Machistes, les députés ne veulent pas plus de femmes élues

Les députés ont détricoté le projet de loi sur la représentation des femmes élues.
Les députés ont détricoté le projet de loi sur la représentation des femmes élues.

Le détricotage des réformes promises a commencé. L’APN a adopté jeudi la nouvelle loi sur la représentation des femmes dans les assemblées élues. Mais contre toute attente, celle-ci réduit sciemment les possibilités pour les femmes d'être élues. Plus qu’elle ne les favorise.

Les députés de la majorité sont arrivés à leur fin. Ils viennent de passer un véritable coup de rabot sur le projet de loi sur la représentation des femmes. D’abord l’article 3 du projet. Celui-ci n’exige plus que les femmes soient bien placées sur les listes électorales et qu’on leur accorde un pourcentage sur le nombre de sièges remportés. Ce nouvel artifice permet aux formations politiques de placer leurs candidates en fin de liste, tout en ayant le pourcentage requis, en vue d’éviter aux hommes de perdre des sièges au détriment des femmes. Ici, comme ailleurs, les femmes seront toujours des faire-valoir. Une vitrine pour faire bonne figure.

Ensuite, la nouvelle loi organise un système de pourcentages de représentation féminine proportionnels au nombre de sièges par wilaya. Les députés ont préféré des pourcentages proportionnels au nombre de sièges par wilaya que le fameux quota de 30% de femmes sur les listes de candidatures, préconisé dans le projet initial. Le taux est passé à 20% pour les wilayas de 4 sièges, 30% pour plus de 5 sièges, 35% pour 14 sièges et plus, et enfin 40% pour plus de 32 sièges. Mais pas seulement. Il a écarté également la nécessité de placer une femme en tête de liste ou d'accorder aux élues un pourcentage sur le nombre de sièges remportés. En clair, les députés ont combiné pour arriver à mettre en place une véritable arithmétique qui déshabille entièrement le projet de loi.

Le projet initial proposait un quota de 30% de femmes sur toutes les listes électorales. Mais il fallait compter avec la misogynie des parlementaires qui tiennent à garder la main sur leur circonscription et leur liste. En définitive, ils ont rejeté l'obligation de quota de 30 %. Ledit projet de loi était en effet beaucoup plus favorable aux femmes. Il avait été soumis à l'Assemblée par le président, qui souhaitait manifestement opérer de réels progrès dans ce domaine. Mais il a subi un pilonnage systématique particulièrement des députés du FLN, par ailleurs soutien inconditionnel du président. Le choix initial de 30% de femmes élues représentait un pourcentage conforme à la convention des Nations unies sur l'élimination de toutes formes de discrimination envers les femmes.

Le vote à main levée a été acquis à la majorité absolue. 213 députés étaient présents sur 389, dont 30 femmes, que compte l'Assemblée. 113 ont signé des procurations pour le vote. Les députés du Mouvement de la société pour la paix (MSP, islamiste, membre de l'Alliance présidentielle, 51 députés), et du Parti des travailleurs (PT avec 26 députés) se sont abstenus. Ceux du Rassemblement pour la culture et la démocratie (19 députés) ont gelé depuis des mois leurs activités au sein de l'Assemblée.

C’est dire que nos chers députés n’entendent pas laisser les femmes grignoter leur territoire. L’Assemblée nationale vient ainsi de montrer qu’elle est l’un des éléments de blocage de toute réforme politique. Cette énième manœuvre va dans le sens de tous ceux qui appelait à la dissolution de l’APN.

La loi devrait être votée au printemps

La nouvelle loi devrait être votée par le Sénat et sera appliquée aux prochaines législatives du printemps 2012. Elle prévoit donc des taux de représentativité des femmes variables, selon la taille de la circonscription. "Cette loi est une discrimination territoriale et sexuelle à l'encontre des femmes", a assuré à l'AFP Amina Gharbi Bounab, députée du parti présidentiel Front de Libération nationale (FLN).

"Coup d'Etat" des hommes

"La discrimination territoriale est un précédent dans les lois algériennes. Je viens d'une wilaya qui a quatre sièges et j'ai été élue", a ajouté Yasmina Lakehal.

En colère contre "ce coup d'Etat" des députés masculins, Saïda Bounab juge que "même dans les foyers, les hommes sont devenus de simples pères biologiques. Les femmes gèrent tout".

Cette loi était l'un des points phares des réformes promises par le président Bouteflika et celle qui a soulevé le plus de polémique. Le ministre de la Justice Tayeb Belaïz rappelait lors des débats sur le projet initial que "la solution est de légiférer et d'instaurer un quota de 30%", car, 50 ans après l'indépendance, la représentation des femmes en politique reste faible. Mais il est peu probable que le président sorte de son silence pour ce faire.

Le nomadisme politique légalisé

Le démantèlement s’est poursuivi avec, en effet, la suppression de la disposition controversée du projet de loi électorale prévoyant de déchoir de son mandat tout élu qui change d’appartenance politique en cours de mandat. Ils ont également voté pour l’annulation d’une disposition de l’article 93 prévoyant que "lorsque le candidat aux élections est membre du gouvernement, il doit déposer sa démission trois mois avant la date du scrutin". Voilà qui va conforter les nombreux ministres qui pourront ainsi avec la complicité d’une assemblée croupion utiliser les moyens de leur ministère pour faire leur campagne électorale.

Y.K/AFP

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Commentaires (1) | Réagir ?

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djamel rami

Tout le monde sait que la majorité de ces députés mal élus sont issus de douars de l'Algérie profonde et qu'ils sont par conséquent dotés d'une culture machiste ou la femme n'est bonne qu'au lit, le travail aux champs et les fourneaux de cuisine.