La légitimité, cinquante ans après… Par Mohamed Benchicou

La légitimité, cinquante ans après… Par Mohamed Benchicou

Qu’entend-on d’autre, dans le souffle désespéré de dirigeants suppliant leur peuple de participer à son propre rabaissement, que le soupir agonisant d’un pouvoir illégitime ?

Á les écouter, Bouteflika et son premier ministre, l’année du 50e anniversaire de l’indépendance, implorer le peuple d’aller voter, comment ne pas y voir toute la face noire et repoussante d’une persistante illégitimité et, au-delà, de leur désespoir d’une indépendance qu’ils n’auront pas su construire ? Il y cinquante ans pourtant, le 1er juillet 1962, il n’était pas besoin de les supplier, ces Algériens qui, pour avoir été de vieux cadavres brusquement rappelés à la vie, exprimaient, avec une si mémorable exubérance, le besoin d'affirmer leur existence et approuvaient, dans une légendaire unanimité, le référendum pour l’autodétermination.

Ils votaient, et c’est tout. Ils votaient pour un rêve. On vote toujours pour un rêve. Voilà qu’un demi-siècle plus tard, il faut donc les adjurer, ces Algériens, les prier, les conjurer, les angoisser, les effrayer, les menacer, oui les menacer de toutes sortes de calamités, le chaos, l’islamisme, la crise, le désordre ou, pire, l’ingérence étrangère, pour les conduire à l’urne ! Mais quoi ? Auraient-ils cessé d’être rappelés à la vie, ces citoyens désabusés qui cessent, par enchantement, de croire aux enchantements ? Ou n’est-ce, plutôt, la grisâtre sensation d’être redevenus un peu cadavres sous le règne de ceux-là qui, de feu Ben Bella à Bouteflika, se sont donnés comme nos juges, tantôt comme délégués de Dieu, tantôt comme les héritiers des colonels ? C'est que de la mascarade du 10 mai, Bouteflika et son premier ministre ne redoutent pas la défaite, puisque, l’un comme l’autre, n’envisagent nullement de quitter le pouvoir, le premier comptant anoblir son petit frère, le second espérant se faire anoblir par ses vieux pères. Ils ne craignent que l'abstention, seulement l'abstention, cette marque infâme de l’impassibilité populaire qui passerait en boucle dans les télévisions occidentales et qui révèlerait, aux yeux du monde, un misérable pouvoir solitaire.

Dans le timbre pathétique de leurs implorations, résonnent cinquante années de faillite. Qu’entend-on d’autre, dans le souffle désespéré de dirigeants suppliant leur peuple de participer à son propre rabaissement, que le soupir agonisant d’un pouvoir illégitime ?

On fêtera le 50e anniversaire de l'indépendance comme un demi-siècle d'un intime bonheur, intime et fugace, quand s'enracinait sur cette terre si longtemps obscurcie, chez tant d’hommes silencieux, une idée furtive de la lumière, avant que n’y retombe cette maudite pénombre qu'il faudra bien abolir, comme la première, en exigeant, comme tout peuple de ce siècle nouveau, d'être jugés par nos juges naturels. C'est pour bientôt.

Mohamed Benchicou

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Commentaires (8) | Réagir ?

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zaki zaki

Notre présent est ingérable comment voulez vous qu'on se projeté sur l'avenir ?

bonjour,

C'est pas étonnant d'etre les derniers quand on est gouvernés par les bestiaires qui ont une culture de chkara, leurs seul but est de penser a sauver leurs acquis mal acquis, une bande d’incompétents, chenapans, emberlificoteurs qui ont transformé nos jeunes en betes de cages, pret a tout mordre pour arracher le moindre air de libetré, c'est pas etonnant quand je vois les prix exhorbitants (une follie haussiere) que les ménagères n'osent plus s'y aventurer a moins que de vouloir carresser la marchandise des yeux, un pays qui etait jadis le grenier de l'europe, est devenu un pays acheteur meme pas un consommateur, un pays qui est pas autosuffisant en agriculture, l'industrie agro-alimentaire et la peche, c'est pas un pays :c'est un amas d'individus qui produisent rien que la médiocrité, en exportant de la poussière, la cause c'est que :on a oublié l'essentiel, la réussite est dans la soif des connaissances, la créativité, l'alphabétisation et rien d'autres au lieu de teter les idées noires et l'irrespect, apres tout ça, je peux légitimement me demander a quoi servent la colonisation et l'occupation d'un pays par autres pays mais en réfléchissant bien je me rend compte que lorsequ'une société atteinte a un degré avancé de décomposition, de pourrissements et d'apathie générale face aux maux qui la rongent et la tyrannie des puissants corrompus qui l'avilit. la colonisation est le seul moyen pour la reconstruction sur le plan moral. en effet, c'est en combattant l'occupant qu'émergent des nouvelles élites et rétablissement des valeurs qui font une société respectable et capable de se défendre, c'est en perdant tout que la société avilie cèsse de se mentir a elle meme et qu'elle prend les mesures de déchéance, elle est bien obligée alors de regarder la réalité en face et de se voir telle qu'elle est;bourgeois et paysans, nobles et roturiers, dominés et dominants se retrouvent ensemble sous joug de l'occupant étranger, aprés que la caste qui dérigeait le pays eut été balayée par cet occupant ou elle lui eut preté allégeance afin de conserver quelque avantages;c'est le seul moyen pour sortir la tete de l'eau, quand on touche le fond. excusez moi pour cet ecrit en vrac!!!!je vous souhaite une ribambelle de bonnes choses. une exquise et agréable suite..

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Guel Dring

Il y a quelque chose de mystérieux et de compréhensible à la fois : autant dire le Coeur a ses raisons que la Raison ne saisit point. Comme l'humanité est faite de bonnes et de mauvaises personnes, il faut se convaincre qu'on aurait pu être du côté malsain de l'humain. De l'hublot de ma pensée, en passant par mes yeux que je ressens comme organes vivants, je saisis l'impuissance de cet humain qui jouit et pleure au gré de l'Ordre : Ainsi soit-il. Mr Benchicou a souhaité :, c'est pour bientôt ? On aurait apprécié : c'est pour très bientôt. Ainsi soit-il !

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