Les armes, l'amok et le coma dans la conscience planétaire

Les fortunes qui emplissent les coffres-forts des banques sont toutes tachées de sang et de graves malheurs de l’Humanité.
Les fortunes qui emplissent les coffres-forts des banques sont toutes tachées de sang et de graves malheurs de l’Humanité.

"Le ciel arme de pitié ceux qu’il ne veut pas voir détruits." Lao-Tseu

Une année exacte nous sépare du double attentat perpétré à Oslo, en Norvège par un jeune homme d’une trentaine d’année de nationalité norvégienne qui a fait 78 morts et beaucoup de blessés. Mais vendredi passé aux Etats-Unis, dans une banlieue de Denver dans le Colorado, un autre garçon de 24 ans assassine, fusil en main, douze personnes et blessé des dizaines dont certaines victimes grièvement dans un cinéma projetant le dernier Batman. Il est tout aussi jeune et de nationalité américaine, étudiant en neurologie mais dont on dit qu’il est "dérangé" mentalement. Une des victimes mortelles de cet attentat a fait la Une de la presse nord-américaine qui rapporte une lecture dans le blog de la jeune fille, journaliste de son état, qu’elle ait échappé à un autre attentat deux mois auparavant à Toronto, au Canada, partant voir son petit ami y résidant, où un homme ouvre le feu dans une galerie marchande et tue une personne et cause des blessures à sept autres.

La mort et l’argent dans la même odeur

Le tueur du Colorado avait pris le soin de piéger son appartement de quantité importante de produits chimiques inflammables, d’explosifs et de munitions. Tout comme le meurtrier solitaire d’Oslo qui se fut procuré ses outils de morts avec la facilité la plus déconcertante, il a agi sciemment dans l’intention délibérée de tuer autrui en nombre. Dans ces deux attentats meurtriers, que le lecteur excuse mon cynisme, les médias restent sur leur faim. Si pour le descendant des Vikings, les pointus de la presse people réussissent à profiler l’exterminateur dans une psychologie de quelque religiosité d’orthodoxie puritaine, pour ce qui est du tireur à vue de Denver le portrait est carrément mis sous l’angle de la psychiatrie, et pourtant l’incriminé est identifié comme avoir étudié "placidement", jusqu’en juin 2011, la neuroscience dans la prestigieuse université du Colorado en vue d’un diplôme doctorant. Il n’y a là dans la meilleure cueillette à la sensation, point du Qaïda, ni de fomentation de groupes islamistes terroristes, menaçant le capitalisme planétaire qui garantit la plénitude de l’individu et du groupe au travers du prodige de la démocratie et du libre échange.

Mais le libre échange justement qui interpelle la conscience humaine en dehors de toute considération d’idéologie, de foi ou de conviction casuistique et qui lui-même se fout une balle dans la main à travers le dogme capitaliste qui ne peut désormais plus différentier, une fois happé par la machinerie monétaire, l’argent qui a été produit par le planteur de tournesol ou l’éleveur d’huîtres, du fabriquant de munitions, de pistolets automatiques ou de grenades à fragmentation.

C’est une lapalissade de constater que les fortunes qui emplissent les coffres-forts des banques de la planète sont toutes tachées de sang et de graves malheurs de l’Humanité. Un libellé pour l’entretien d’une régie cinématographique ou télévisuelle en sortant d’un organisme financier croise sans vergogne une rentrée monétaire issue de la production de quelques centaines de tonnes de produite de guerre, en armes ou logistique de belligérance meurtrière. De même qu’une succursale accorde un substantiel crédit à un entrepreneur de génie civil pour la réalisation d’un pont reliant deux endroits enclavés, ou à un autre capitaine d’entreprise, soucieux de varier ses produits de confiserie, de même un consortium favorise une colossale ligne pour l’extension d’une usine de mitraillettes.

De la lâcheté en mondialisation

Au final, les plus values sont équivalentes, si vous conduisez allègrement sur la chaussée de ce pont rutilant, suçotant une dragée arôme pistache, une Uzi mini dans la boîte à gants, allant régler leurs comptes à des pique-niqueurs dans le bois voisin parce que vous êtes dégoûté de votre vie.

La Constitution yankee garantit le port d’arme pour les citoyens mais les dirigeants, les grands et les petits, ne font pas un pas hors de chez-eux sans être encadrés par une robuste garde rapprochée. Tandis qu’en Norvège les membres du gouvernement prennent le transport collectif pour se rendre dans leur cabinet, le port d’arme, comme dans la plupart des pays du monde, y est drastiquement contrôlé, mais dans cette partie de la planète comme dans l’autre, l’accès à l’arme à feu est à la portée de n’importe qui.

Les constructeurs qui fabriquent des moteurs pouvant propulser une voiture touriste à plus de 350 km à l’heure possèdent les mêmes facultés spirituelles que leurs homologues de l’industrie confectionnant les silencieux les plus pernicieux et les canons à ligne de tir les plus perverses : les uns et les autres détiennent une conscience monochrome, celle de la vertu « mondialistique » pour qui la mort d’homme en masse ou le maintien de le souffrance par régions planétaires entières sont justes des dommages collatéraux consentis pour le bien de la majorité des habitants sur Terre.

Nadir Bacha

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