La Ligue arabe a adopté des sanctions économiques contre la Syrie

Bachar Al Assad, l'héritier de son père à la présidence syrienne.
Bachar Al Assad, l'héritier de son père à la présidence syrienne.

Les transactions commerciales avec Damas, la suspension de liaisons aériennes et les comptes bancaires du gouvernement syrien dans les pays arabes seront gelés.

La Ligue arabe a adopté, dimanche, des sanctions économiques contre la Syrie pour contraindre le régime à faire cesser la répression, a annoncé le Premier ministre qatari Hamad ben Jassem al-Thani à l'issue d'un conseil extraordinaire des ministres arabes au Caire.

Ces sanctions comprennent un gel des transactions commerciales avec le gouvernement syrien et des comptes bancaires du gouvernement dans les pays arabes, la suspension des liaisons aériennes entre les pays arabes et la Syrie et une interdiction de voyager dans les pays arabes pour des responsables à déterminer, selon la résolution votée par la Ligue.

La première étape a été franchie samedi au Caire où les ministres arabes des Finances et de l'Économie se sont réunis pour discuter et émaboré un premier train de sanctions économiques. Lors de la réunion, qui s'est ouverte en début de soirée dans un grand hôtel de la capitale égyptienne, les ministres ont retenu l'essentiel des sanctions envisageables, soumises dimanche à l'approbation de leurs collègues des Affaires étrangères en réunion au Caire.

Toutes sanctions retenues par les ministres des Finances sont adoptées par leurs collègues des Affaires étrangères dimanche : "L'arrêt des liaisons aériennes avec la Syrie, le gel des comptes bancaires du régime et les transactions avec la Banque centrale syrienne".

"Dégradation des conditions de vie"

Les pays arabes s'attendent en effet à ce que les sanctions entraînent "une dégradation des conditions de vie en Syrie, une hausse du prix de l'essence et des produits alimentaires et l'aggravation du chômage et de la pauvreté", selon ces sources. Le vice-Premier ministre turc Ali Babacan, dont le pays est l'un des principaux partenaires commerciaux de la Syrie, a pour la première fois participé à cette réunion, décidée après que Damas a ignoré vendredi un ultimatum fixé par la Ligue arabe pour accepter un plan de sortie de crise qui prévoyait la fin des violences et le déploiement d'observateurs arabes dans le pays. Auparavant, la Ligue arabe avait rejeté une série de modifications réclamées par Damas sur le plan, assurant qu'elles le vidaient de sa substance.

L'économie syrienne est déjà sérieusement affectée par des sanctions européennes et américaines. Des mesures similaires de la Ligue arabe risquent d'étouffer la Syrie, dont la moitié des exportations et près d'un quart des importations se font avec les pays arabes. Pour les liaisons aériennes, le régime syrien pourrait toujours utiliser le Liban voisin qui a refusé toute sanction contre le régime. Restent les sanctions économiques : si les pays du Golfe, premiers investisseurs du pays, appliquaient fermement ces sanctions, il y a lieu de s'attendre à une sévère dégradation de la situation socio-économique de la Syrie. Ce train de sanctions a été approuvé par deux tiers des 22 pays membres de la Ligue arabe. Si les monarchies arabes du Golfe, emmenées par l'Arabie saoudite, prônent une ligne dure à l'égard du régime syrien, d'autres pays ont exprimé de vives réticences, voire leur opposition, quant à l'opportunité de sanctionner économiquement la Syrie.

L'Irak, le Liban et la jordanie, peu chauds...

"L'Irak a fait part de ses réserves sur le projet de décision de la Ligue arabe", a déclaré, samedi, le ministre irakien des Affaires étrangères, Hoshyar Zebari, ajoutant qu'il était "impossible, du point de vue de l'Irak, d'imposer des sanctions à la Syrie". Dès jeudi, le Liban avait fait savoir qu'il ne voterait pas en faveur des sanctions.

Et samedi, le ministre jordanien des Affaires étrangères, Nasser Jawdeh, a demandé que les sanctions soient "compatibles avec les intérêts de chaque État", rappelant par exemple que les importations jordaniennes transitaient par voie terrestre par la Syrie. Le 12 novembre, la Ligue arabe avait suspendu la participation de la Syrie à ses réunions et menacé Damas de sanctions économiques par 18 voix sur 22 membres : l'Irak s'était abstenu, le Yémen, le Liban et la Syrie ont voté contre.

Guérilla et assassinats

Sur le terrain, la protestation pacifique glisse chaque jour un peu plus dans la guérilla armée. Au moins dix membres des forces gouvernementales ont été tués vendredi dans l'est de la Syrie, où cinq civils dont un enfant sont morts samedi sous les tirs des forces de l'ordre, a rapporté l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).

Au moins dix militaires et membres des forces de sécurité ont été tués dans un accrochage avec des déserteurs vendredi soir à Deir Ezzor (est), a annoncé samedi l'OSDH, basé au Royaume-Uni, précisant que trois déserteurs avaient été blessés, dont un grièvement. Il s'agit d'une des attaques les plus meurtrières contre les forces gouvernementales avec celle de jeudi contre six pilotes.

Samedi, quatre civils dont un enfant de 10 ans ont été tués par des tirs des forces de sécurité à Homs (centre) et un cinquième civil est mort au cours d'une perquisition à l'aube à Deir Ezzor, selon l'OSDH. De plus, les corps de deux hommes arrêtés pour l'un il y a un mois et pour l'autre il y a quelques jours ont été remis à leurs familles à Homs, selon la même source.

Ces décès surviennent au lendemain de la mort de 16 civils, selon un nouveau bilan de l'OSDH: deux à Deir Ezzor, six dans la province de Homs, six dans la région de Hama (centre), un dans la région de Deraa (sud) et un garçon dans la région de Damas. Vendredi, des milliers de Syriens ont manifesté pour soutenir les déserteurs et demander à l'Armée syrienne libre (ASL) de protéger "la révolution pacifique". L'ASL, dont le chef Riad Al-Assad est basé en Turquie, a revendiqué des attaques contre l'armée, dont celle jeudi contre six pilotes.

Rappelons enfin que la répression du mouvement de contestation contre le régime a fait plus de 3 500 morts depuis la mi-mars, selon l'ONU, et entraîné des dizaines de milliers d'arrestations.

Yacine K./AFP

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