Sarkozy ou la tragédie du gaullisme

Nicolas Sarkozy avec David Cameron et Abdeljalil à Tripoli
Nicolas Sarkozy avec David Cameron et Abdeljalil à Tripoli

S’il y a à faire une comparaison avec le gaullisme aujourd’hui, ce n’est pas, en tout cas, dans la pensée globale qui régente l’Ump qu’il faut aller la chercher.

Déjà pour parler comme Martine Le Pen, il prêterait à se marrer rien que d’imaginer une progéniture de l’auteur du légendaire appel du 18 juin, s’appeler Julia. Julia de Gaulle. Le général a bel et bien imaginé l’Europe, bien sûr, gravitant autour des Champs de Mars, mais une Europe avec ses racines nationales déterminées. Il a pensé un continent culturel et industriel face à une Amérique yankee hégémoniste et pernicieusement exclusive. Il avait dans l’idée de sortir du Pacte nord-atlantique à la bien avant le premier tir nucléaire. Et sachant le Royaume-Uni naturellement inféodé à la bannière étoilée, il s’en est méfié au tout début pour son accession à la communauté de l’Europe économique.

Le gaullisme people

Qui parmi les penseurs évolutionnistes de son époque, à ses premiers déboires du Mai 68 seulement, pouvaient-ils imaginer que Charles de Gaulle, sous les ordres de Washington, enverrait-il dans les airs ses chasseurs bombardiers pour frapper un Etat tiers et lyncher ses populations et dans la foulée partir en expédition concertée à la poursuite d’un chef d’Etat de pays sous-développé pétrolier pour le massacrer et libérer son peuple ? L’on se rappelle la remontée de l’Histoire qu’il n’entendait presque pas parler de la Libye lorsqu’il s’agissait avec le général Montgomery de renflouer les forces françaises dans la bataille d’Italie par la Méditerranée de la Tripolitaine.

Mais lorsque Nicolas Sarkozy marcha dans les rues de Benghazi comme un grand vainqueur après le lynchage de Mouammar Kadhafi, il se sentait le gaulliste le plus accompli de France surtout qu’il venait tout juste d’accueillir la naissance d’un enfant enfanté par une Romaine. Dont la photo en tenue d’Eve gratouillant une guitare ira par la suite étoffer les albums souvenirs de l’Elysée. Et sur ce plan, la façon de savourer sa victoire aux présidentielles dans le resto le plus people de France, le Fouquet’s, dans les Champs-Elysées, au lieu du quartier général de son parti, entouré des idoles populaires et de tous les grands banquiers, renseigne de but en blanc sur son double dessein d’afficher sa vie privée et ses alliances financières intimes. Qui rappelle à s’y méprendre l’investiture du bras droit de Charles de Gaulle, amoureux des Arts et des Lettres mais profondément affilié aux personnalités banquières, spécialement celles de Rothschild dont il était un temps son fondé de pouvoir.

C’était cette époque du triomphe des Trente glorieuses auréolée par Claude François journellement à la télévision, sans transition vite remplacé, à sa mort – accidentelle ? – par le faussement américain Johnny Hallyday.

Nicolas Sarkozy se le fait accompagner durant sa campagne pour annoncer en sourdine la culture politique yankee qui sera la sienne jusqu’à aujourd’hui. Beaucoup d’analystes, de nos jours, reviennent à l’histoire de sa famille et de ses premières alliances politiques par trop impliquées dans de grandes affinités avec les services du renseignement américain. Qui confirment, au demeurant, cette hypothèse, par le plan d’exécution du leader libyen.

Le gaullisme qui craint la Turquie

Sur le plan économique dans l’Europe gaulliste, il ne reste grosso modo que la nostalgie du vin de Champagne et de la fragrance. Le label industriel hexagonal est désormais dilué dans des ralliements financiers où un brusque retour du franc au travers de vastes expatriations d’avoirs internationaux ferait du chômage et du désinvestissement les premières préoccupations de l’Administration.

La peur bleue de la Turquie, actuellement le plus réel investisseur en Méditerranée et en même temps le grand absorbeur de produits européens, reconnu par la grande Allemagne – qui malgré la crise réalise quand même un essor de plus de trois pour cent - fait faire au président français des acrobaties discursives et législatives qui laissent penser à un désarroi stratégique qui n’a de sens que si l’on comprend que le bien fondé du subterfuge est de créer au sein de l’esprit de la Maison blanche un climat de soupçon sur le plus assidu allié de l’Otan, évidemment après le Royaume-Uni, en Europe. Faire d’Ankara un ancien immense criminel de l’Humanité bien accommodé dans les milliers de mosquées qui jonchent ses territoires forts productifs, est intéressant pour l’auteur du coup d’Etat sur le parti gaulliste de donner une idée à Washington de faire revenir Paris comme gardien du temple militaire dans le Veux continent. Si ce n’est déjà à moitié fait dans le bassin méditerranéen par le contrôle des gisements pétroliers dans le plus grand pays producteur et détenteur de réserves.

Sarkozy antigaulliste par rapport à la gauche et le Front national

De tous les chefs d’Etat en Europe en matière de mondialisation, mis à part les dirigeants de Londres, dès le lendemain de la Déclaration d’indépendance reste en concert intime avec Washington, Nicolas Sarkozy en est le plus futé et le plus coriace défenseur. En moins de deux années d’exercice présidentiel, les économistes l’ont remarqué, il réussit à faire du Cac 40 la vitrine, le tableau de bord, de la dépendance économique française à la finance mondiale. De la sorte d’une tromperie sur la monnaie intrinsèque est vécu dans son pays dans la réalité la plus dramatique. Où le filigrane du franc n’a de la valeur que par rapport au cumul des dépôts "étrangers" dans les banques françaises. Encore largement tenus à la division par 7 dans les dépenses de tout ménage, les Français au cas d’un retour brutal et obligé sur l’ancienne monnaie, ils en seraient amenés à diviser par le double à cause des grands replis de capitaux qui s’en suivraient immédiatement. Sans compter la marge nationale fiscale reconsidérée alors au confinement, déjà massacrée par les évasions et la charité partisane.

Au début du lâchage du gaullisme par Georges Pompidou la France était au quart du Pib américain avec une croissance intéressante par rapport au reste des pays industrialisés ; aujourd’hui avec Nicolas Sarkozy, elle est au huitième avec un essor de 0,4 et un taux de chômage de plus de dix pour cent. Arguments suffisants pour la gauche de dénoncer la faillite générale du gouvernement "gaulliste" antinational. Au point où le Parti socialiste qui se met derrière François Hollande son candidat à la magistrature suprême et le Front national qui conduit Martine le Pen vers le même statut, empruntent carrément, dans les précampagnes respectives, un discours de pur gaullisme pour définir les manières adéquates de "renationaliser" la France.

A-t-il été emmené à la tête de l’Etat français, au faîte de la formation gaulliste, pour précisément massacrer le gaullisme, quoi que l’on dise, cher à l’opinion nationaliste française ?

Nadir Bacha

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Commentaires (2) | Réagir ?

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wahab benidir

Une sacrée différence de taille dans tout.... à commencer par.... la taille du grand Charles et du tout ptit Nicolas- Déjà il a été toujours affirmé que l'on ne pouvait comparer que ce qui est comparable. Et cela dans tous les domaines : carrure, stature internationale, force du respect de la fonction présidentielle, langage, tics et tocs plus évidents chez l'un que chez l'autre, .... en somme la nuit et le jour. La France ne peut avoir qu'un seul et unique grand homme pour chaque siècle (Napoléon au précédent siècle) -

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kamel benzine

Sarkozy est un Hongrois de Gaulle est un Francais.