La Syrie dit accepter le plan de paix d'Annan, mais les violences continuent

Kofi Annan avec Wen Djibao, premier ministre chinois
Kofi Annan avec Wen Djibao, premier ministre chinois

La Syrie a accepté mardi le plan de paix présenté par l'émissaire des Nations unies et de la Ligue arabe, Kofi Annan, selon le porte-parole de ce dernier.

La Ligue, réunie à Bagdad, devait également discuter du conflit mais ses dirigeants ne devraient pas exiger la démission du président syrien Bachar Al-Assad, selon le ministre irakien des Affaires étrangères. Le porte-parole de Kofi Annan, émissaire de l'ONU et de la Ligue arabe pour la Syrie, a déclaré que Damas avait accepté le plan prévoyant notamment un cessez-le-feu des forces gouvernementales, une trêve de tous les combats deux heures par jour pour évacuer les blessés et fournir une aide humanitaire, et l'ouverture de pourparlers entre toutes les parties pour chercher une solution politique. Ahmad Fawzi a précisé que le gouvernement avait donné son accord dans une lettre adressée à l'émissaire de l'ONU.

Des membres de l'opposition syrienne ont toutefois réagi avec scepticisme. Louay Safi, un membre du Conseil national syrien basé aux Etats-Unis, a notamment affirmé que le régime avait accepté d'autres initiatives de paix, mais que la violence continuait toujours. "Nous ne savons pas si c'est une manoeuvre politique ou un acte sincère", a-t-il déclaré lors d'une réunion de l'opposition en Turquie. "Nous ne faisons pas confiance au régime actuel. Nous voudrions voir des mesures concrètes. Nous devons voir qu'ils ont arrêté de tuer des civils."

9000 morts

Le Coordonnateur spécial des Nations unies pour le processus de paix au Moyen-Orient, Robert Serry, a affirmé mardi devant le Conseil de sécurité de l'ONU que le conflit en Syrie avait fait "plus de 9.000" morts. La précédente estimation de l'ONU faisait état d'un bilan de plus de 8.000 morts depuis le début de la contestation en Syrie à la mi-mars 2011.

Le mouvement initialement pacifique s'est radicalisé face à la violence des forces de sécurité et a été rejoint par des déserteurs de l'armée. Le pays menace désormais de basculer dans la guerre civile. La Syrie, qui fait partie des 22 Etats membres de la Ligue arabe, n'a pas été invitée au sommet, qui s'achèvera jeudi avec la réunion des chefs d'Etat et de gouvernement.

D'après le ministre irakien des Affaires étrangères Hoshyar Zebari, les dirigeants seront probablement d'accord sur une solution "faisable" pour mettre fin à la violence, mais "c'est au peuple syrien de déterminer son avenir, ce n'est pas à d'autres pays de dicter aux Syriens le genre de dirigeants qu'ils doivent avoir ou pas". "Je ne pense pas qu'il y aura un appel à la démission de Bachar", a-t-il ajouté.

Le nouveau plan de sortie de crise serait donc similaire à celui présenté il y a quelques mois par la Ligue arabe, qui prévoyait un transfert pacifique du pouvoir du président Assad à son vice-président jusqu'à la tenue d'élections, selon M. Zebari. Le régime alaouite, qui affirme que l'opposition est manipulée par l'Occident et qu'il affronte un complot terroriste de l'étranger visant à déstabiliser le pays, a dénoncé les critiques de l'alliance panarabe concernant la répression.

Le chef de la diplomatie irakienne a par ailleurs exhorté l'opposition syrienne à "s'unir avant tout", pour présenter un plan de paix commun. Il a précisé que les dirigeants de l'opposition seraient les bienvenus à Bagdad après le sommet pour discuter des options. L'Irak présidera alors la Ligue pendant un an.

Pendant que l'organisation régionale se réunissait à Bagdad, la Syrie restait en proie à la violence. L'Observatoire syrien des droits de l'Homme, basé à Londres, a déclaré que les forces de sécurité avaient tué au moins dix personnes mardi: quatre dans la province d'Idlib (nord-ouest), dont le chef-lieu du même nom a été récemment repris aux rebelles qui le contrôlaient depuis des mois, et six dans des faubourgs damascènes de Zabadani et Douma, ainsi qu'à Homs (centre), l'un des bastions de l'insurrection également, et dans la région de Deir el-Zour (est).

Selon l'agence de presse officielle SANA, le président Assad s'est rendu mardi à Homs, dans le quartier de Baba Amr repris à l'insurrection après un mois de siège et de combats qui ont fait des centaines de morts. Sur des images diffusées par la télévision syrienne, on pouvait voir Bachar Al-Assad, apparemment détendu, promettant que Baba Amr serait reconstruit "mieux qu'il n'était avant". Il a été accueilli par des habitants qui criaient: "Nous sommes avec vous jusqu'à la mort!"

Par ailleurs, deux responsables libanais de la sécurité, l'un de la police et l'autre de l'armée, ont déclaré sous couvert d'anonymat que des balles tirées lors de combats dans la zone de Machareaa al-Qaa, en Syrie, avaient traversé la frontière - mais pas des troupes.

Mais deux témoins s'exprimant sous couvert d'anonymat ont dit avoir vu plusieurs dizaines de soldats entrer au Liban. D'après l'un d'eux, des soldats syriens ont incendié plusieurs maisons. La réunion de la Ligue arabe à Bagdad est une bonne occasion pour l'Irak à majorité chiite de montrer qu'il a rejoint le monde arabe dominé par les sunnites après des années de guerre, de sanctions et d'occupation américaine -les dernières troupes de combat sont parties en décembre dernier.

Mais les dirigeants arabes, qui se méfient des liens entre le gouvernement irakien à dominance chiite et l'Iran chiite, pourraient aussi profiter du dossier syrien -Damas et Téhéran étant alliés- pour tenter de forcer Bagdad à choisir son camp. M. Zebari a insisté pour sa part sur le refus de l'Irak de se mêler des affaires intérieures des autres pays.

AP.

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