L'Algérie du balai

Une tradition qui s'est perdue...
Une tradition qui s'est perdue...

L’Algérie du souverain pontife dont l'indépendance est quinquagénaire prend le balai pour nettoyer les rues de ses manifestants qui salissent l'ordre et obstruent les services publics, donne un coup de chiffon nationaliste pour la transparence des urnes et se prémunit des épidémies du "guide extérieur"...

"C’est l’Algérie libre et souveraine qui construit sa démocratie. Elle n’a pas besoin de guide extérieur qui use parfois de la démocratie et des droits de l’homme à des fins de pression et de chantage", a affirmé le président de l’Assemblée populaire nationale (APN).

La fragmentation de cette assertion donnerait ceci :

"C’est l’Algérie libre": L’Algérie dont l’indépendance est aujourd’hui quinquagénaire n’a pour "plan d’action" de son gouvernement que les travaux publics, l’eau, l’électricité, le pain à assurer durant le ramadhan et les jours normaux, la pomme de terre, la carotte et la bâton, des bennes à ordures et des logements "publics locatifs" à construire sur des terres agricoles, des Algériens de la consommation qui attendent impatiemment ces offrandes décidées par l’aumônier en chef, qui fait, enfin, après tant d'attentes, espérées, inespérées, un geste  salvateur pour cette "Algérie libre" afin que :

- les enfants ne meurent pas d’inanition et chantent "Qassamen" à trois par chaise dans des écoles délabrées

- les femmes lancent des "youyous" à la télévision nationale friande de ces scènes de relogement festives comme au temps des premiers jours de cette Algérie pas tout à fait "libérée"

- les services publics deviennent des lieux "non publics" mais des édifices à la gloire du citoyen "libéré" des tracasseries de guichets

- cette "Algérie libre et indépendante" ait un peu plus de trois mois de susbsistance en blé dur et tendre et qu’elle assure les moyens de sa dépendance alimentaire 

- la pomme de terre, la carotte et le bâton, soient désormais disponibles dans des marchés de proximité, "libérés" de l’informel mais pas de la corruption qui, elle, est formelle

- la Grande mosquée des ablutions collectives consolide par ses fondations parasismiques "l'indépendance nationale" d’un pays malade de sa religion et, qu’enfin, l’aumônier en chef puisse savourer le spectacle affligeant d’un peuple l’acclamant pour lui avoir assuré une subsistance sans saveur, sans le sel de la "liberté"

"L’Algérie souveraine" : le souverain qui la proclame ainsi a "instruit" son nouveau gouvernement pour des opérations urgentes de "nettoyage". Le mot, sorti de l'outre du pouvoir, est suspect. La souveraineté passerait-elle par des opérations "mains propres", rues passées au balai, nettoyées des marches et des protestations, élections "propres" et "transparentes" comme de l'eau de roche, "corruption propre" afin que tout soit lisse, immaculé, ciré, badigeonné, aucun chat de gouttière, aucun rat d’égoût d’ici la révision de la constitution qui promet un clergé pour "moraliser" la citoyenneté et des scribes recrutés parmi les "repentis" de l’amnistie générale.  Cette Algérie souveraine qui n’a pas de justice, tord le cou à la démocratie, fait de l’Etat et de ses composantes législative, judiciaire et/ou exécutive, un pouvoir inique, clanique, de rapine, de passe-droits ; un "système" qui ne répond à aucune critique politique mais sort le révolver, le couteau, la hache, le fusil à canon scié dès que l’on cherche à fouiller dans ses poubelles. Un pays "libre" n’est pas synonyme d’un pays "souverain".

"L'Algérie qui construit sa démocratie": la démocratie est-elle une possession particulière ou un principe universel? Le possessif "sa" au lieu de l'article défini "la", poliquement justifié comme une conquête du monde moderne, fait de cette "démocratie" en construction et donc fragile, une possession arbitraire qui peut être conjuguée à toutes les personnes "ta", "leur", "ma", "nôtre", "vôtre" "leur" alors que le "la" plus lourd à porter ne se prête à aucune substitution syntaxico-politique. 

"L'Algérie n’a pas besoin d’un guide extérieur…": Il suffit alors de remplacer "extérieur" par "intérieur" qui a perverti sa primauté historique pour que l’énoncé du président de l’Apn prenne son vrai sens. Ce qui donnerait : "L’Algérie n’a pas besoin de guide intérieur qui use parfois de la démocratie et des droits de l’homme à des fins de pression et de chantage"

R.N

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Commentaires (4) | Réagir ?

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Quelqun EncoreQuelqun

Hors-Sujet : Part de rêve

Il devient de plus en plus difficile de subir les pages du MatinDz sans une "pause", une halte ou un "autre chose" tant l'actualité brute-de-décoffrage tend à se reproduire à l'identique quotidiennement.

En d'autres termes, il commence à y en avoir un petit peu marre de lire à longueur d'articles la même sémantique (régime algérien / arabisation / école algérienne / sonatrach / Bouteflika-Belkhadem...) sous différentes formes (dépêches / scoop / édito...), et de constater la perte progressive de cette aptitude à la satire, aux envolées lyriques etc.

La caricature et le blasphème ne sont que de vieux souvenir! Ah ya Dilèm !!

Il faut dire qu'avec la prolifération de "critiques" en tous genres, prompts à commenter même une opération arithmétique sur les pages du matin en ligne, il faut donc dire que les rédacteurs ne font que répondre à un besoin... mais quand-même!

L'Editorial aurait pu représenter (de temps à autre) ces occasions " d'apartés " réservés aux recalés de l'actualité.

A bon entendeur...

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Raveh Aksel

Il faut se rendre à l'évidence, l'hygiène est une affaire trop sérieuse ! C'est avant tout une affaire d'éducation !! Quand à la saleté, celle qui empoisonne la vie des peuples de ce pays trahi et qui s'est incrustée depuis le mouvement national, je crois bien que le détergent qui en viendrai à bout, n'existe malheureusement qu'en petite quantité, en vrac, dans ce pays sali et avili !! C'est pour cela que la route est encore longue, la puanteur a encore de beaux jours devant elle !!

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