Le MDS appelle à l'instauration d'une deuxième République

Pour le MDS, l'’Algérie est à la veille d’un changement radical.
Pour le MDS, l'’Algérie est à la veille d’un changement radical.

Le Mouvement démocrate et sociale se pose la question : quelle alternative proposer à la société, en attente d’une solution concrète et réaliste ?

Dans un contexte international paradoxal, marqué par un aiguisement de la crise du système financier international générateur de profondes dépressions dont la gravité n’échappe à personne, y compris les défenseurs les plus acharnés du système néolibéral international et dont l’Algérie sera inéluctablement touchée au même titre que l’ensemble de la région, et les espoirs de liberté et de démocratie nés dans le printemps arabe et consacrés par le changement des pouvoirs totalitaires, les alternatives au changement radical dans notre pays tardent à se manifester, en particulier après l’expérience non aboutie de la CNCD (ou une ébauche de la construction de l’union) de former le large front des démocrates.

Les citoyens et patriotes s’interrogent : pourquoi l’Algérie n’a pas suivi les changements des révolutions du printemps du monde arabe ? En exprimant, sur le terrain des luttes quotidiennes, une volonté de sortie du statut quo et de l’impasse dans laquelle se trouve la société algérienne. Le MDS, conscient de la portée stratégique des prochaines échéances électorales, présente aux militants et à tous les démocrates qu’ils soient militants, syndicalistes, personnalités nationales ou cadre d’état, une contribution sur les différentes alternatives qui se présentent à la société, en vue de débattre, d’échanger et d’élaborer, collectivement, la démarche la plus bénéfique pour le pays, celle qui présente le plus de garantie à la réalisation de la perspective d’une république démocratique et sociale. L’organisation de cette rencontre nationale sur les élections s’inscrit dans le prolongement des recommandations de la conférence nationale du 11 novembre 2011.

L’Algérie est à la veille d’un changement radical. Tous les signes avant-coureurs rappellent la période d’avant octobre 1988. En témoigne le décalage, voire la rupture de confiance entre l’Etat et la société. Le classement de l’Algérie par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), en matière de développement humain, à la 96e place (sur 187 pays), en 2011, à lui seul résume la condition humaine de la société algérienne.

De légitimes questionnements, souvent contradictoires, surgissent dans le débat sur les élections, sur leur portée, les objectifs définis préalablement, les risques encourus et le minimum de conditions à réunir : quelles est la nature des changements ou réformes proposés par le pouvoir despotique ? Faut-il participer activement aux prochaines échéances électorales, et quels en sont les risques politiques ? Partant de l’expérience collective, ne seront-elles pas, comme les précédentes, entachées d’irrégularités et de fraudes et donc au service exclusif du renouvellement des "institutions" bureaucratiques du système ? Existe-t-il aujourd’hui une menace de remise en cause du caractère républicain de l’état ? Dans quelle mesure ces élections permettraient-elles une certaine accumulation des forces démocratiques ? Qu’est-ce qui explique les difficultés de construction du rassemblement des démocrates et pourquoi toutes ces accumulations (depuis la rupture d’octobre 1988) n’ont pas abouties à la construction d’un large front des partisans de la modernité et d’un état républicain ? Enfin, quelles alternatives, quelles pistes, quelle plate-forme concrète proposées à la société ?

Quelles leçons tirer des dernières élections dans le monde arabe dont l’expérience nous amène à conclure que le formidable potentiel de combat de la jeunesse, en particulier, et des couches populaires, ont vu leurs sacrifices et espoirs, détournés par les partis islamistes, consacrés dans une position majoritaire par l’exercice électoral que certains, par prudence, l’identifie à un vote sanction ?

Face à ces sincères interrogations, Il faut reconnaitre que la démarche de la commission du dialogue national ainsi que la série de textes adoptés et propositions de réformes institutionnelles n’ont produit que l’inverse des objectifs annoncés officiellement, puisque qu’elles non consacré ni les sacrifices ni les attentes des forces démocratiques, encore moins les nouvelles exigences nées des changements dans le monde arabe.

La question centrale qui mérité d’être abordée, soumise au débat, est celle de savoir en quoi les résultats de ces élections peuvent-elles être une étape vers le règlement de la crise politique profonde qui traverse toute la société et qui exprime, en dernière analyse, le grand besoin du changement radical dans la nature de l’état lui-même. Dans tous les cas de figure, les forces démocratiques devront éviter de jouer un rôle d’accompagnement d’une reproduction adaptée des forces du système despotique et mafieux, mais au contraire prendre l’initiative pour proposer concrètement une alternative vers un système démocratique et républicain consacrant, dans les faits, l’égalité des citoyens, la démocratie et la justice sociale.

Durant cette dernière période, le pouvoir a agit par des calculs étroits et tactiques, pour préserver une hégémonie sur la société et arracher l’initiative aux partisans d’une société démocratique et de justice sociale, tentant d’anticiper sur les évènements, en utilisant l’argent de la rente pétrolière pour calmer les couches et organisations sociales protestataires, dans l’unique objectif de construire sa "paix sociale", quitte à ne pas tenir compte des principes et défis de la relance économique et des exigences de la compétitivité industrielle. Le pouvoir ira même jusqu'à exploiter, à ses desseins, les sincères sentiments de paix et de sécurité des citoyens après les traumatisants évènements des 20 années de terrorisme islamiste.

La question demeure posée et soumise au débat : quelle alternative proposer à la société, en attente d’une solution concrète et réaliste. Dans ce cadre, il faut souligner qu’il existe un problème de lisibilité de la situation politique et de ses tendances réelles, du fait d’un fonctionnement opaque du système politique algérien. Le MDS, conscient des enjeux de ces échéances électorales et réformes proposées, s’interroge sur les scénarios possibles vers lesquels la situation politique pourrait évoluer et soumet à la réflexion collective trois d’entre eux.

1. Un scénario catastrophe qui peut survenir dans un contexte politique régional (ou interne) de catastrophe nationale : conflit régional, guerre ou une grave crise économique. Ce qui exige de poser la nécessité du front intérieur.

2. Des élections totalement contrôlées par le pouvoir : ces élections ne visent qu’à la reproduction du pouvoir. La question de la participation ou du boycott est tranchée par les militants et les citoyens. A la seule condition d’une participation effective sur le terrain des luttes. Cette approche se justifie par la nécessité d’une accumulation des forces (construction des organisations) que se soit dans l’option du boycott ou de la participation aux élections.

3. Une élection de rupture : on peut envisager des changements dans la nature de l’état. Nous devons mieux nous organiser, choisir nos alliés et nous battre pour le changement du système. Ce qui nécessite un rassemblement du camp démocratique.

Dans le cadre de ce scénario, une étape de transition ou un gouvernement de technocrates sont également des possibilités d’évolution et le début de règlement de la situation de crise politique. A notre avis, dans te tels scénarios, toutes les possibilités sont envisageables, même celle d’un référendum par exemple.

Dans ce travail d’anticipation et de projection des éventuelles hypothèses d’évolution, une autre variable, un taux d’abstention important (ce qui a caractérisé toutes élections passées à l’exception de celle à l’époque de Zéroual), est également envisageable.

Une des questions clés qui reste un point commun à ces trois scénarios est la capacité des forces démocratiques à mener dans les meilleures conditions possible la bataille des élections. Aussi, si la bataille pour la seconde République pourrait bien s’incarner autour du changement de Constitution, alors quels compromis serions-nous disposés à passer dans ce cadre ?

En tirant les leçons des expériences accumulées, les militants du MDS ont la ferme conviction qu’une telle tâche historique qui engage l’avenir du pays, ne saurait être la responsabilité ou l’aboutissement d’un seule force ou parti politique. L’unique garantie politique réside dans la construction d’un large rassemblement des forces démocratiques, loin des querelles de chapelles, des préjugés et des divisions artificielles ou partisanes. Dans cette perspective, la concertation avec les forces démocratiques, les organisations sociales et les personnalités nationales devrait être une orientation prioritaire. En définitive, on ne peut sortir de la crise sans cristalliser et mettre en avant un projet clair, cohérent, pris en charge de façon démocratique et consciente par la société.

Sans attendre le moment des échéances électorales, les démocrates devraient exiger, en premier lieu, le respect des libertés fondamentales qui constituent le socle de la société moderne, l’ouverture des espaces de libertés, la garantie de participation dans les médias lourds et se doter de cadres démocratiques de dénonciation de toutes les injustices et dérives du système despotique.

Si l’on tient compte des données politiques actuelles, nous pouvons affirmer que nous sommes dans le 2eme scénario (des élections totalement contrôlées par le pouvoir). Mais en s’inscrivant dans la perspective historique, nous devons toujours travailler (et accumuler) pour le scénario de rupture, en gardant à l’esprit que ce système est historiquement finissant et que de probables crises, "fissurations internes", éclatement de l’alliance gouvernementale ou grave crise économique pourraient se produire à tout moment de l’évolution dans une société en pleine turbulence sociale et politique.

Historiquement, le monde est dans une perspective et dynamique de fin de règne des systèmes totalitaires. Exactement, comme au siècle passé, lorsque le système colonial était dans un processus de démantèlement.

Dans un nécessaire moment de réflexion et d’anticipation, toute la question est de savoir combien de temps pourrait durer la fragile stabilité d’un tel système qui tente de se donner un nouveau souffle avec un éventuel «élargissement» de l’alliance au pouvoir mais avec un certain rétrécissement de sa base sociale et donc, inévitablement, de fortes probabilités de production de crises sociales et de ruptures. En se projetant dans cette perspective, interrogeons-nous : quel serait justement le rôle, les futurs alliés et surtout la plate-forme de combat (ainsi que la base sociale) d’un parti de gauche ? Quels rapports d’alliance avec les segments patriotiques du système ?

Dans ce moment d’évaluation, il est d’une importance capitale de tenir compte de deux facteurs essentiels, qu’on ne peut occulter et qui ont marqué et structuré l’histoire de la société algérienne durant ces 20 dernières années et qu’il s’agit d’intégrer dans notre plate-forme politique : combattre l’amnésie et mettre en valeur la reconnaissance de la république à celles et à ceux qui ont participé au combat et à la résistance contre le terrorisme islamiste au plan militaire, politique et idéologique. Et le rôle négatif de la police politique qui a organisé méthodiquement le démantèlement des organisations démocratiques et sociales, la marginalisation des cadres du secteur économique, des potentialités scientifiques et des compétences nationales. Ce qui nous amènerait, dans le cadre de notre revendication de refondation de l’Etat national, de manière prioritaire, à reconsidérer le rôle et les missions des services de sécurité. Il faut se battre pour forger un consensus dans la société sur ces deux questions essentielles, une tache qui va en parallèle avec la nécessité de la fondation de la 2e république à laquelle appelle le MDS.

A la veille du cinquantième anniversaire de l’indépendance nationale, la société algérienne qui aspire à la paix, la justice sociale, la liberté et la démocratie, se prépare à un autre rendez-vous de l’histoire. Elle rejette radicalement le pouvoir despotique, comme elle a rejeté, hier, le système colonial. Il n’y aura pas de miracle et les dictatures ne sont pas une fatalité de l’histoire. Si certaines conditions sont réunies, parmi lesquelles le déverrouillage des champs politique et médiatique, ces élections peuvent créer les possibilités d’une rupture et d’une transition vers une société démocratique et sociale. C’est la nette conviction du MDS : seul un véritable changement démocratique pourrait prémunir l’Algérie d’une éventuelle catastrophe.

Secrétariat du Mouvement démocrate et social (MDS)

N.B : Cette contribution au débat est un résumé des débats de la réunion du collectif central du MDS du 29 décembre 2011.

Plus d'articles de : Débats

Commentaires (4) | Réagir ?

avatar
kamel benzine

Mais si il y a une république créée par Abane Ramdane 22. 08. 1956 au congrès de la Soummam mais dommage cette République a disparu en décembre 1957 après son assassinat par les voyous d'Oujda (Boussouf, Bouteflika, Boumediene et suite) et des Egyptiens (Djamel Abdenasser et Fethi Dib). D'ailleurs je ne sais pas pourquoi nos historiens ne parlent pas de cela (république algérienne démocratique et sociale.)

avatar
Guel Dring

Une deuxième république ? Mais où est donc la 1ère ? M. Ali Haroun a reconnu ces derniers temps

que depuis l'indépendance toutes les élections ont été entachées de fraudes. Les gouvernements ont été nommés en fonction de la règle des quotas. Les communes ont été gérées grâce à l'achat de voix et des recommandations. Disons qu'il pourrait y avoir une 1ère République bis.

visualisation: 2 / 4