Syrie : sur fond de violence, Brahimi rencontre des opposants pro-régime

Alors que les violences ont fait 125 morts hier, le nouvel émissaire international s'entretient à Damas avec des leaders de l'opposition autorisée par le régime.

Le nouvel émissaire international pour la Syrie Lakhdar Brahimi devait rencontrer vendredi 14 septembre à Damas des membres de l'opposition tolérée par le régime, à la veille d'un entretien avec le président Bachar al-Assad inflexible après 18 mois d'un conflit sanglant. A quoi rime cette première rencontre quand on sait que ces hommes ne représentent en vrai que la cinquième colonne du régime ? Pourquoi d'emblée Lakhdar Brahimi se fourvoie-t-il ainsi alors que la situation est déjà assez grave et urgente comme il le reconnaît au demeurant ?

Alors que la France refuse de fournir des armes à l'Armée syrienne libre, et la Russie, elle, continue avec l'Iran d'approvisionner les soldats du régimes en armes et munitions, un nouvel acteur met les pieds dans le plat déjà chaud de la Syrie. Alors que les violences ont fait 125 morts jeudi et 18 vendredi selon un premier bilan d'une ONG syrienne, le pape Benoît XVI, en visite au Liban, appelle à mettre fin aux livraisons d'armes en Syrie. Sur le terrain, comme tous les vendredis, des manifestations hostiles au régime ont lieu dans la plupart des régions de Syrie. Les violents combats se poursuivent par ailleurs à Damas et Alep, la deuxième ville du pays.

Lakhdar Brahimi, qui a débuté jeudi sa première visite en Syrie, doit s'entretenir dans l'après-midi avec une délégation du Comité de coordination pour le changement national et démocratique (CCCND), qui regroupe des partis nationalistes arabes, kurdes, socialistes et marxistes. "Nous coopérerons avec [Lakhdar Brahimi, NDLR] car la violence a atteint des niveaux [inouïs, NDLR] et le peuple syrien souffre des tueries, des destructions et de l'exil", déclare prometteur Hassan Abdel Azim, porte-parole du CCND, toléré par le régime. De quel poids dispose cette organisation pour lui accorder une audience ? Il va sans dire que les vrais acteurs de la guerre civile est le régime criminel de Bachar al Assad et ses opposants de l'ASL. Prendre langue avec d'autre mouvement ou acteurs de la Syrie c'est se tromper de chemin. Malheureusement au vue de cette première sortie, il est à craindre que la solution Lakhdar Brahimi ne soit pas la bonne. Bachar Al Assad et ses supporters ont déjà montré de quoi ils sont capables, leur accorder crédit c'est oublier la violence de cette guerre civile, ses milliers de morts, de disparus et de torturés. 

Les combats toujours violents

Tout en promettant de coopérer et tout en traitant l'opposition de terroristes, le régime poursuit le pilonnage des villes. A Alep, la capitale économique du nord, théâtre de combats incessants depuis huit semaines, les rebelles continuent d'opposer une forte résistance à l'armée, malgré les bombardements de leurs bastions. L'aviation du régime a pilonné à l'aube deux postes de police dont les rebelles ont pris le contrôle jeudi dans le quartier de Midane, dans le centre du pays, rapportent des habitants et l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).

Ce quartier est considéré comme stratégique car il ouvre l'accès à la principale place de la deuxième ville syrienne. Un habitant joint y fait état de combats ainsi que dans le quartier voisin d'Arqoub. "Je crois qu'il va y avoir une grosse opération militaire", ajoute-t-il. "Les troupes du régime sont fortement déployées à Midane et se préparent pour en déloger les rebelles", a déclaré auparavant le président de l'OSDH, Rami Abdel Rahmane.

Dans la province d'Alep, les insurgés ont attaqué une nouvelle fois l'aéroport Menagh, principale base aérienne de la région, selon l'OSDH.

A Damas, où Lakhdar Brahimi se trouve, l'ONG fait état de "violents combats", notamment à Hajar el-Aswad et Qadam, des quartiers sud. Trois importantes déflagrations ont également été entendues en matinée, selon des habitants, qui précisent que des hélicoptères survolaient la capitale.

Face au cycle de violences qui n'en finit pas, le pape Benoît XVI estime qu'"au lieu d'importer des armes, qui est un pêché grave, il conviendrait d'importer des idées de paix, de créativité, d'amour du prochain", affirme-t-il, alors que les rebelles ont réclamé à plusieurs reprises des armes à la communauté internationale.

Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan estime de son côté que le régime de Bachar al-Assad s'approche de sa "fin inévitable". "Nous devons dire non à ce drame, ne pas permettre aux flammes de s'emparer de la région entière", martelle-t-il. Il souligne que le régime syrien est "dictatorial" et affirme que "l'unique objectif (de la communauté internationale) est de faire en sorte que la Syrie devienne démocratique, dans le respect de son intégrité territoriale".

Le chargé d'Affaires américain auprès de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Robert Wood, estime par ailleurs que la Syrie fait preuve de "mépris" envers l'organisation, en refusant de coopérer sur un site nucléaire présumé et non déclaré par le pays. Depuis mars 2011, le conflit a fait plus de 27.000 morts, en majorité des civils, selon l'OSDH.

Yacine K./AFP

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