La Turquie prête à intervenir en Syrie

Tayyep Erdogan, premier ministre turc
Tayyep Erdogan, premier ministre turc

La Turquie n'a pas écarté mardi l'option d'une intervention militaire en Syrie en cas de poursuite de la répression des manifestations hostiles au président Bachar Al Assad.

Mais, signe des divisions persistantes entre les puissances étrangères dans le dossier syrien, la Russie s'est dite opposée à un embargo sur les livraisons d'armes à Damas et a estimé qu'il fallait cesser de poser des ultimatums aux autorités syriennes. Le Conseil des droits de l'homme des Nations unies a déclaré lundi que l'armée et les forces de sécurité syriennes avaient commis des "crimes contre l'humanité" - meurtres, tortures et viols - et réclamé l'instauration d'un embargo sur les livraisons d'armes au régime de Damas.

Malgré l'adoption de nouvelles sanctions économiques et le nombre croissant de déclarations condamnant la répression des manifestations, le président Bachar Al Assad s'accroche au pouvoir et continue d'imputer les violences à des "groupes terroristes armés" soutenus par l'étranger. Des accusations infondées que le régime répète depuis des mois au demeurant. L'Occident a jusqu'à présent toujours écarté l'hypothèse d'une intervention militaire similaire à celle menée en Libye pour protéger la population civile des forces de Mouammar Kadhafi.

Face à l'impasse des discussions avec Damas, le ministre des Affaires étrangères Ahmet Davutoglu a déclaré mardi que l'option militaire restait sur la table "Si l'oppression se poursuit, la Turquie est prête à tout scénario. Nous espérons qu'une intervention militaire ne sera jamais nécessaire. Le régime syrien doit trouver un moyen de faire la paix avec son propre peuple", a dit le ministre dans une interview à la chaîne de télévision turque Kanal 24. Il a estimé qu'un régime qui torture son propre peuple n'avait aucune chance de se maintenir au pouvoir.

"Zone tampon"

La communauté internationale pourrait être amenée à décider de l'instauration d'une "zone tampon" au cas où des centaines de milliers de Syriens chercheraient à fuir les violences dans leur pays, a-t-il ajouté. Les autorités turques devaient annoncer de nouvelles sanctions contre la Syrie à l'issue d'une réunion entre le chef de la diplomatie, le président Abdullah Gül, et le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan.

Si les opérations militaires aériennes contre les forces kadhafistes en Libye se sont révélées cruciales pour permettre aux rebelles de chasser l'ancien "Guide" de la révolution, l'Occident montre plus de réticences à intervenir militairement en Syrie en raison de la position géographique de Damas, voisin d'Israël et du Liban, et de ses liens avec l'Iran.

A Moscou, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov a rejeté mardi l'idée d'un embargo sur les livraisons d'armes à la Syrie.

"Nous savons comment les choses se sont passées en Libye, où l'embargo sur les armes n'a été appliqué qu'à l'armée libyenne. L'opposition a reçu des armes, et des pays comme la France et le Qatar en ont parlé publiquement, toute honte bue", a-t-il dit lors d'une conférence de presse en compagnie de son homologue islandais, à Moscou. "Plus les événements en Syrie dureront, plus la situation nous préoccupera. Pour l'essentiel, des groupes armés provoquent les autorités. Attendre des autorités qu'elles ferment les yeux là-dessus n'est pas juste", a ajouté le chef de la diplomatie russe.

SANCTIONS TURQUES

En octobre, de concert avec la Chine, la Russie avait opposé son veto à une résolution du Conseil de sécurité de l'Onu condamnant les violences perpétrées par le régime du président Bachar Al Assad. Ces deux pays sont d'ailleurs les derniers soutiens du régime syrien.

La Syrie a représenté 7% du total des livraisons d'armes russes à l'étranger en 2010, selon le club de réflexion russe CAST, consacré aux questions militaires. Moscou a exhorté le président Assad à mettre en place des réformes mais n'a pas appelé à sa démission et a accusé les pays occidentaux de chercher à mener une intervention armée.

Le ministre turc des Transports, Binali Yildirim, a fait savoir mardi que son pays poursuivrait ses échanges commerciaux avec le Proche-Orient et le Moyen-Orient via l'Irak au cas où les violences viendraient à perdurer en Syrie.

La Turquie devrait, dans la foulée de la Ligue arabe, imposer à son tour des sanctions à la Syrie, avec laquelle elle a 800 km de frontières. Yildirim a précisé que ces sanctions seraient prises de sorte qu'elles ne nuisent pas à la population syrienne elle-même.

Une semaine après avoir suspendu la Syrie, la Ligue arabe a décidé dimanche, à une large majorité de ses 22 membres, d'imposer des sanctions économiques, financières et politiques à l'encontre de Damas. Le Liban et l'Irak, deux pays limitrophes de la Syrie, ont voté contre. Le Liban, dont la majorité gouvernementale est sous la coupe du Hisbollah a annoncé qu'il refusait d'appliquer ces sanctions. De même, Bagdad (là également les chiites tiennent le gouvernement) a laissé entendre qu'il ne les imposerait pas non plus.

Avec Reuters

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