Les commémorations électoralistes de Bouteflika

A Oran, en 2008
A Oran, en 2008

Le 11 décembre 1960, la journée du Chahid, la nationalisation des Hydrocarbures, la date de naissance de l'UGTA, Bouteflika devient un consommateur de commémorations insignifiantes pour justifier ses appels à un vote "historique" le 10 mai prochain.

La visite du Président de la République à partir d'aujourd'hui, jeudi 23 à Oran pour, officiellement, des raisons commémoratives - la célébration du 41e anniversaire de la nationalisation des hydrocarbures et du 56e anniversaire de la création de l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA) - soulève plusieurs questions sur les rapports qu’entretient Bouteflika avec le pays, ses régions et ses urgences.

En effet, les raisons commémoratives d’un tel déplacement semblent plus importantes pour Bouteflika que l’urgence qui s’impose à lui à visiter les régions qui ont souffert des dernières intempéries, en Kabylie, à Bouira et dans le sud algérien, y exprimer la solidarité effective de l'Etat qu'il est censé représenter. Lors de son annonce de la tenue officielle des législatives, le 11 février dernier, au plus fort des SOS lancés par les populations isolées par les fortes de neige ayant fait une trentaine de victimes, Bouteflika a ignoré cette réalité, jugeant que la date des législatives était plus importante et décisive que les appels au secours de citoyens.

Fuyant ainsi les problèmes réels d'une Algérie, le territoire physique et sociologique semble se rétrécir pour la gouvernance de Bouteflika, à commencer par la Kabylie, devenue "zone autonome" dans les faits, comme affranchie de son règne, depuis son premier mandat.

Les dates commémoratives avancées pour justifier un tel déplacement à Oran sont elles-mêmes discréditées et ne sont motivées par aucune embellie dans la vie socioéconomique des citoyens. La valse des nominations à la tête de Sonatrach, l’insignifiance de la date de création d’une centrale syndicale depuis longtemps réduite à une caisse de résonance du pouvoir et laminée par les syndicats autonomes des corps de la fonction publique, sont, pour le moins, des prétextes fallacieux pour une "commémoration" maquillée, qui traduit une déroute géographique et électorale de Bouteflika, en mal de crédibilité, au point d’être un chef d’un Etat de "commémorations" plutôt qu' un Président à l’écoute de l’Algérie vivante.

Alors que l’année écoulée 2011 a enregistré un pic de tensions et de révoltes dans plusieurs régions d’Algérie, à l’Est du pays notamment et qu’en 2012, les intempéries ont bloqué la Kabylie, Bouteflika s’en emmuré à El Mouradia, dans un silence sidéral, faisant fi des turbulences provoquées par son règne.

Les dates commémoratives ne manquent pas en Algérie. Alors que la journée du Chahid est tombée aux oubliettes, que le 11 décembre 60 ne vit plus que dans les souvenirs évanescents d’anciens manifestants, Bouteflika s’en saisit, s’en fait le dépositaire mémoriel, et, à l’occasion, appelle les Algériens, par cette lucarne du passé, à voter "sérieux" craignant, par l’usage de ce mot, une foire d’empoigne ce 10 mai prochain. L’astuce est toute trouvée : exploiter des dates comméoratives, leur redonner du panache sur fond de lassitude et de démagogie, à des fins électoralistes.

En sus de cette déroute géographique qui fait que Bouteflika n’est jamais au bon endroit de l’Algérie qui vit, souffre, le conspue, les journées commémoratives déterrées par Bouteflika semblent aussi mortes que les législatives annoncées dans la semaine de la fête des travailleurs, le 1er mai, un autre contexte commémoratif dont ne pourra se sasir Bouteflika pour une raison bien simple : il a cassé la notion de "travailleurs" et détruit tous les ressorts du tissu industriel et agricole du pays. Même ces petits actes mémoriels par lesquels sont claironnées les prochaines législatives, paraissent dérisoires face à une cinquantenaire de l'Indépendance de l'Algérie que Bouteflika se garde d'évoquer...

R.M

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