Benghazi, capitale de la rébellion libyenne, convalescente et apeurée

Benghazi, capitale de la rébellion libyenne, convalescente et apeurée

Le canon tonne toujours dans le désert à 160 km au Sud mais Benghazi, capitale de la rébellion libyenne, tente de remettre en marche son économie et ses institutions, inventant au passage un mode de fonctionnement plus démocratique, inconnu depuis deux générations.

Le canon tonne toujours dans le désert à 160 km au Sud mais Benghazi, capitale de la rébellion libyenne, tente de remettre en marche son économie et ses institutions, inventant au passage un mode de fonctionnement plus démocratique, inconnu depuis deux générations.

Les chars du dirigeant Mouammar Kadhafi étaient arrivés, le 19 mars, dans les faubourgs de la ville quand des chasseurs-bombardiers occidentaux les ont détruits par dizaines, forçant l'armée à la retraite.

Depuis, la ville vidée de la plupart de ses nombreux travailleurs expatriés et de beaucoup de familles qui ont fui plus à l'Est voire en Egypte, est comme en convalescence.

Des commerces ont rouvert, mais quelques heures par jour. Au guichet de la Western Union (transferts de fonds internationaux), c'est derrière les grilles que se font les retraits d'argent, avec montants limités.

Les immenses bassins du port sont vides. Les grues immobiles sifflent dans le vent. "Nous sommes ouverts, nous recevons un peu d'aide humanitaire mais le trafic commercial n'a pas repris" indique, dans son bureau, Moustapha Choueidi, chargé de la sécurité. "Je crois qu'il faut régler des histoires d'assurance".

Dans le souk de l'or, Omar Bouchaala, bijoutier de 58 ans, est assis devant son échoppe aux rayonnages vides. "Comme il n'y a pas de police, on a peur de se faire voler", dit-il. "Il y a tellement d'hommes armés. Je suis venu, mais c'est surtout pour discuter avec les voisins".

Les policiers, badge aux couleurs de la "Libye libre" sur la poitrine, ont fait il y a deux jours seulement leur réapparition aux carrefours. Mais les services municipaux, comme l'enlèvement des ordures, n'ont pas repris.

"Tous ces genres de jobs, c'étaient des étrangers", explique le docteur Ossam Mohamed, 45 ans. "Ils sont tous partis. Dans certains quartiers, les immondices s'amoncellent".

Reconnue pour l'instant seulement par la France, l'Italie et le Qatar, la "Libye libre" n'est pas connectée aux circuits financiers internationaux. Les entreprises étrangères n'ont pas encore renvoyé leurs expatriés.

"Nous avons exporté mercredi un tanker de brut, cela va nous donner de l'argent liquide dont nous avons besoin", sourit Moustapha Gheriani, l'un des porte-parole du Conseil national de transition (CNT), organe politique suprême de la rébellion.

"Nous sommes en discussion pour l'ouverture de lettres de crédit avec les banques internationales, afin de relancer les échanges. Nous avons besoin de relancer la machine économique", ajoute-t-il.

Le CNT a institué treize comités d'experts, désignés selon lui uniquement sur des critères de compétence, pour gérer la ville. Mais si des décisions sont prises il manque encore bien des rouages à la machine pour les faire appliquer. "Compte tenu que nous ne sommes libres que depuis six semaines, ce que nous sommes déjà parvenus à faire est incroyable", plaide M. Gheriani.

Ecoles et universités sont fermées, aucune date en vue pour leur réouverture. Les restaurants, privés de leurs cuisiniers étrangers, ont presque tous fermé. Pas de file d'attente, en revanche, aux stations-service, approvisionnées en essence raffinée importée d'Italie, avec un prix du super à 7 centimes d'euros le litre.

Dans le grand marché de gros aux denrées alimentaires, le tiers des boutiques est ouvert. Celle d'Awad Ali, 52 ans, regorge de denrées. Mais c'est trompeur, selon lui. "Nous n'avons plus accès au crédit, les banques sont à l'arrêt. Tout ce que je vendais venait du port. Plus rien. On peut tout faire entrer depuis l'Egypte, en contrebande, mais c'est beaucoup plus cher".

Dans le souk voisin Raad Ibrahim, 29 ans, ne vend pas beaucoup d'appareils photos. Il ne quitte pas des yeux l'écran de sa télévision. "Le front est à Brega, peut-être Ajdabiya. On a peur. On est prêt à fermer à tout instant".

AFP

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