Le 5 juillet 62 : une indépendance retournée

Derrière la liesse, la laisse
Derrière la liesse, la laisse

Hier, à 21h30, heure locale, a été diffusé sur la chaine parlementaire Public Sénat un documentaire sur les premiers jours de l’indépendance de l’Algérie intitulé : "L’Indépendance aux deux visages" dans lequel différentes figures de la révolution algérienne, ont témoigné sur les côtés «jardin» et «cour» de la période allant des négociations d’Evian à la déclaration de l’indépendance, le 5 juillet 1962.

Salah Boubnider, Ali Haroun, Youcef Khatib, Abderrezak Bouhara, le commandant Azeddine, Redha Malek et Aït Ahmed ont tour à tour pris la parole pour raconter l’"été de la discorde"  dont ils furent, disent-ils, des victimes de l’intronisation de Ben Bella, imposé par l’armée des frontières de Houari Boumedienne et de sa destitution par la même armée qui l’a mis aux commandes du pays.

Les deux officiers de l’ALN, Salah Boubnider, Youcef Khatib ainsi que le commandant Azzedine de la zone autonome d’Alger disent n’avoir pas été informés par leur hiérarchie du déroulement des accords d’Evian et qu’ils ont appris le cessez-le-feu du 15 mars 1962 par la presse coloniale de cette période et les communiqués de l’armée française.

Le premier visage de l’indépendance qu’ils disent, désillusionnés, s’est vite estompé. Derrière la liesse populaire, se tramait un complot: la confiscation de l’indépendance pour laquelle le peuple qui dansait, cousait des drapeaux, avait tout donné, sacrifié. C’est le deuxième visage de cette indépendance des frères ennemis qui occupera l’essentiel des témoignages. Celui de Redha Malek, sur le déroulement des accords d’Evian, atteste un fait : la situation chaotique qui prévalait à Alger, dans les maquis décimés, le départ massif des Pied-noir persécutés à Alger et dont plusieurs, par familles entières, ont été délestés de leurs biens, persécutés la nuit, emprisonnés avec femmes et enfants dans des baraquements sans que personne n’intervînt, cette situation-là ne permettait pas l’application des conditions fixées par les Accords d’Evian. Abderrazak Bouhara, commandant d’une unité de l’ALN stationnée en Tunise reconnait, avec un sourire aux lèvres, avoir été  l’un des premiers à contrevenir à ces accords, à "brûler" la frontière, en civil, avec un laissez-passer du Croissant Rouge, avec ses hommes armés, et être rentré à Alger presque clandestinement. Il s’est plu à faire le parallèle entre les blindés du Général Leclerc qui ont libéré Paris et son unité qui, la première de l’ALN, à défiler au cœur d’Alger.

Mais le point fort du documentaire ne réside pas dans l’événementiel mais dans les trahisons politiques que d’aucuns parmi les intervenants disent revivre la même situation quarante ans après l’indépendance. Et d’abord la réunion du CNRA à Tripoli en 1963 qui n'a accouché de la «charte de Tripoli» séance tenante. Pourquoi Tripoli et pas Alger ? Y aura-t-il jamais une réponse à cette question ? Pour le commandant Azzedine a refusé d’y aller, exigeant que cette rencontre se déroule à Alger puisque le pays est indépendant, souverain, arguant le fait que le congrès de la Soummam s’est tenu à Ifri Ouzelaguène au cœur même de la guerre et qu’il n’y avait aucune raison que tous les représentants du Conseil national de la Révolution algérienne, au moment de l’indépendance, se rencontrent pour la première fois pour décider de l’avenir du pays, dans un pays étranger. Selon lui, à ce jour, aucune explication n’a été donnée quant au choix de la capitale de la Libye, Tripoli, en 1963.

Ali Haroun, l’un des responsables de la Fédération de France du FLN, relate l’ambiance délétère de cette réunion du CNRA marquée par l’invective et l’insulte des uns et des autres au point que la séance au premier fut interrompue par le Président de séance annonçant sa reprise le lendemain. Les travaux ne reprirent jamais et le CNRA a volé en éclats. Les résolutions de la charte de Tripoli ont été rédigées en catimini par le clan de Ben Bella, sans aucune consultation au sein du CNRA.

A Alger, cette fois, l’Assemblée présidée par le vieux militant Ferhat Abbas, Président du GPRA, chargée d’élaborer la première Constitution algérienne, a été "court-circuitée", doublée par une équipe de l’ombre qui a avorté d'un texte dans un cinéma d’Alger, le Majestic. De là, date la démission de Ferhat Abbas trahi. En racontant tous ces scénarii rocambolesques, Ali Haroun n’a pas mâché ses mots, ne cachant pas, quarante ans après les faits qui ont fait de l’indépendance, une aire de complots ourdis contre la Révolution et le peuple, une colère sourde comme si les événements s’étaient déroulés la veille de son entretien.

En fait, tous ces complots nauséabonds, disent-ils, tous, prennent source de la prise d’Alger par l’armée des frontières commandée par Houari Boumediene, inconnu à l’époque. Ce dernier, fort d’une armée surarmée, avait besoin d’un politique pour se légitimer. Des contacts sont pris auprès des dirigeants de la Révolution alors emprisonnés en France suite au détournement de leur avion. Cet épisode, Hocine Aït Ahmed la raconte dans le détail. Selon ses propos, lui-même a refusé l’offre de l’émissaire, Abdelaziz Bouteflika, ainsi que Mohamed Boudiaf qui a considéré que cette initiative secrète, personnelle, sans consultation de la base, du peuple et des instances représentatives de la Révolution, était une trahison qui risquait de fracturer, diviser le pays. Ben Bella, alors le plus populaire d’entre eux, accepte d’être l’homme de paille de Boumediene dont les unités blindées ont fait le forcing sur la capitale qui vivait un chaos indescriptible. La suprématie du militaire sur le politique, la négation même de l’une des résolutions du Congrès de la Soummam si chère à Abane Ramdane qui a l’a payé de sa vie, avait, dès les premiers jours de l’indépendance, scellé la fracture de l’avenir politique de l’Algérie.

On peut regretter que le documentaire ne soit pas soutenu par des documents d’archives appuyant les propos des intervenants. Selon Ali Haroun, il n’existe aucune photo sur la réunion du CNRA à Tripoli. Un lieu gradé secret à ce jour.

R.M

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Commentaires (10) | Réagir ?

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kamel benzine

indepandance algerie ete detourne 1957. lors que le clan oudjda ont decide assassine abane ramdane qui derange revolutionnaire de salon et ideologie islamo beathiste qui ete impose par le voyou djamel abdenasser. primaute interrieur sur exterrieur et politique sur le militaire. juste apres sa mort bentobel a delare que avenir algerie est noire. jus qua maintenant on est dans le noir on est gouverne par une mafia politico financier avec un drapeau parmi eux bouteflika et sa famille.

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oziris dzeus

Que faisait dans ce cas boutef le grand moudjahid? Il finalisait le complot pour prendre en otage l'Algérie et les algériens. Le clan boutef&co est une bande de voyous qui a réussi à voler un état naissant, avec drapeau hymne et tout ses symboles et institutions. Une bande de comploteurs d’usurpateurs d’imposteurs et de voleurs. Ils ont toujours fonctionné ainsi par traitrise la peur aux tripes. Mais comment ? Un belkhad est arrivé à être le patron du FLN. Avec Boutef le FLN est passé de front de la révolution front de la rente et de la honte.

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