Le premier ministre éthiopien Meles Zenawi est mort

Meles Zenawi, premier ministre éthiopien.
Meles Zenawi, premier ministre éthiopien.

Ce dirigeant autoritaire a gouverné d'une main de fer l’Ethiopie depuis 21 ans. Son règne est marqué par de nombreuses violations des droits de l’homme et deux guerres. Il laisse un pays pauvre.

Le premier ministre éthiopien, Meles Zenawi, est décédé dans la nuit du lundi 20 au mardi 21 août, a annoncé le porte-parole du gouvernement éthiopien, Bereket Simon. Poids lourd parmi les dirigeants africains, M. Zenawi, 57 ans, dirigeait l'Ethiopie d'une poigne de fer depuis 1991 et incarnait à lui seul le pouvoir dans son pays.

Meles Zenawi n'avait plus été vu en public depuis juin et son état de santé faisait l'objet de nombreuses rumeurs. "Il récupérait bien, mais, tout à coup, il s'est passé quelque chose et il a dû être emmené d'urgence en unité de soins intensifs, où [les médecins] n'ont pas pu le maintenir en vie", a ajouté M. Bereket.

Le porte-parole n'a pas donné plus de détails sur la maladie dont souffrait M. Meles, dans ce pays qui cultive le secret autour de son dirigeant et contrôle soigneusement l'information. Il a seulement précisé que le premier ministre éthiopien se trouvait "à l'étranger" au moment de son décès. En juillet, M. Zenawi était, selon des sources diplomatiques, hospitalisé à Bruxelles et se trouvait dans un état critique.

La Constitution éthiopienne est muette en ce qui concerne le constat de vacance ou d'empêchement du chef du gouvernement, et sur les procédures de remplacement le cas échéant. Son article 75 prévoit seulement que le vice-premier ministre – actuellement Hailemariam Desalegn, 47 ans – "agit au nom du premier ministre en son absence", sans autre précision, notamment de durée.

Depuis plusieurs semaines, le gouvernement éthiopien se voulait rassurant sur l'état de santé du premier ministre. Mais depuis l'annonce de son hospitalisation à Bruxelles par des sources diplomatiques sur place, l'incertitude régnait sur qui est actuellement, effectivement, aux commandes dans le deuxième plus peuplé des pays d'Afrique sub-saharienne.

Meles, l’autocrate

Considéré comme un autocrate par ses adversaires, comme un visionnaire par ses partisans, M. Meles était maître à bord de son pays depuis vingt et un ans. Cet homme austère était entré dans le club fermé des dirigeants africains en poste depuis plus de deux décennies, après une victoire écrasante aux élections de 2010 – il avait alors raflé 99 % des voix.

Il avait pris le pouvoir en Ethiopie en 1991, à la tête d'une guérilla qui venait de faire tomber le régime du dictateur Mengistu Haile Mariam. Il n'a pas 25 ans quand il est porté par ses compagnons d'armes en haut de la hiérarchie du FLTP (Front de libération du peuple du Tigré), cinq ans seulement après avoir abandonné ses études de médecine pour rallier la rébellion du nord du pays.

Né le 8 mai 1955 à Adoua, Meles Zenawi faisait partie de cette génération de dirigeants africains arrivés au pouvoir à la fin des années 1980 et au début des années 1990, en qui le président américain de l'époque Bill Clinton voyait les possibles "dirigeants de la renaissance" africaine. M. Meles avait, au fil des ans, fait de son pays un allié-clé des Etats-Unis dans la lutte contre l'extrémisme islamiste dans la Corne de l'Afrique.

Un analyste s'exprimant sous couvert d'anonymat estimait récemment que M. Meles, "lecteur assidu de The Economist et des rapports de la Banque mondiale", avait "acquis toutes les astuces des grands donateurs", parlait comme eux, ce qui lui donnait "une crédibilité très forte". "C'est le dernier empereur d'Ethiopie, a aussi dit de lui un ancien diplomate éthiopien. Pour Meles Zenawi, le pouvoir continue d'être une sorte de mythe, avec une réelle dimension mystique même, parce qu'il est dans le même cas de figure que ces empereurs du passé, arrivés au pouvoir par les armes, et parce qu'il dégage cette aura du pouvoir."

L'homme a mené une série de réformes économiques dans son pays : l'Ethiopie s'enorgueillit de flirter, depuis la fin de la dernière décennie, avec une croissance économique à deux chiffres. Réputé maîtriser ses dossiers, Meles Zenawi a aussi joué, à la fin de la dernière décennie, le rôle de négociateur en chef du continent sur le changement climatique.

Malgré tout, l'Ethiopie demeure l'un des pays les plus pauvres du monde, et est régulièrement accusé de violations flagrantes des droits de l'homme, contre les groupes d'opposition ou les journalistes. Les mandats de M. Meles resteront aussi marqués par une guerre frontalière très meurtrière avec l'Erythrée entre 1998 et 2000, et deux interventions militaires en Somalie.

Avec AFP

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