Syrie : l’armée nettoie sans pitié les villages résistants

Syrie : l’armée nettoie sans pitié les villages résistants

80 chars encerclent la ville de Hama, symbole de la résistance au pouvoir baasiste. Des habitants tentent d'établir des barrages de fortune. Hama vit actuellement dans la peur d'un assaut de l'armée, qui maintient ses forces aux portes de cette ville.

Un millier d'habitants ont renoncé à tenir tête, préférant quitter leur maison pour se réfugier dans la localité voisine de Salamyieh. 20 personnes au moins sont mortes dans les violences de ces derniers jours. Hama, la rebelle, résiste. Comme elle a déjà résisté il y a un mois, forçant l'armée à se retirer de cette ville qui paya dans le passé un très lourd tribut à la contestation.

Le régime ne lâche pas prise

Bachar Al Assad est décidé à en finir avec la contestation pacifique qui ébranle le pouvoir bassiste depuis quelques mois. Méthodiquement, et ville par ville, son armée encercle et mâte dans le sang et une répression aveugle la contestation populaire. Les menaces de sanctions internationales, par ailleurs timides ne semblent pas prêtes à changer la donne. Les opérations de répression sont ciblées, méthodiques et calculées. Elles sont menées par des unités essentiellement alaouites (branche à laquelle appartiennent les Assad) et dirigées par Maher, le frère du président Bachar, par ailleurs commandant de la garde prétorienne du régime. La confiance règne donc dans les rangs de l’armée syrienne. Selon les rares informations que l’opposition arrive à faire parvenir à l’extérieur, le mode opératoire de l’armée est toujours le même : elle encercle d’abord une ville avec l’appui des chars, installe des tireurs d’élite puis bombarde et tire sur les manifestants. Comme à Hama, Homs et Tall Kalakh (ouest de la Syrie). La deuxième étape comme à Djisr El Choughour ? La propagande du régime s’occupe d’accuser, à grands renforts de témoignages tout faits par la télévision officielle, les habitants d’appartenance à des "groupes armés islamistes". La méthode est éprouvée par tous les dictateurs de la région. Rappelons-nous la Tunisie de Ben Ali, puis Hosni Moubarak en Egypte, Mouammar Kadhafi qui accusait pendant les premières semaines le Conseil national de transition de contenir des islamistes d’Al Qaida.

En Syrie, les villages ciblés sont, pour la majorité, sunnites. D’ailleurs la population a souvent choisi de fuir vers la Turquie que de subir la terreur de l’armée syrienne. Outre les assassinats, tortures, l’armée syrienne pille et saccage les récoltes des paisibles paysans. Des témoignages de viols dignes de la guerre de Bosnie ont été recueillis auprès de femmes de Djisr El Choughour, au nord de la frontière avec la Turquie. Cette terreur de masse ne va pas sans des déplacements de populations où le nord sera essentiellement occupé par des populations alaouites.

Une Ligue arabe sourde et muette

Devant ce nettoyage ethnique, rares sont les voix qui s’élèvent pour dénoncer les massacres. Si ce silence n’est pas un manque d’humanité évident, il s’apparente à un cynisme des plus glacials. Sinon comment on dénonce les bombardements des populations libyennes ou yéménites tout en ménageant le régime despotique syrien ? Jusqu’à présent, seule la Turquie condamne fermement les tueries de l’armée syrienne. Aucun pays arabe n’a le courage d’élever la voix. La ligue arabe brille par une surdité et un silence des plus abjects. Cette ligue dont le surnom de syndicat des potentats se vérifie chaque jour fait montre d’une couardise manifeste. Tous les discours sur le panarabisme dont les couloirs de cette ligue ont longtemps vibré s’avèrent que de la poudre aux yeux. Le printemps dit arabe a montré les limites de cette ligue qui devrait être dissoute. Au Conseil de sécurité, toutes les résolutions sont bloquées par la Russie et la Chine pour lesquels les intérêts économiques en Syrie passent avant les libertés et l’instauration de la démocratie. L’un comme l’autre pays sont d’ailleurs loin d’être des pays respectueux des droits de l’homme. L’organisation de la conférence islamique se veut aussi jusqu’à présent un soutien indéfectible au régime baassiste. L’un comme l’autre ont pris position contre le peuple syrien. Encore une fois, en Syrie, comme en Tunisie, en Egypte, ou au Yémen, les dirigeants arabes se soutiennent entre eux, contre leur peuple. Leur silence mutuel laisse aux pays occidentaux l’initiative d’apporter des réponses, selon leurs intérêts, aux conflits qui rongent la rive sud de la Méditerranée.

Y. K.

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