Russes et Américains font dérailler les négociations à l'ONU sur le commerce des armes

De nombreux pays sont pointés du doigt dans l'échec de ces négociations.
De nombreux pays sont pointés du doigt dans l'échec de ces négociations.

Les États-Unis et la Russie ont demandé davantage de temps pour se prononcer, imités par plusieurs autres pays.

Les négociations à l'ONU sur la mise en place du premier traité sur le commerce des armes conventionnelles se sont soldées par un échec vendredi à New York après des semaines de négociations, mais elles devraient reprendre ultérieurement. Les 193 États membres devaient se mettre d'accord vendredi avant minuit, heure de New York, sur les règles du jeu. Celles-ci devaient obliger chaque pays à évaluer si les armes vendues risquent d'être utilisées pour commettre des "violations graves des droits de l'homme" ou des attentats, ou d'être détournées par le crime organisé.

Mais, selon plusieurs participants à la conférence, les États-Unis et la Russie ont demandé davantage de temps pour se prononcer, imités par plusieurs autres pays (Chine, Inde, Indonésie et Égypte notamment). "Le texte que j'avais proposé était un projet de traité, certains pays ne l'aimaient pas, mais l'immense majorité était d'accord", a regretté le président de la conférence, l'Argentin Roberto Garcia Moritan. "Nous allons continuer de travailler sur cette base."

Interrogé sur la suite des événements, Roberto Garcia Moritan a indiqué qu'une des possibilités était de "demander à l'Assemblée générale (de l'ONU) de prendre une décision", c'est-à-dire de décider s'il doit y avoir de nouvelles négociations et quand. La prochaine session de l'Assemblée se tient fin septembre à New York. Selon un diplomate, le rapport que Roberto Garcia Moritan va transmettre à l'Assemblée générale propose de reprendre les négociations pendant deux semaines début 2013. Roberto Garcia Moritan s'est déclaré "certain que nous aurons un traité rapidement", mais n'a pas donné de délai. Peut-être faudra-t-il "peaufiner le texte" auparavant, a-t-il ajouté.

"Un recul", selon Ban Ki-moon

Des diplomates avaient auparavant rendu les États-Unis responsables de l'échec des pourparlers. Selon eux, Washington a refusé de se prononcer sur le projet de traité avant la date limite, demandant plus de temps pour peaufiner le texte et disant craindre un blocage au Congrès. La Russie et d'autres pays ont immédiatement emboîté le pas aux Américains, rendant impossible d'arracher à temps un consensus. "C'est la faute des États-Unis si nous avons échoué", a affirmé un diplomate. "Ils ont fait dérailler le processus et il faudra attendre l'élection présidentielle américaine" de novembre pour sortir de l'impasse.

Une opinion partagée par des responsables d'associations. "Aujourd'hui, les États-Unis n'ont pas saisi une occasion en or : un traité international qui aurait renforcé leur réputation de leader dans le domaine des droits de l'homme", a déploré Scott Stedjan, responsable d'Oxfam America, qui a critiqué "le manque de courage de la Maison-Blanche". Les États-Unis représentent près de 40 % du commerce mondial des armements, qui est évalué à 70 milliards de dollars annuels. "C'est un recul" après plusieurs années de travaux préparatoires et quatre semaines de négociations, a déploré le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon. "Mais cela ne signifie pas l'abandon" de ce traité, car les États membres "ont accepté de poursuivre ce noble objectif".

Amnesty International Algérie regrette de l'Algérie, l’Égypte, l’Iran, la Corée du Nord et la Syrie

La section algérienne d’Amnesty International observe dans une déclaration rendue publique vendredi que "tandis que les civils pris sous le feu du conflit en Syrie continuent de faire les gros titres, la Chine, la Russie et les États-Unis se sont employés à différer ce qui aurait pu constituer un accord historique visant à mettre fin au commerce irresponsable des armes.

Amnesty International œuvre à faire de ce traité une réalité depuis près de 20 ans – bien consciente de la nécessité de mettre fin au commerce irresponsable et insuffisamment réglementé des armes. Des millions de civils sont tués, blessés, violés et contraints de fuir leur foyer, conséquence directe des transferts d’armes à destination de gouvernements qui les retournent contre la population".

La section algérienne d'AI rappelle que "ces négociations constituaient l’épreuve de vérité pour les dirigeants du monde. Une minorité de puissants ne s’est pas montrée à la hauteur des attentes, privilégiant son propre intérêt politique, et a endigué la vague de l’opinion mondiale – mais plus pour longtemps. La majorité des gouvernements du monde qui prônent un traité solide doivent maintenir la pression afin de parvenir à un accord d’ici la fin de l’année", a indiqué Salil Shetty.

Si la Chine, la Russie et les États-Unis ont brillé par leur absence de volonté politique, ce ne fut pas l’unique obstacle à la finalisation du traité. Le manque de coopération de l’Algérie, de l’Égypte, de l’Iran, de la Corée du Nord et de la Syrie, s’il était prévisible, est inexcusable, lit-on dans le communiqué. 

Y.K/AFP

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