Pourquoi le ministre de l’Energie souffle-t-il le chaud et le froid ? (I)

Youcef Yousfi
Youcef Yousfi

Interrogé le lundi 2 décembre au cours d’une séance de questions orales à l’assemblée nationale relative à la chute de la pression du plus grand gisement d’Algérie de Hassi R’mel, le ministre de l’énergie et des mines tentait implicitement d’avouer (d’où le drame) un secret de polichinelle de la baisse de pression de ce champ. Le lendemain, il accorde une interview au quotidien arabophone Echourouk pour rassurer l’opinion publique sur le rétablissement des réserves du pétrole et du gaz.

Selon Youcef Yousfi, les nouvelles découvertes ont permis d’augmenter de 2 milliards de barils les réserves actuelles. Rappelons par ailleurs que la statistacal review of world energy de BP les estime à 12,2 milliards de baril. Quant aux nouvelles découvertes des gisements gaziers, elles restent de l’ordre de 300 à 400 milliards de m3 qui s’ajouteront aux 4500 milliards de m3.Par ailleurs, la production vacille entre 1,2 à 2 millions de barils par jour et donc en dessous du quota permis par l’OPEP qui est lui de l’ordre de 2,2 millions de barils par jour. La production du gaz toute forme confondue serait de l’ordre de 50 milliards de m3, très loin de l’objectif de 85 milliards que promettait son prédécesseur. A travers l’annonce de 3 nouvelles découvertes la semaine d’avant en Libye, il rassure d’une manière tangentielle que tout va bien dans ce pays malgré les événements en cours. Le 26 octobre dernier, il avait annoncé la découverte d’un gisement géant au prolongement du champ de Hassi Messaoud dont les réserves seraient de l’ordre de 1,3 milliards de barils. Auparavant, à la rentrée, il avait déclaré que les réserves d’hydrocarbures pourraient doubler d’ici 10 ans. Il reconnaît dans cet entretien que la crise économique mondiale a affecté les exportations des hydrocarbures vers l’Europe. Pourtant, c’est ce même ministre qui est venu en février dernier alerter l’opinion publique sur l’excès de la consommation interne en gaz et essence dont la tendance devrait être immédiatement redressée si l’on ne veut pas se retrouver d’ici une décennie importateur net, et avec quoi ? Il a même justifié cela par le recours à toute autre forme d’énergie possible d’être exploitée et développer en Algérie y compris le gaz de schiste. On constate donc que quelque fois il inquiète d’autre fois il rassure mais dans les deux cas de figure on reste très loin des vraies préoccupations en matière de conduite stratégique des ressources énergétiques en Algérie. Quelles sont justement ces priorités ? Pour bien les identifier encore faut-il évacuer les détails qui les encombrent entre autre cette problématique de la baisse de production. 

1- la baisse de pression du gisement de Hassi R’mel date du début des années 2000.

Le gisement de Hassi R’mel est l’un des plus grands gisements de gaz à l’échelle mondiale. Il a une forme d’ellipse qui s’étale sur plus de 3500 km: 70km du nord au sud et 50km d’est en ouest, il se situe à une profondeur de 2200m, la capacité du gisement est de l’ordre de 3000 milliards mètre cubes récupérables soit près de 67% de toutes les réserves du gaz Algérien. Outre le gaz naturel, ce gisement contient du Gaz du Pétrole Liquéfié (GPL) et du condensat, une espèce de gazoline liquéfiée mais instable. Le premier puits (HR1) a été réalisé en 1956 à une profondeur de 2132m avec une pression de fond de 310 bars. Les études de réservoir du début de l’exploitation de ce gisement ont montré les performances suivantes des éléments associés au gaz naturel de ce géant : pour chaque m3 de gaz soutiré, on a environ 200 g de condensat et 80 gramme de GPL. Avec l’évolution des techniques du reservoir engineering ajouté au nombre important des puits forés dans la région, il s’est avéré que ce gisement est enrichi par un anneau d’huile qui l’entoure plus particulièrement dans les parties Est et Sud. En général, et pour faire court, les éléments (GN, Condensat et GPL) récupérés des puits sont collectés et envoyés dans des MPP (module processing plant) qui sont simplement des stations de traitement du gaz pour le rendre d’abord transportable ensuite commercialisable en le débarrassant de ses impuretés diverses. Une fois traités et séparés, les liquides vont être collectés dans des CSTF (central storage and transfer facilities) puis rejoindront Arzew par les oléoducs 28 et 24 pouces. Le gaz naturel quant à lui rejoindra les autres gaz venus des autres champs dans le centre national de dispatching gaz pour leur répartition en fonction de leur destination qui sont au nombre de six : la production de l’électricité, les usines de liquéfaction d’Arzew et de Skikda, le gazoduc desservant l’Italie par la Tunisie, celui alimentant l’Espagne par le Maroc ou éventuellement les stations de compression ou de réinjection situées à Hassi R’mel même. La dernière part est réservée à l’usage domestique et industriel du pays.

Quel est donc exactement le problème de ce gisement en particulier et qui touchera tôt ou tard la plus part des autres gisements mis en production avant et juste après l’indépendance de l’Algérie ? Tout puits débite sous l’action de la différence de la pression du gisement (de fond) et celle qu’on lui fait subir par la colonne hydrostatique. Il se trouve que le gisement de Hassi R’mel comme celui de Hassi Messaoud voire même celui de In Amenas font partie des réservoirs qui ont plus de 50 ans d’âge et qui ont fait l’objet d’un profil de soutirage intensifié d’abord par les compagnies Françaises puis une reprise en main par sonatrach après les nationalisations de février 1971 dans les conditions…disons pas facile. Conséquence : ces gisements commencent à se fatiguer. En terme technique, cela veut dire que le gisement perd de sa pression. C’est une situation tout à fait normale qui peut arriver partout dans le monde puisque techniquement on peut y remédier (récupération secondaire et tertiaire, injection de gaz ou de liquide etc.). Pour le cas particulier de Hassi R’mel, tous les modules de traitement sont conçus de telle sorte que le gaz leur arrive à une pression minimale de 100 bars, désormais, le vieux champ ne l’assure plus. Dans ce cas deux solutions s’offrent : soit accepter une diminution de débit et donc de quantité soit booster le refoulement dans les stations de traitement. L’importance des exportations des hydrocarbures dans l’économie algérienne élimine de facto la première pour qu’effectivement un vaste programme de boosting de la pression a démarré en 2003 pour s’étaler jusqu’au 2020. Ce programme qui s’effectue en deux phases comprend le forage d’uns soixantaine de puits et l’installation de plusieurs turbocompresseurs pour ramener la pression à 102 bars. L’évaluation globale de ce projet devrait se rapprocher avec les surcoûts du milliard de dollar. Ces charges viennent s’ajouter à celles de la maintenance du champ (work over). Lorsque le prix du million de BTU (1) indexé à celui du baril se situait entre 10 et 15 dollars, ces frais sont vite absorbés, il se trouve que le vieux champ, plus on lui donne plus il en demande et les mutations actuelles du marché gazier ne le permettent plus et la question de la rentabilité de ce gisement commence à se poser sérieusement. Quelles sont justement les contraintes dues à ces mutations ?

Rabah Reghis Consultant, Economiste Pétrolier

Renvois 

(1) British Thermal Unit : unité de transaction qui équivaut 253 calories ou 0,294 watt/heure

Lire la suite: Pourquoi le ministre de l’Energie souffle-t-il le chaud et le froid ? (II)

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Commentaires (8) | Réagir ?

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adil ahmed

merci

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Simply

Selon un quotidien Algérien en ligne (voir lien ci-dessous), Sonatrach lance l'exploitation de ses réserves TIGHT. le terme "Tight", qui signifie gaz de schiste et pétrole de schiste, est utilisé, pour tremper et arnaquer les Algériens.

Le mistre de l'énergie souffle le chaud et le froid, car le royaume des harkis et à leur tête le nain (le régime illégitime Algérien, que la France a placé en Algérie, la veille de l'indépendance), a décidé le lancement de l'exploitation des gisements de gaz de schiste, sans tenir compte du présent même et de l'avenir des Algériens, des générations futures, malgré les avertissements alarmants de tout ce qui compte parmi les Algériens en Algérie et à l'echelle internationale, malgré les conséquences et les dangers extrêmement graves signalés, pour la vie, le climat, l'eau des nappes phréatiques et les séismes. Ces séismes changeront en profondeur la configuration géologique du sous sol, ce qui aura pour conséquence la réduction de la production des puits actuels et le risque de rendre impossible leur exploitation, pour des raisons techniques et de rentabilité économique. Ce sera l'au-delà immédiat pour le peuple Algérien. Tout cela à cause du rauyaume des harkis qui exécute les plans criminels de vengeance de la France.

Selon plusieurs témoignages de personalités Algériennes très importantes, publiés sur le web, cette décision du royaume des harkis a été ordonnée par la France, qui les a placée et qui les contrôle depuis 55 ans. Curieusement, la venue du 1er ministre Français en décembre 2013 n'est pas innocente, comme l'a été celle de Holland en décembre 2012, qui a donné lieu à une trahison majeure du royaume des harkis, qui a autorisé le survol du territoire nationale par les avions militaires Français à des fins néocoloniales. Il faut garder l'oeil et le bon sur ces visites, à l'approche des élections présidentielles, au détriment des intérêts vitaux et majeurs du peuple Algérien. L'Algérie n'a pas besoin de la France, qui est en faillite économique et qui ne réfléchit plus par elle-même depuis deux decennies, comme en témoignent tous les événements qui se succèdent en Afrique.

Lien de la source : http://algeriepatriotique. com/article/hydrocarbures-lalgerie-lance-l-exploitation-de-ses-reserves-tight

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