Algérie - Maroc : pour un double collège

M6 et Bouteflika
M6 et Bouteflika

Comment peut-on décourager les populations de l’Algérie vis-à-vis du Maroc dans le cadre de relations de voisinage prometteur ?

Par la franchise, simplement, la vertu parmi les plus sacrées dans le rapport entre gouvernants et contribuables : le chef de la diplomatie nationale, qui vient de recevoir son homologue marocain pour discuter de la meilleure implication mutuelle dans les affaires communautaires, dit partout à qui daigne l’entendre que les retrouvailles entre les deux peuples n’est pas pour demain. Mais en même temps que le développement dans tous les secteurs d’activité, économiques, sociaux et culturels, ne doit laisser en reste aucun effort, de part et d’autre, pour hisser les deux pays à un niveau de rapprochement aussi fraternel que puissant dans un Maghreb épanoui.

Relations prospères à guichet fermé

"L'Algérie veut consolider ses relations avec le Maroc dans tous les domaines. Nous allons organiser des rencontres, dans les semaines qui viennent pour discuter de la coopération dans les domaines économique, social et politique, entre les hommes d'affaires marocains et algériens." dit Mourad Medelci, dans un point de presse, à la radio, à la télevision et au cours de dîners et de rencontres en marge de n’importe quoi.

C’est-à-dire faire tout ça, tous ces dons de la bonne promiscuité constructive à la condition des frontières closes. "Il n'y a pas de discussions directes et urgentes avec le Maroc sur le dossier de l'ouverture des frontières", répète-t-il aussi - quoique ce n’est pas l’avis d’Ould Kabila, le très actif ministre de l’Intérieur, façon de laisser comprendre que l’on ne danse pas sur le même pied autour du président de la République. Qui depuis belle lurette ne dit rien sur le sujet.

Toutefois le message est quand bien même clair : les rapports bilatéraux intelligents ne doivent pas se faire entre les peuples. Les citoyens et les sujets ne sont pas éligibles dans le concert "pour l’instant", ils viendront par la suite, longtemps après les castes choisies par les gouvernants des deux pays. Un peu comme les lobbies français qui s’accaparent toutes les bonnes affaires lucratives dans le Maghreb, y compris la Libye, maintenant que la Jamahiriya de Kadhafi est kaput.

Cependant dans la minute de l’espace-temps électronique, les travailleurs, hommes et femmes, de Berkane, Sidi Bel Abbès, Tanger ou Constantine, ont depuis longtemps compris que le Maghreb mijoté par les dirigeants est un Maghreb qui ressemble énormément à l’ancienne Afrique du nord de Berliet, Bata, Lesieur, l’Alsacienne et Vilmorin. Un Maghreb carrément colonial, encadré pat ses hommes d’affaires sous-traitant la bonne santé des fractions capitalistes traditionnelles de Marseille, Lyon ou Lille et Strasbourg.

Pauvres, musulmans et suspects

Les pauvres ressortissants qui échangent journellement dans les réseaux sociaux de la toile n’ignorent pas que la question du Sahara libéré par les Espagnols, qui a été de tous temps le problème des chefs, ne constitue pas une entrave majeure qui risque de menacer les intérêts futurs projetés au sommet. Ce conflit, s’il en est, concoure plutôt à renforcer des scenarii de remue-ménage médiatique incitant les populations à se considérer psychologiquement comme potentiellement belliqueuses. Et donc, momentanément, inaptes à des formes de concertation affranchie, les frontières libres en même temps que les idées.

Par ailleurs, ce n’est pas parce le gouvernement marocain est aujourd’hui religieux que ça veut dire que si en mai prochain les Algériens votent laïc, le lendemain les vainqueurs iront derechef investir les bars et les discothèques. Non, à Oujda, Meknès, Oran ou Annaba, dès la réouverture des frontières, beaucoup parmi les contents des retrouvailles, bons musulmans pratiquants, prendront le même pas vers les mosquées et dès l’explosion accidentelle d’une butane à proximité d’un hôtel touristique ou d’une unité manufacturière, les flics iront chercher de l’Aqmi parmi les voyageurs. Dans les parages comme anodins touristes, pas en tant qu’hommes d’affaires pour le besoin desquels, à coup sûr, les gouvernements respectifs ne manqueront pas d’en déléguer une espèce de milice. Les dirigeants maghrébins n’ont pas confiance en leurs ressortissants, ceux-ci aussi pour ceux-là.

Nadir Bacha

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Commentaires (1) | Réagir ?

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Ali Mansouri

Les marocains sont des sujets et les algériens sont des citoyens voilà ce qui nous différencie, les algériens ont une haine viscérale envers leurs dirigeants, ils la manifestent sans complexe tandis que les marocains, à quelques exceptions prés (opposition éclairée) malheureusement très minoritaire, font des courbettes à ne pas en finir face au roitelet, et le vénèrent comme un Dieu, ils voient leur roitelet régner sur tout le Maghreb, voilà une différence de taille qu'il faut ajouter dans votre article Mr Bacha, les deux peuples même proche culturellement, ne se ressemblent pas sur plusieurs points, surtout celui du nif.