Le président Moncef Marzouki, une providence ?

Moncef Marzouki, président de la République tunisienne.
Moncef Marzouki, président de la République tunisienne.

De tous les chefs d’Etat des pays de l’Afrique du nord, Mohamed Moncef Marzouki est celui qui est arrivé à la magistrature suprême de son pays, la Tunisie, de façon la plus démocratique qui soit.

Il a été choisi, élu, par le biais d’une assemblée constituante, formulation institutionnelle inconcevable dans l’esprit des dirigeants de cette région comme dans celle de tous les pays arabes. Il n’est pas issu du pouvoir ou de quelque fraction dominante rayonnant socialement dans la communauté tunisienne, son parcours est fait de lutte dans l’opposition et dans les droits de l’homme. Par rapport à tous les dirigeants actuels qui commandent aux destinées de leurs nations dans le Maghreb, il est le seul à détenir des diplômes universitaires et qui ait exercé une profession citoyenne inhérente à sa qualification intrinsèque. Un peu à la manière de Ferhat Abbas ou Benyoucef Benkhedda, pharmaciens, qui ont pris au tout début la tête de l’Algérie sur son indépendance. On ne peut pas en dire autant des bagages de Abddeljalil, comparable à ceux obtenus par beaucoup de dirigeants algériens sous l’auréole du FLN, parti unique de Mohamed Salah Yahiaoui ou de Cherif Messâadia, pour plus étoffer le prestige du poste que pour l’apport du savoir nécessaire à l’entreprise de la fonction.

Un homme d’Etat en or blanc

Bourguibiste malgré la relation animiste qui liait son père au premier dictateur de la Tunisie le conduisant dès l’indépendance de ce pays à l’exil vers le Maroc ? Il ne peut ne pas en tenir puisque dès la fin de son cursus de formation en France il revient dans son pays pour y travailler et militer avec toutes les misères de la police politique de Zine El Abidine Ben Ali. Il y a aussi en lui ce charisme de l’enfant prodigue que véhiculait Mohamed Boudiaf longtemps vécu au Maroc. Avec beaucoup plus d’attache pour y avoir dans le royaume une demi fratrie et une immense amitié du fait qu’il y ait grandi et étudie jusqu’au baccalauréat.

Il y aussi en lui la stature de l’intellectuel universel d’un Vaclav Havel, le premier président de la république tchèque, décédé récemment, laissant derrière lui des ouvrages traitant de la condition humaine et du combat pour la liberté et la dignité.

En clair, Mohamed Moncef Marzouki est, dans le lot des chefs d’Etat maghrébins, l’homme politique qui possède toutes les raisons et les capacités nécessaires pour avoir le droit, plus que personne ailleurs accroché dans les rênes du pouvoir, de revenir sur la situation du Maghreb actuel. La Constituante décidant qu’il soit président pour une année, certes sous la houlette d’une convention entre le parti du docteur Mustapha Ben Jafar, le Forum démocratique pour le travail et les libertés, plus connu sous le nom d’Ettakatol, et celui de Rached Ghannouchi, la plus forte formation religieuse du pays, certains parmi ses détracteurs expliquent qu’il sollicite des appuis extérieurs pour perdurer après l’échéance de 2013. Seulement, ils omettent d’ajouter que le fondateur du Congrès pour la république, lors des évènements d’octobre 1988 en Algérie alors qu’il militait dans la Ligue tunisienne des droits de l’homme il avoua sa sympathie pour la révolte en affirmant à la presse étrangère qu’il s’agissait d’un commencement de prise de conscience par les populations du Maghreb pour le combat en vue des libertés démocratiques.

Le Maghreb de l’arrière arrière petit-fils de Belkhadem

Veut-il lier son destin national à celui de l’aventure régionale à la façon dont le font pratiquement tous les chefs d’Etat de l’Europe occidentale ? Ce n’est pas incompatible à l’heure mondiale où les affaires économiques et socioculturelles sont aussi promptes que l’éclair. La mondialisation a cassé d’être une référence par rapport à une autre, c’est le seul schéma que doit adopter une nation si elle veut s’en sortir dans la concurrence internationale qui ne laisse aucune chance au bricolage d’économie politique tel qu’il s’est de tout temps ordonnancé en Algérie et en Libye, par la grâce des hydrocarbures exportés où pour diriger il suffit d’être protégé par l’armée et savoir lire et écrire seulement.

Beaucoup d’Algériens ont encore figé dans leur tête cette idée de la toute petite Tunisie , ils pensent sérieusement que le premier président élu démocratiquement au Maghreb par le pays du "goulna klima" est venu en Algérie pour arranger les affaires entre les dirigeants marocains et algériens au profit du souverain chérifien. C’est-à-dire perpétuer la question absurde qui noue l’intérêt de quelque trois cent mille habitants celui de soixante-dix millions d’âmes. Avec dans l’esprit cette pensée que ce problème se pérennise jusqu’à Hassan VIII ou Mohamed XIV et l’arrière-arrière-arrière petit-fils de Belkhadem au FLN.

Pendant que la providence gratifie le grand Maghreb des hommes d’Etat de la trempe de Mohamed Moncef Marzouki devant lequel Abdelaziz Bouteflika chez lui avait eu juste l’occasion de tailler dans le pin maritime quelques phrases de politique caduque.

Nadir Bacha

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Commentaires (7) | Réagir ?

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oziris dzeus

On devrait vérifier si ce Marzouki ne fait pas l'objet d'une interdiction d'entrée en territoire algérien comme pour Sihem Bensedrine. Si c'est vrai alors il est clair que celui qui transgresse les lois et use des passe-droit c'est le pouvoir. les algériens ne devrait pas avoir peur de sihem mais de ce moncef. en fait un président provisoire sert à quoi? Ce Marzouki n'est pas légitime à 100% puisque les Tunisiens ne l'ont pas choisit comme président, c'est un intérimaire et il devrait agir selon les prérogatives d'un intérimaire il ferait mieux d'organiser des élections présidentiels libres et démocratiques, de protéger la liberté des 10 millions tunisiens, ça serait amplement suffisant. au lieu de s'occuper des vrais préoccupations des tunisiens, il s'attaque à un sujet trop important. faudra faire la part des choses. que veut le peuple tunisien? Voir leur chef d’État monter et descendre des avions et barboter devant des journalistes. Moncef ferait mieux de rester chez lui il y a beaucoup de travail. En fait celui ci rappelle un autre qui a habité dans un avion pendant quelques années avant de décider de rester pour toujours dans son bureau.

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ali chemlal

Désolé pour votre article, M. Merzouki seul n'arrivera pas a a réanimer l'UMA sans que le problème Sahraoui ne trouve une solution juste et durable, dans l’intérêt des peuples de la région et non des régimes, car lorsqu'on est blessé, il faut soigner la blessure et non pas amputer l'organe. Votre allusion sur les 300 000 âmes contre 70 millions, c'est trop facile, envahir un pays au motif qu'il vous appartient sans consulter ses habitants, on appelle ça un déni de justice, sur lequel on ne peut pas bâtir sérieusement une union régionale.

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