Algérie : un malheureux demi-siècle de mensonges

Bouteflika
Bouteflika

Il n’y a que les hommes qui puissent mentir parce qu’ils disposent de la faculté du langage.

Des études ont été menées sur des animaux pour démonter qu’ils n’ont pas le pouvoir de le faire ; des expériences très poussées ont été élaborées auprès du chimpanzé, avec des argumentations scientifiques imparables, pour aboutir au résultat que cet animal peut à la limite tromper mais pas mentir. Le mensonge est donc, avec le rire, le second propre de l’homme.

Et notre président nous le démontre, carte sur table, le sourire aux lèvres, les bras dans le ciel et le regard plein de certitudes sur le téléspectateur adulte se rongeant les ongles parce qu’en train de se demander dans quel compartiment de son désespoir il pourrait caser ce prophétique alignement de mots : "Je serai celui qui transmettra le pouvoir aux générations d’après l’indépendance !"

C’est Abdelaziz Bouteflika qui parle au cours de sa campagne présidentielle, en 2004 pour un deuxième mandat, monopolisant à lui seul la chaîne de télévision publique, dans sa double version locale et internationale. Cette affirmation, il la répète dans ses réunions avec les populations mais dans les proximités intimes aussi, au cours de dîners ou d’entretiens avec les dignitaires – vous comprenez que cette appellation en Algérie, depuis la main basse sur la rente pétrolière, est synonyme de membres d’association de bande de malfaiteurs.

A peine réinvesti, l’âge réel de ses ministres vieillit encore plus, même les retraités parmi les hauts fonctionnaires reprennent-ils du service dans les affaires publiques importantes sans qu’ils ne le demandent, avec des marges budgétaires en veux-tu en voilà. J’ai rencontré un de ces "responsables" parmi ces miraculés de la vieillesse qui n’a pas hésité, à la vitesse de l’éclair, à troquer sa âbaya et son chapelet contre le costume sorti du placard sentant le camphre et un ordinateur portable acheté le jour même de son rappel.

Le seul critère acceptable pour participer à l’aventure gérontocratique du pouvoir ne relève ni de la compétence particulière ni de la probité reconnue mais de l’allégeance, corps et âme, aux desseins d’un ancien dirigeant qui revient au pouvoir et décidé d’y rester jusqu’à la mort, après avoir été évacué pendant longtemps de la mémoire nationale, pour avoir été chef de la diplomatie ou en tant qu’ancien membre du Conseil de la révolution impliqué dans une affaire de malversation.

Le faux espoir de Lebib

En tout cas, la promesse de passer la manivelle aux enfants de l’indépendance, surtout après le coup d’Etat sur la Constitution et sur la confiance populaire pour casser la barrière au renouvellement des mandats, elle possède quelque chose de cynique qui rappelle aux citoyens qui lisent l’histoire des biographies terre à terre que l’auteur de cette trompeuse sentence a été ministre à vingt et un an et sans diplôme ou une quelconque qualification académique, à la manière, par exemple, d’un Ferhat Abbas, Mustapha Lacheraf ou Abderrahmane Farès et Benyoucef Benkhadda.

Quel ministre aujourd’hui, huit ans déjà après ce serment, n’a pas largement beaucoup plus de cinquante ans en ce jour de janvier 2012 ?

L’on avait cru un peu quand il a nommé Sid Ali Lebib à la Jeunesse et aux sports, cet ancien grand athlète, diplômé de médecine, la quarantaine, fort intègre, méthodique et discipliné, n’hésitant pas à se faire des ennemis parmi les caciques, avant de lui faire subir les sables mouvants de l’univers de la corruption et de la forfaiture par excellence, les douanes ya el khawa, afin que tout le monde l’y attende pour assister à l’extinction de son ardeur juvénile, histoire de d’expliquer par l’absurde aux citoyens que l’Algérie n’est pas encore prête à accorder la confiance à sa jeunesse.

Que l’on doit assister jusqu’à la fin des temps. Par les lignes de crédit sous la sauvage formule de l’"emploi jeune", grande fomentatrice de voyoucratie. Au lieu de mettre cet argent le plus rationnellement du monde dans les centres de formation pour les déperditions scolaires et en même temps dans l’humanisation des infrastructures et des prestations au sein des cursus scolaires et universitaires.

Comment ne pas comprendre un étudiant de biologie qui abandonne ses études aussitôt qu’un ami qui a patiné en première année secondaire et qui, entre deux coups de deal, obtient de la grâce de Bouteflika, tombés du ciel, des véhicules flambant neuf, pour faire patron d’une boîte de location voitures ?

Et là aussi, le prometteur de la sacrée passation de consignes ne va pas tarder à nous faire la démonstration que le jeune Algérien est inapte à la responsabilité parce que les moyens matériels alloués gracieusement sont détournés au profit de business criminels.

Il ne dit pas que c’est son école qui ne leur apprend pas à discerner entre le bien et le mal, que c’est son système, le système du "quatre-quatre entre les mains et un quart dans la tête", qui permet cela et pas autre chose que cela. Du moment que c’est le fric du pétrole qui décide de la crasse mentale qui nous gouverne, et de toutes les promesses pour le faire.

Mais les pleurs, les cris de douleurs, c’est-à-dire la menace sur l’espèce, ce n’est pas le propre de l’homme, c’est autrement plus sérieux parce que c’est la manifestation de la volonté de survie, la lutte contre la mort, qui n’a désormais plus le droit, le temps, d’écouter les promesses et les serments. La jeunesse a fait ce qu’il fallait faire avec le colonialisme français, la jeunesse fera de même avec ceux qui lui donnent pour son malheur la preuve que finalement ils font tout pour le maintenir.

Nadir Bacha

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Commentaires (3) | Réagir ?

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Notproud

Calife à la place du calife, voyons! qu'elle élégance... il fait l'air constipé ! Sur son trône !

Il faudra purger tout ça au Karcher.

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Farid Mnebhi

Dilemme politique en Algérie, gros cafouillage et maux de tête des autorités algériennes

Une lecture neutre de la presse algérienne ces derniers jours, nous amène à nous poser certaines questions sur la volonté des autorités algériennes, civiles et, surtout militaires, à ouvrir le champ politique dans leur pays et offrir au peuple algérien, pour la première fois depuis son indépendance, le droit de s’exprimer librement sur leur devenir.

En effet, il est de notoriété publique que l’indépendance algérienne, acquise dans le sang et grâce aux kabyles, a été tout simplement confisquée par des anciens enfants de la troupe et des soi-disant officiers des armées des frontières (installés à l’époque au Maroc et en Tunisie), et aujourd’hui aux commandes de l’Etat algérien.

Toutes les tentatives d’expression de liberté, de démocratie, de justice, des droits de l’homme et de remise en cause du système politique ont été annihilées sauvagement par le système socialo-stalinien instauré par Boumediene et perpétué sans vergogne par ses remplaçants.

Après l’élimination physique de tous les chefs historiques, les coups d’Etat, les révoltes kabyles et sociales, des élections législatives annulées et les bains sang, les tortures et les internements dans le sud algérien qui s’ensuivirent, les pseudos dirigeants algériens tentent aujourd’hui d’offrir à leur peuple une démocratie à la mesure de leur propre costume.

C’est oublier que les Algériens ne sont pas dupes. Avec. Internet, la télévision satellitaire, facebook, twiter ils sont au courant de tous les maux qui secouent leur pays, des détournements financiers de leurs dirigeants et leur l’incompétence, tant au plan interne qu’externe.

A quelque mois des présidentielles et des législatives, l’Algérie se cherche encore une nouvelle constitution, une nouvelle loi électorale, un futur président et tente de multiplier le nombre partis politiques afin de diviser la société politique et éviter un remake d’une victoire inéluctable des islamistes avec pour résultat l’annulation des prochaines législatives.

D’ailleurs, il semblerait, que les partis islamistes soient en position de force pour les prochaines législatives, notamment après le retrait du Mouvement de la Société pour la Paix (MSP), un des trois partis de l’alliance présidentielle au pouvoir.

Ce retrait est motivé par le fait que les lois votées dans le cadre des réformes ont été vidées de leur contenu, notamment sur les libertés, la transparence et l’ouverture politique et de la presse. Tout est dit, il me semble.

Par ailleurs, le Front des forces socialistes (FFS), et le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) accusent la présidence algérienne et le DRS (service de renseignement) de se livrer à une ?guerre pour s’assurer le contrôle de l’islamisme pour sauver le système des passe-droits et de la négation des droits humains.

En conclusion, il y a lieu de souligner que l’Algérie vit aujourd’hui un regain politique, sur fond de double verrouillage médiatico-politique avec l’adoption d’une loi sur l’information contraignante pour la liberté de la presse et d’une loi sur les associations interdisant les rassemblements publics, avec pour grande inconnue les salafistes, dont la montée en puissance inquiète une partie de la société algérienne, mais également ses voisins et l’occident.

En vous demandant de bien vouloir publier et diffuser ce papier. Une réponse par courriel serait appréciée. Cordialement. Farid Mnebhi.

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