aucun contrat ne saurait être renouvelé pour les travailleurs ayant atteint l’âge légal de la retraite 60 ans, et il a été demandé à l’ensemble des structures de veiller au strict respect de ces dispositions (Des assistants de sureté interne –ASI, ont été recruté dans les corps constitués, alors qu’ils devaient être des agents permanents de SH…)

Cependant, sur le terrain, la gestion du dossier «Sûreté Interne d’Établissement» par les entreprises du groupe Sonatrach au nord comme au sud, a dérapé fatalement surtout sous la force de durs groupes de pression, drapés dans l’habillage de sociétés privées de sécurité et de gardiennage, chacune constituée sous la forme juridique qui lui convient (!)

L’apparition de sociétés nationales privées de sécurité et de gardiennage

Devant la fuite injustifiée et délibérée du management de la tutelle et du groupe Sonatrach à prendre la gestion de la sureté interne d’établissement comme le prévoient les lois et réglementation citées plus haut, une multitude de sociétés nationales privées de gardiennage (de droit algérien) a vu le jour sous le décret législatif n°16-93 du 4 décembre 1993 relatif à la création de société de sécurité et de gardiennage, prévoyant expressément que l’activité de sécurité est exercée exclusivement par des personnes de nationalité algérienne, sociétés constituées en général, par d’anciens hauts gradés militaires en retraite.

Une telle opportune et incorrecte situation d’externalisation d’une partie de l’activité sécurité de Sonatrach, arrangea idéalement les managers des entreprises du secteur, pour ne pas avoir à gérer les armes et munitions, et pour pouvoir continuer à recruter dans l’excès et dans la complicité clanique, des gens de leurs connaissances en dehors de tout reproche.

Ainsi Sonatrach commença à partir de 1997 à confier la sécurité et le gardiennage des sites pétroliers et gaziers à ses premiers contractuels agents de sureté interne (des gardes sans armes !), structurés dans des détachements régionaux de sécurité du patrimoine. En outre, dans certains lieux Sonatrach en effort propre et dans d’autres en association avec les partenaires étrangers, les tâches de sureté interne ont été confiées à des sociétés privées de sécurité et de gardiennage constituées comme l’exige le décret législatif de 1993.

Le 13 juin 2005, Sonatrach procéda à la signature d’une convention-cadre à Alger en présence de son PDG avec des sociétés de sécurité et de surveillance, pré-qualifiées dans le cadre d’un appel d’offre. Il s’agit de Himaya Plus – Vigilance – SPAS - 2SP – PGS – Sécur - Sécurité 2000.

Il a été décidé que les Activités du groupe Sonatrach en effort propre ou en association, qui exprimeront le besoin de faire appel aux services de l’une des sociétés prés-qualifiées, procéderont directement à l’organisation de la phase d’ouverture publique des offres commerciales, pour retenir la société qui présentera l’offre «la moins disante». Ainsi commença l’histoire et l’épanouissement nuisible du règne des négriers au sud, et l’enrichissement illicite à grande échelle des barons de l’emploi dans notre pays, pourtant les Wali avaient toute la force de loi pour y remédier à temps, les textes de lois le prouvent !

L’irruption de sociétés privées internationales de sécurité de gardiennage

Le laxisme managérial aidant, les expatriés ont réussi à imposer de leur côté que soit opérationnelles pour leur sécurité sur sites, des sociétés étrangères privées de sécurité et de gardiennage structurées en OLC (opérations-liaisons-coordinations), dont certaines d’entre elles, ont même lancé des consultations de marché exclusivement à l’international pour assurer cette prestation en Algérie et ce, en violations des textes de lois cités plus haut … !

Pourtant, les OLC sont des postes de travail relevant de la sécurité des sites pétroliers et gaziers qui ne peuvent être exercées que par des sociétés algériennes selon la réglementation prévue à cet effet. BP, Repsol, Statoil, etc., ne peuvent pas ignorer les lois algériennes en matière de sécurité des sites ! Pourquoi les représentants de Sonatrach dans les paritaires comités de gestion (CDG) des groupements et des Organes d’opérations conjointes (OOC), ont laissé les managers expatriés violer les lois algériennes à leur guise ?

À titre indicatif, les OLC sont composées d’anciens marines et agents des différents corps de sécurité étrangers, espions, des anciens de l’Afghanistan, etc., à qui est demandé surtout, d’avoir une expérience dans les services de sécurité ou militaire et être titulaire de CV étoffé de hauts faits d’armes. Un agent OLC est payé au minimum à plus de 200 millions de centimes/mois. Ce sont en général, des retraités étrangers venus pour se faire des fortunes et du tourisme nostalgique sur les vastes dunes du désert. Un petit détail, les banques qui les payent sont implantées dans des paradis fiscaux ! L’onéreuse suite est facile à deviner.

L’arrivée de la débâcle et le sauve-qui-peut !

A cette ruineuse situation décrite, une débâcle nationale sans précédent s’en est suiviet, cannibalisant la politique de l’emploi au sud comme au nord, faisant aboutir la situation aux monstrueux problèmes que l’on connait : Des destructions des biens publics par des chômeurs en furie sont enregistrées quotidiennement dans pas mal de wilayas.

A cette scandaleuse gestion du dossier de sureté interne d’établissement par les entreprises du groupe Sonatrach, aidées dans leurs nuisibles actions par les sociétés pétrolières internationales dont BP et Statoil, qui ont transgressé les lois algériennes dans le domaine de sécurité et de gardiennage des sites pétroliers en association, maintenant devant de graves faits, même les mesures draconiennes prises récemment par le Gouvernement en faveur de l’emploi au sud, pour retenir et apaiser la colère des chômeurs, ne pourront rien y changer.

Effectivement, le décret législatif n°16-93 du 4 décembre 1993 exige que la création de société de sécurité et de gardiennage soit de droit algérien, et prévoit clairement que l’activité de sécurité soit exercée exclusivement par des personnes de nationalité algérienne ; des éléments fondamentaux ignorés par les managers des entreprises du secteur et les partenaires de Sonatrach constitués en Groupements et OOC pour ce qui est de l’activité de sécurité.

A ce rythme négatif, il semble que lesdits managers et leurs patrons, ne semblent nullement inquiétés par les répétitifs viols en continu commis envers les lois et réglementations ci-dessus étalées, en recourant à des sociétés étrangères de sécurité et de gardiennage pour assurer des missions de sécurité en Algérie, et à quels prix ?

Quelle indemnisation pour les victimes des actes terroristes ?

Enfin, si l’on s’amusait à parler des montants des contrats passés entre les entreprises du secteur et les sociétés nationales et internationales de gardiennage, alors le mot de la fin sera inévitablement, bonjour les dégâts ! Sachant que le transport sous escorte armée par une société privée de sécurité, d’une cargaison de produits chimiques dangereux et toxiques par un camion (une vingtaine de fûts), du port de Annaba à Hassi Messsaoud, revient à plus de 47 millions de centimes (Utilisation d’un camion + un véhicule léger avec chauffeurs armés).

Quant à l’indemnisation des pertes en vies humaines et des installations détruites et endommagées par l’utilisation des armes pour la neutralisation du groupe terroriste assaillant de Tiguentourine, elle sera à nos risques et périls, car lesdites installations n’étaient pas assurées contre ce type de risque. Qui est responsable de ce fait managérial, omis ?!

Au fait, pourquoi Sonatrach et ses partenaires étrangers en passant des contrats d’assurances pour les sites pétroliers et gaziers s’élevant annuellement à des centaines de millions (plus de 650 millions dollars US) avec des compagnies internationales d’Assurances, n’ont jamais pensé à inclure la clause du risque terroriste depuis les années quatre vingt dix ?

Motus ! Motus ! Alors, parle et meurs, comme dit feu Tahar Djaout.

M. Lefhel

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Commentaires (4) | Réagir ?

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walid crsic

Il a été décidé aussi qu’aucun contrat ne saurait être renouvelé pour les travailleurs ayant atteint l’âge légal de la retraite 60 ans

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uchan lakhla

A lire : <a href ="http://www. 3-dz. com/des-marines-us-en-espagne-en-prevision-de-troubles-majeurs-en-algerie/" target="_blank"> Des Marines US en Espagne, en prévision de troubles majeurs en Algérie</a>, on racontait qu'un voyous proxénète ayant fait les pires action de sa vie, en fin de vie, décide de se mettre à la prière et part voir l'imam pour apprendre à utiliser le chapelet, et l'imam de lui dire, en faisant tourner les billes du chapelet tu dis "c'est trop tard, c'est trop tard, c'est trop tard... "

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