Moins nombreux, les rebelles syriens se radicalisent

Il y a des risque que la protestation pacifique devienne militaire.
Il y a des risque que la protestation pacifique devienne militaire.

Même les responsables de l'opposition en conviennent : les manifestations appelant à la chute du président Bachar Al-Assad attirent moins de monde qu'avant le ramadan.

"Ces derniers vendredis, ils étaient 10% seulement par rapport aux chiffres de la fin juillet, soit environ 30.000 personnes à travers la Syrie", affirme Haitham al-Manah, un opposant en exil à Paris, proche du soulèvement.

Le quadrillage des villes rebelles par l'armée, ajouté aux arrestations des cadres du mouvement, ont conduit à son essoufflement. "Les services de renseignements ont réussi à noyauter les comités de coordination", assure un homme d'affaires en contact avec un responsable de la police secrète du régime.

Cette décrue ne signifie pas, pour autant, la fin de la contestation, qui a coûté la vie à 2700 personnes. "Au contraire, avertit al-Manah, ceux qui descendent dans la rue sont de véritables kamikazes. Ils sont prêts à tout". Près de sept mois après son lancement, la révolte est en train de changer de nature. Une guerre d'usure s'est enclenchée entre un pouvoir qui ne tombera pas demain et un courant radical, partisan de renoncer au caractère pacifique des manifestations. Les ultras de la rue composent un mélange de sympathisants pro-américains qui attendent une intervention extérieure sur le modèle libyen, d'autres qui refusent toute négociation avec un pouvoir qui leur a trop menti, et d'autres encore soutenus par des déserteurs de l'armée, qui espèrent tenir des quartiers ou des bourgades face à l'appareil sécuritaire loyal au clan Assad.

Des islamistes venus du Liban

Encore minoritaires, des appels aux armes ont été lancés dans la presse et les réseaux sociaux, à Homs notamment, où la répression est la plus cruelle, trois personnalités ayant trouvé mystérieusement la mort ces derniers jours. "À Homs, certaines protestations sont armées et c'est très dangereux", déplore un autre opposant en exil. Car "les gens ont peur de sortir manifester, craignant d'être tués par l'un des deux camps", poursuit cet activiste. Ces derniers mois, des combattants armés sont arrivés à Homs en provenance de Tripoli au Liban, infiltrés par le Hezb Al-Tahrir, un groupuscule islamiste qui organise des manifestations hostiles au clan Assad dans la grande ville du Liban-Nord. "Ces gens-là nous embarrassent, regrette l'activiste. Lorsque le pouvoir trouve leurs papiers quand ils sont tués, ils appellent les dignitaires de Homs pour leur dire: mais regardez qui sont ces individus. Le régime en profite." Deux mille islamistes seraient cachés à Homs, selon Khaled al-Ahmad, un consultant proche du régime, cité par l'AFP.

Sûr de sa stratégie répressive, le pouvoir pense être sur le point d'écraser la fronde, quitte à ce qu'elle bascule dans une guerre civile entre communautés.

Conscients du piège qui leur serait alors tendu, des cadres de l'Intifada s'activent pour éviter cette militarisation. "À Telkalah, au nord-ouest, la situation est difficilement contrôlable, concède un responsable du soulèvement, joint par téléphone. J'ai fait verser 90 dollars par famille pour qu'elles ne touchent pas aux armes, mais avec les trafiquants en provenance du Liban, l'attrait est grand. À Idlib, nous avons aussi du mal à nous faire entendre. En revanche, dans les régions frontalières avec la Turquie et l'Irak, les tribus avec lesquelles nous discutons ont promis qu'elles n'utiliseraient pas leurs armes dans les manifestations". "La révolte est clairement menacée, constate Haitham al-Manah. Mais si on arrive à maintenir nos trois principes - pas d'armes, pas de guerre confessionnelle et pas d'intervention extérieure - on parviendra, jure-t-il, à sortir de cette mauvaise passe."

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