L'Espagne en crise appelle à l'aide pour ses banques

Le premier ministre espagnol.
Le premier ministre espagnol.

Le gouvernement de Madrid s'est résigné à demander une aide européenne qui pourrait s'élever à cent milliards d'euros.

L’Espagne, quatrième économie de la zone euro, s’est résignée samedi à lancer un appel à l’aide européenne pour ses banques, qui pourrait atteindre cent milliards d’euros, un scénario longtemps écarté à Madrid, mais devenu inévitable face à l’aggravation de la crise de la dette. Ce plan d’aide sera le quatrième accordé à un pays de la zone euro depuis le début de cette crise fin 2009, après la Grèce, l’Irlande et le Portugal.

Il s’agira cette fois de renflouer le secteur bancaire de l’Espagne, asphyxié par son exposition à l’immobilier, une aide dont le montant est évalué par l’Eurogroupe à cent milliards d’euros au maximum. L’Espagne va demander "une aide financière européenne" pour redresser son secteur bancaire, a annoncé à Madrid le ministre de l’Economie Luis de Guindos, après une réunion téléphonique des ministres des Finances des 17 pays de la zone euro.

Il a affirmé qu’en échange, il n’y aurait aucune condition de réformes économiques "hors du domaine du secteur financier". "Les conditions seront imposées aux banques, pas à la société espagnole", a ajouté le ministre, tentant de rassurer le pays, au taux de chômage record de 24,44% et déjà soumis à une rude cure d’austérité pour réduire son déficit public de 8,9% en 2011 à 5,3% cette année.

"Cela n’a rien à voir avec un sauvetage", a insisté M. de Guindos, précisant que l’aide sera réservée aux "30% (des banques) qui ont le plus de difficultés", et identifiées comme telles dans le rapport du Fonds monétaire international (FMI) publié vendredi soir. "Cette annonce est bonne pour l'économie espagnole et pour l’avenir de la zone euro", "c’est un signal très positif sur la volonté politique de toute la zone euro", a déclaré le ministre.

M. de Guindos a expliqué que cette aide serait considérée comme de "la dette publique" espagnole, qui va donc augmenter, et "devra absolument être remboursée". Elle sera injectée dans le fonds public espagnol d’aide au secteur (Frob), qui attribuera cet argent aux "banques qui le demandent", a-t-il expliqué. Quelques heures plus tôt, les ministres des Finances de la zone euro avaient eu une vidéo-conférence pour dessiner les contours de ce plan. "Il s’agira en fait d’un des plus grands sauvetages financiers de l’histoire récente", avait souligné le Premier ministre suédois Fredrik Reinfeldt, dont le pays ne fait pas partie de l’Union monétaire.

Quatrième économie de la zone euro, l’Espagne constitue en effet à elle seule 12% du PIB de la zone euro, contre seulement 6% pour l’Irlande, le Portugal et la Grèce réunis. Les plans de sauvetage de ces trois pays ont coûté respectivement 85 milliards, 78 milliards et 292 milliards d’euros.

Jusqu’ici, Madrid s'était refusé à lancer un appel à l’aide de crainte de se voir imposer, comme la Grèce, un programme qui irait de pair avec des conditions strictes dictées par ses bailleurs de fonds internationaux. Mais le gouvernement espagnol a dû plier, sous la pression extrême des marchés et de l’Europe, soucieux probablement de régler le problème avant les élections en Grèce du 17 juin, de peur d’une contagion. Le rapport du FMI a chiffré les besoins du secteur à au moins 40 milliards d’euros, mais la zone euro s’est dite prête à «répondre favorablement à une demande d’aide» de l’Espagne en faveur de son secteur bancaire et à lui prêter jusqu'à 100 milliards d’euros.

"C’est une somme maximum", a souligné Luis de Guindos, et, «très clairement, il y a une marge de sécurité» dans ce chiffre. Pour formuler une demande précise, Madrid attend, en plus du rapport du FMI, les résultats de l’audit réalisé par les cabinets allemand Roland Berger et américain Oliver Wyman, qui seront connus «dans quelques jours».

L’Espagne a donc échappé au nouveau plan d’austérité qu’elle redoutait. Mais elle n’en reste pas moins sous surveillance étroite de ses partenaires européens. L’Eurogroupe s’est dit ainsi "confiant que l’Espagne honorera ses engagements de réduction de déficit et en ce qui concerne les réformes structurelles, en vue de corriger les déséquilibres macroéconomiques" : "les progrès dans ces domaines seront surveillés de très près et régulièrement, parallèlement à l’assistance financière" fournie.

"Nous avons un nouveau concept : un sauvetage 'léger', sans conditions matérielles pour la dette et seulement pour les banques qui le demandent", analysait Charles Diebel, économiste chez Lloyds Banking Group, avant de poser la question suivante : "C’est la dernière en date d’une longue liste de mesures pour combattre la crise. Cela sera-t-il suffisant ?" L’accord conclu avec l’Espagne a été salué samedi soir notamment par les Etats-Unis, la France et l’Allemagne.

AFP

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