Cameroun : Biya président réélu malgré de vastes irrégularités

Paul Biya, président du Cameroun depuis 30 ans.
Paul Biya, président du Cameroun depuis 30 ans.

Les Etats-Unis ont estimé que l'élection présidentielle du 9 octobre au Cameroun était entachée "d'irrégularités à tous les niveaux", dans une déclaration transmise jeudi à l'AFP à la veille de la proclamation des résultats.

Qu'importe pour le candidat-président Paul Biya au pouvoir depuis trois décennies. Candidat du parti au pouvoir, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), il est réélu Président en arrivant en tête dans la quasi-totalité des résultats du scrutin présidentiel du 9 octobre dernier, selon les décomptes proclamés vendredi par la Cour suprême de justice officiant comme Conseil constitutionnel. Le pourcentage des suffrages valablement exprimés obtenu par chacun des 23 candidats est en cours d'être annoncé par la Cour suprême.

Dans les 10 régions du Cameroun, quelque 7,5 millions d'électeurs ont été appelés au scrutin. Sur une population évaluée en 2010 par le ministère des Relations extérieures à près de 4 millions de Camerounais vivant à l'étranger, 25.771 d'entre eux ont été appelés à voter en tant qu'électeurs inscrits.

Une élection contestée

L'opposition, qui accuse le pouvoir d'avoir verrouillé l'élection en faveur du président Paul Biya, 78 ans, au pouvoir depuis 1982 et qui brigue un sixième mandat, a annoncé qu'elle rejetait par avance les résultats du scrutin, qu'elle qualifie de "mascarade". La Cour suprême a rejeté mercredi et jeudi 15 recours en annulation de la présidentielle introduits par l'opposition et doit proclamer les résultats vendredi.

La France par la voix de son ministre le ministre des Affaires étrangères Alain Juppé avait jugé mardi que les élections avaient eu "lieu dans des conditions acceptables". L'équipe d'observateurs du Commonwealth a aussi estimé que le scrutin avait été exempt de "coercition", tout en soulignant qu'il y avait un "bon nombre de plaintes" sur l'organisation.

L'ambassadeur des Etats-Unis au Cameroun Robert Jackson a lui affirmé : "Le jour du scrutin, nos observateurs ont noté des incohérences et des irrégularités à tous les niveaux, ainsi que des difficultés techniques de la part d'Elecam (Elections Cameroon, la commission électorale) dans l'administration de l'élection".

"L'une des plus grandes critiques a porté sur la façon dont les listes électorales ont été conçues et gérées, laissant libre cours aux votes multiples. Le manque de formation des agents électoraux et d'éducation des électeurs concernant la manière de voter était apparent", a ajouté l'ambassadeur. "L'encre qui devrait être utilisée pour empêcher les votes multiples n'était pas indélébile, et les responsables des bureaux de vote ne prenaient pas la peine de vérifier les pouces des électeurs", a poursuivi M. Jackson.

L'Eglise a appelé au calme dans ce contexte tendu.

"Ne descendez pas dans la rue. Restez sourds aux appels à la violence et au désordre qui vous sont lancés", ont écrit les évêques camerounais dans une déclaration lue jeudi par Mgr Joseph Atanga, président de la Conférence épiscopale nationale du Cameroun (CENC), qualifiant les manifestations de "raccourcis pour accéder au pouvoir".

Le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), parti du président Biya, avait accusé mardi "certains partis politiques (...) au mépris de la légalité républicaine, de lancer des appels injustifiés et inadmissibles au désordre et à la violence".

En février 2008, des émeutes contre la vie chère et contre le projet de suppression de la limitation du nombre de mandats présidentiels, avaient coûté la vie à 40 personnes, selon un bilan officiel, au moins 139 d'après des ONG.

L'ambassadeur des Etats-Unis a aussi critiqué des divisions de l'opposition qui a "présenté 22 candidats (face au président Paul Biya). Il y a lieu d'émettre des réserves quant au sérieux de cette opposition et des candidats (...) les partis d'opposition doivent s'unir s'ils veulent proposer une alternative crédible".

"La Mission américaine avait dépêché 14 équipes de deux à quatre personnes (...) dans chacune des dix régions du Cameroun, avec des équipes supplémentaires à Douala (sud), la plus grande ville du pays, et à Yaoundé", la capitale, selon le diplomate.

AFP

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