Egypte : un mort dans des heurts à l'université Al Azhar

Manifestations violentes et répression aveugle émaillent le quotidien cairote sous le régime militaire.
Manifestations violentes et répression aveugle émaillent le quotidien cairote sous le régime militaire.

Un étudiant égyptien a été tué et quatre autres ont été blessés samedi dans des affrontements entre forces de l'ordre et partisans des Frères musulmans sur le campus de l'université Al Azhar, au Caire, rapporte la presse officielle.

Cinq personnes avaient été tuées la veille au cours des manifestations organisées après la grande prière hebdomadaire au surlendemain du classement de la confrérie parmi les organisations "terroristes". Selon le quotidien gouvernemental Al Ahram, les affrontements de samedi ont éclaté lorsque les forces de l'ordre ont tenté de disperser des étudiants qui bloquaient l'entrée de salles d'examen. Aux tirs de grenades lacrymogènes, les manifestants, retranchés derrière des pneus enflammés, ont riposté par des jets de pierres.

Les images de télévision montrent une fumée noire s'élevant au-dessus de la faculté de commerce. Selon le commentateur, des "étudiants terroristes" ont par ailleurs mis le feu à la faculté d'agriculture. Selon le ministère de l'Intérieur, 101 étudiants ont été arrêtés pour possession d'armes artisanales telles que des cocktails Molotov. Le calme est ensuite revenu et les examens ont pu avoir lieu normalement.

Dans une déclaration, les Frères musulmans ont condamné la "répression violente des manifestations estudiantines" en qualifiant le déploiement de forces de sécurité sur les campus universitaires de tentative du pouvoir de "réduire au silence toutes les voix de l'opposition".

Des sources sécuritaires ont confirmé le chiffre, cité dans le communiqué de la confrérie, de neuf étudiants d'Al Azhar tués lors d'affrontements avec les forces de l'ordre depuis la rentrée universitaire en septembre. Les partisans de Mohamed Morsi, le président élu issu des Frères musulmans que l'armée a déposé le 3 juillet, sont mobilisés depuis plusieurs mois sur le campus de l'université Al Azhar, qui fait autorité dans l'islam sunnite.

Plus de 250 partisans des Frères ont arrêtés vendredi en vertu de la nouvelle disposition qui fait de la confrérie une entité terroriste.

Des milliers d'autres ont connu le même sort depuis le 3 juillet et le gouvernement mis en place par l'armée semble décidé à poursuivre sur la voie de la répression jusqu'à la tenue du référendum constitutionnel prévu le mois prochain, en préalable à de nouvelles élections.

Evoquant l'inscription parmi les mouvements terroristes, Human Rights Watch a dénoncé samedi une mesure "à caractère politique" destinée à mettre fin à toutes les activités du mouvement islamiste.

"En pointant à la hâte la confrérie du doigt sans enquête ni preuves, le gouvernement semble motivé uniquement par le désir d'éradiquer un mouvement d'opposition majeur", a déclaré Sarah Leah Whiston au nom du mouvement de défense des droits de l'homme dont le siège se trouve à New York.

Selon une estimation prudente, 1.500 personnes ont trouvé la mort depuis le renversement de Mohamed Morsi. Il s'agit essentiellement de partisans des Frères, dont plusieurs centaines ont été tués le 17 août par les forces de l'ordre lors de l'assaut de la mosquée Al Fateh. Attentats et fusillades ont par ailleurs coûté la vie à 350 membres des services de sécurité.

Dans un entretien publié samedi par le quotidien panarabe Asharq al-Awsat, Mustapha Hidjazi, conseiller du président par intérim Adli Mansour, dit ne pas croire au rétablissement de l'état d'urgence, même si les violences se poursuivent. Il a été levé en novembre, trois mois après avoir été instauré pour faire face aux troubles liées à l'éviction de Mohamed Morsi.

Jean-Philippe Lefief et Jean-Loup Fiévet pour le service français pour Reuters

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