L'enjeu de l'avenir

L'enjeu de l'avenir

« Je renouvelle donc, ici, mes propositions de révision constitutionnelle pour doter le pays d’un pouvoir politique extirpant à jamais les germes de cooptation et de reconduction du pouvoir personnel par le biais du seul garde-fou républicain au despotisme d'aujourd'hui et de demain : I’équilibre constitutionnel des pouvoirs de l’État». Cette déclaration datée du13 janvier 2005 est signée par un ancien ministre et membre influent de l'ex «conseil de la révolution » . Cette analyse, faite par un haut dignitaire parfaitement avisé des regles du sérail, révele plusieurs vérités qui bien que connues pour l'essentiel, gagnent à etre répétées. Le Pouvoir personnel a été érigé en systeme qui a paralysé la vie politique de notre pays. Ce systeme, fondé sur le Parti unique , au lieu de s'effondrer a démontré sa capacité de résistance et de nuisance. Le FLN était considéré comme la panacée par les barons du systeme qui voyaient en cette structure un élément clé indispensable à sa survie. Il n'était pas question , et cela a duré de 1962 a 1988, autrement dit aussi longtemps que cela fut possible, d'ouvrir le champ politique au multipartisme. Ce qu'il convient de dire c'est que le FLN n'a pas eu, sauf , et encore durant les années Chadly, l'influence que certains tentent de lui donner. LeParti unique n'a jamais su regrouper autour de lui toutes les énergies qui lui auraient permis de constituer un moteur dynamique dans le développement de l'Algérie ainsi que cela avait été envisagé en 1954. Les résultats, malheureusement éloquents, nous démontrent non pas l'échec mais les échecs répétés dont aucun responsable n'a su tirer les lecons. Et puis il y a l'Armée qui se dit « Nationale et Populaire» héritiere de l'Armée de Libération Nationale. Une Armée qui a confondu son role avec celui des Politiques et qui n' a jamais eu la moindre hésitation lorsqu'il a fallu se débarrasser d'opposants turbulents. En 1962, déjà, la révolte grondait et l'euphorie d'une Indépendance cherement payée s'est vite transformée en lutte fratricide. Le FLN avait il les moyens de ses ambitions? J'entends par là, y avait il des Hommes responsables et capables d'envisager un programme cohérent de développement. Le FLN n'a t il pas été lui aussi phagocité par une opposition impossible à juguler car trop puissante? En un mot, le FLN, organe politique au statut ambigu, n'a pas pu résister aux assauts et aux appétits voraces qui se sont concrétisés en commettant un coup de force en 1965. L'impatient Ben Bella, assoifé, comme tant d'autres, de pouvoir, dut donc laisser les commandes aux commandants qui se sont empressés d'affirmer, par un euphémisme naif, qu'ils avaient procédé à un « réajustement révolutionnaire». J'avoue que Ben Bella n'avait pas la carrure de l' Homme d'Etat que fut son successeur . Le probleme est que Houari Boumedienne fut tres vite emporté lui aussi par une machine extremement complexe qui s'est mise à broyer et à détruire toute vélléité de changement et surtout toute tentative d'évolution. Il y avait comme un sentiment jouissif, je dirais meme pervers, à faire perdurer la « tension révolutionnaire» en faisant croire que la guerre n'était pas finie. Pourtant, l'Algérie était indépendante depuis juillet 1962 . La France était « battue », disaient nos «responsables ».Mais que faire lorsqu'il n'y a plus personne à combattre? Le nouvel ennemi fut rapidement trouvé en Ben Bella vivante incarnation du Pouvoir personnel,« facteur bloquant de la vie politique en Algérie». « UN SEUL HEROS LE PEUPLE» était le slogan à la mode et recouvrait ( on le voit encore parfois) les murs d'Algérie comme pour affirmer une vérité à laquelle personne ne croyait. Et que dire de ce silence inquiet de la «Société» lassée des querelles intestines, de cette mise en coupe réglée des médias qui ne pouvaient qu'interpréter une partition mal écrite. L'auteur, dont les qualités intellectuelles sont incontestables, disait : «La presse — dont je salue le combat pour la liberté d'expression et le courage de ses journalistes — rapporte chaque jour des faits édifiants de contestation et de résistance de la population et de ses organisations ». Je retiens cet hommage, quoique tardif, à une corporation qui a payé un tribut exhorbitant qui va au delà de ses prérogatives. J'objecterai toutefois en faisant remarquer, qu'à l'instar du Parti Unique, les décideurs ont verrouillé le socle médiatique sur lequel il tentent à présent de s'appuyer. En conclusion d'une réflexion que je laisse ouverte, je m'étonne que depuis 1962 personne n'ait été en mesure de faire naviguer le «bateau Algérie». Etaient ce les commandants qui faisaient défaut, l'équipage composé d'Algériens fiers d'etre indépendants, les moyens matériels et financiers (le Monde entier était à nos pieds), les ressources naturelles encore intactes, l'agriculture aux mains de fellahs aguerris? . Il ne s'agit pas d'etre fataliste en invoquant une malédiction liée à une justice immanente. Les idéologies les plus radicales, les plus opposées ont été testées sans tenir compte de la réalité sociologique des Algériens considérés comme des mineurs . «Les mineurs», aujourd'hui, sont majoritaires et ont les moyens de se libérer pour construire un Etat moderne, fort et respectable et respectueux de chacun . Ne pas en tenir compte en s'enfermant dans une tour d'ivoire c'est entretenir une illusion dont personne n'est dupe.

elMenfi 2009

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Commentaires (22) | Réagir ?

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Berkai

Merci Elmenfi pour cette contribution que je viens de lire.

Quand on lit les commentaires de Mr chelabi, Inas et Sedoki on dirait qu’on est dans une halaka à la mosquée. Au XIXéme siècle, il y a encore des gens qui vivent avec des vérités absolues en tête. Mais dites-moi qu’est ce que vous lisez ? Ou vivez-vous ? Comment pouvez-vous débattre avec des gens qui pensent autrement et qui n’admettent vos vérités ? Je ne crois pas que vous pouvez accepter la difference.

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Racho

Monsieur El Menfi,

Le coeur et l'esprit se rejoignent, et c'est tant mieux, parce que la réalité nous dépasse,

c'est pourquoi il ne faut pas écarter du revers de la main les poncifs, car dans un pays comme l'Algérie ils deviennent, plus souvent qu'autrement) signifiants.

Je considère que votre démarche et celles de nombreux intervenants

dans ce sîte, participent à l'élévation du débat et contribuent

au dévérouillage du champ médiatico-politique. L'espoir est donc permis, malgré le cahos et

ses conséquences (Harragas, la paupérisation, et les multiples dysfonctionnements institutionnels. .

Cordialement

Racho

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