Dialogue de sourds à l'Onu sur le projet palestinien

Mahmoud Abbas, président de l'Autorité palestinienne.
Mahmoud Abbas, président de l'Autorité palestinienne.

Les tractations s'intensifient aux Nations unies où le projet de reconnaissance d'un Etat de Palestine continue d'opposer frontalement Mahmoud Abbas d'un côté, Barack Obama et les Israéliens de l'autre.

Obama et Abbas se rencontreront mercredi en fin d'après-midi à New York (16h00 GMT), occasion pour le président américain d'exhorter le président de l'Autorité palestinien de renoncer à son initiative. "Avec à la fois les Israéliens et les Palestiniens, le président sera à même de dire très directement pourquoi nous pensons qu'une initiative aux Nations unies n'est pas le moyen de parvenir à un Etat (palestinien)", a déclaré Ben Rhodes, conseiller adjoint à la sécurité nationale de la Maison blanche.

Pour l'heure, on semble pourtant se diriger droit vers une confrontation au siège new-yorkais des Nations unies tandis qu'en Cisjordanie, les tensions s'accentuent entre colons juifs et Palestiniens.

Face au blocage des discussions de paix avec Israël, Mahmoud Abbas a confirmé qu'il demanderait vendredi au Conseil de sécurité la reconnaissance d'un Etat de Palestine dans les frontières de 1967. Son ministre des Affaires étrangères, Riyad Al Malki, s'est dit confiant mardi quant à la possibilité de réunir la majorité requise de neuf voix sur les quinze membres du Conseil de sécurité. Mais les Etats-Unis, qui jugent la démarche susceptible de déboucher sur une catastrophe, ont prévenu qu'ils feraient alors usage de leur droit de veto.

Côté israélien, le ministre des Finances, Yuval Steinitz, a estimé que si les Palestiniens maintenaient leur projet, ils pourraient s'exposer à des mesures de rétorsion économique. Israël perçoit et reverse à l'Autorité palestinienne des taxes notamment douanières d'un montant de 135 millions de dollars par mois, a-t-il rappelé dans une interview accordée à Reuters.

Le Quartet s'enlise

La France pas plus que la Grande-Bretagne, qui disposent elles aussi d'un droit de veto en leur qualité de membre permanent du Conseil, n'ont dévoilé leurs intentions. Nicolas Sarkozy, qui a eu mardi un entretien avec Mahmoud Abbas et rencontrera mercredi le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et Barack Obama, a exhorté les protagonistes du conflit israélo-palestinien à sortir le processus de paix de l'impasse.

Paris misait sur une déclaration du Quartet des médiateurs internationaux pour le Proche-Orient (Etats-Unis, Russie, Onu et Union européenne), susceptible de créer les conditions d'une relance du processus sans passer tout de suite par la case reconnaissance de l'Etat palestinien par l'Onu. Mais le chef de la diplomatie britannique, William Hague, a reconnu mardi que le Quartet n'avait toujours accompli aucun progrès dans ses efforts pour ramener Israéliens et Palestiniens à la table des négociations.

Pour l'administration Obama, comme pour le gouvernement israélien de Benjamin Netanyahu, les négociations directes entre Israéliens et Palestiniens sont le seul cadre possible pour atteindre l'objectif de "deux Etats vivant dans la paix et la sécurité". L'Autorité palestinienne juge pour sa part que le processus de paix, initié par les accords d'Oslo de 1993 mais gelé depuis un an après une brève relance sous l'égide d'Obama, a échoué et n'a pas empêché le développement des implantations juives en Cisjordanie.

"Saisine de l'Assemblée générale"

Si Abbas rallie les neuf voix nécessaires au Conseil de sécurité, il n'évitera pas un veto américain, mais pourra présenter ce veto comme l'obstacle à la création d'un Etat de Palestine, une situation inconfortable pour les Etats-Unis au moment où Obama s'efforce de renouer des liens de confiance avec le monde arabe.

"Un veto américain serait analysé dans la région comme une nouvelle démonstration d'une politique de deux poids, deux mesures consistant à apporter un soutien sélectif à certains et pas à d'autres dans une région qui aspire à la liberté", observe Marouane Mouacher, ex-ministre jordanien des Affaires étrangères aujourd'hui directeur de recherches au Carnegie Endowment.

Israël, qui se dit prêt à de nouveaux pourparlers directs sans avoir pour autant fait de concessions, pourrait par ailleurs ressortir plus isolé d'un tel développement. Les tractations en cours ne s'achèveront toutefois pas dès la transmission d'une demande de reconnaissance d'un Etat palestine au Conseil de sécurité.

"Cela ne veut pas dire qu'il y aura vendredi un vote au Conseil de sécurité (...). Il y a une procédure d'instruction de cette demande et cela peut prendre encore quelques jours ou quelques semaines si bien que la voie reste ouverte à d'autres initiatives", relevait le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, mardi matin sur Europe 1.

"Ce vote n'est pas pour demain et nous voulons laisser la voie ouverte à d'autres solutions, c'est-à-dire à la reprise des négociations; c'est-à-dire, le cas échéant, à une saisine de l'Assemblée générale", a-t-il insisté, faisant allusion à une option qui permettrait de contourner le veto américain.

Les Palestiniens, qui disposent actuellement d'un statut d'"entité non-membre" participant à titre d'observateur aux travaux de l'Onu, pourraient en effet demander un statut d'"Etat non-membre", à l'instar du Vatican, qui requiert un simple vote à la majorité de l'Assemblée générale.

Plus d'articles de : L'actu en Algérie et ailleurs

Commentaires (0) | Réagir ?