L'avenir de la Libye se négocie à Paris

Organiser la transition démocratique de la "Libye libre" : la communauté internationale se retrouve jeudi à Paris pour penser l'après-Kadhafi, alors que les ultimes combats continuent en Libye. Cette réunion, organisée par la France et le Royaume-Uni, doit donc concrétier politiquement la victoire militaire.
Près de six mois après avoir accueilli, le 19 mars, la conférence qui a lancé l'intervention militaire contre le "guide" libyen, le président français Nicolas Sarkozy a souhaité élargir le format de sa conférence : outre la trentaine de membres du "groupe de contact" qui ont soutenu les frappes aériennes sont aussi présents les représentants de pays qui étaient jusqu'ici hostiles à l'opération de l'OTAN ou qui avaient jugé qu'elle dépassait le cadre fixé par la résolution 1973 des Nations unies.
La Russie, qui s'était abstenue lors du vote de la résolution, participera ainsi à la réunion. A quelques heures de cette conférence, Moscou a d'ailleurs annoncé qu'il reconnaissait le Conseil national de transition – le CNT, l'organe politique de la rébellion libyenne – comme autorité au pouvoir en Libye. En juillet, la Russie avait refusé de le reconnaître comme "seule autorité" du pays. Par ailleurs, l'Algérie, seul pays de la région à ne pas reconnaître le CNT, participe aussi à la réunion. Mourad Medelci, le ministre des Affaires étrangères, déclarait ce matin sur Europe 1 qu'il n'y a "aucune ambiguïté" de la part de l'Algérie sur Kadhafi, en réponse au ministre des Affaires étrangères français, Alain Juppé, qui a estimé jeudi qu'Alger avait eu "une attitude ambiguë" pendant le conflit libyen.
Dégel d'urgence des avoirs libyens
Les deux principaux responsables du Conseil national de transition, Moustapha Abdeldjalili et Mahmoud Jibril doivent profiter de leur présence à Paris pour présenter la "feuille de route" vers la démocratie et, surtout, leurs besoins urgents en matière d'aide et de reconstruction. Ils doivent aussi plaider pour le dégel des dizaines de milliards de dollars déposés par le clan Kadhafi dans des banques internationales. A ce jour, deux enveloppes d'environ 1,5 milliard de dollars chacune ont été libérées des comptes américains et britanniques où elles dormaient, sur un pactole total estimé à environ 50 milliards. C'est maintenant la France qui a été autorisée à débloquer 1,5 milliard d'euros d'avoirs libyens, demande que Paris avait formulée mercredi.
Le pétrole au centre des enjeux
Dès les premiers jours de l'intervention internationale, l'après-Kadhafi se négociait en coulisses. Le journal français Libération s'est procuré une lettre qui date du 3 avril, dans laquelle le CNT s'engage à attribuer "35 % du total du pétrole brut [libyen] aux Français en échange du soutien total et permanent [de la France au] Conseil". "Il était de notoriété publique ques les pays les plus engagés auprès des insurgés seraient les mieux considérés par le CNT le jour venu", commente Libération. Une rivalité semblait ainsi s'installer entre la France et l'Italie pour obtenir les marchés de la reconstruction. Le quotidien algérien Liberté a rendu public également dans son édition d'aujourd'hui jeudi quelques termes de cette lettre secrète signée de la main de Moustapha Abdeldjalil. Ladite lettre a été adressée également en avril dernier aux responsables du Qatar, des Émirats arabes unis et à Amr Moussa de la Ligue arabe. Tous soutiens inconditionnels des rebelles libyens.
Commentaires (1) | Réagir ?
Le ministre des A. E français aurait mis en doute publiquement la parole du président algérien à propos de la famille de Kadhafi entrée en Algérie. Il serait judicieux au président de faire une déclaration appropriée sur ce qui pourrait constituer un incident diplomatique dans d'autres pays.
Je crois que la bataille du pétrole libyen a commencé, une nouvelle situation se dessine au Maghreb qui aura des répercussions économique et politiques pour notre pays.