Rébellion libyenne: des roquettes dans le désert

Rébellion libyenne: des roquettes dans le désert

Sans télécoms, sans hiérarchie, sans stratégie ni tactique à part celle, digne d'Obélix, de foncer d'abord et réfléchir ensuite, les rebelles ont également de gros problèmes de discipline.

Les lance-roquettes multiples des rebelles libyens se positionnent des deux côtés de la route et en quelques minutes crachent flammes et projectiles dans des rugissements de monstres.

Dans le ballet d'offensives - contre-offensives qui les oppose depuis des jours à l'armée que le colonel Kadhafi a envoyée pour leur barrer la route des raffineries et de sa ville natale, Syrte, leur hantise est d'être encerclés, bloqués sur le ruban de bitume rectiligne sur lequel ils avancent puis reculent.

Alors, sans toujours savoir exactement sur quoi, ils tirent jeudi matin vers l'horizon ce qu'ils ont de plus gros, des roquettes de 107 mm montées sur des pick-up. Les mitrailleuses 14.5 prennent le relais. Puis tout le monde file vers l'arrière sans attendre la riposte.

La veille, un raid aérien international a arrêté aux environs du terminal pétrolier de Bréga, à 190 km à l'ouest de Benghazi, la progression des forces de Tripoli, qui avaient facilement enfoncé les lignes rebelles.

Jeudi matin, c'est dans les plaines désertiques des environs que roule la canonnade. Impossible de savoir de source indépendante, faute de pouvoir approcher davantage, qui contrôle Bréga et ses ressources en carburant.

Mais une nouvelle fois, la colonne d'insurgés, composée en grande majorité de civils armés sans aucune expérience militaire, est tombée en fin de matinée dans une embuscade, rebroussant chemin en panique.

Dans l'ambulance qui passe en trombe vers l'arrière, deux blessés en sang.

Barbe noire sur des joues rebondies, treillis américain neuf, lunettes de bricolage anti-poussière sur le front, Reda Khadra, 36 ans, affirme être un soldat de métier.

"Le problème, c'est que ce sont des civils (...) Ils avancent n'importe comment et quand ils entendent une explosion, au lieu d'avancer pour se battre comme une armée, ils fuient", dit-il dans un triste sourire.

"Bon, cela dit, on essaie de les organiser un peu mieux (...) Aujourd'hui, on a des équipes qui avancent parallèlement à nous, sur des pistes". Le talkie-walkie qu'il porte sur la poitrine est cassé.

Sans télécoms, sans hiérarchie, sans stratégie ni tactique à part celle, digne d'Obélix, de foncer d'abord et réfléchir ensuite, les rebelles ont également de gros problèmes de discipline.

Parce que tout le côté de son 4x4 japonais a été embouti, à quelques kilomètres de là, lors d'une des nombreuses paniques qui rythme leurs progressions ou leurs débandades, l'un d'eux se met à crier.

Puis il hurle, brandit sa kalachnikov et finit par tirer une balle juste au-dessus de la tête du conducteur fautif. Seule l'intervention de Reda Khadra ramènera le calme.

Plus loin, au bord de la route, Abdul (qui ne veut pas révéler son nom de famille), 40 ans, supervise l'ouverture par ses hommes, en tenue de salafiste comme lui, de caisses de roquettes antichars.

Armes et projectiles sont neufs, encore sous plastique. Les poses sont résolues, les regards noirs et les gestes précis. Mais Abdul, barbe noire et turban blanc, admet que "nous ne savons pas vraiment nous en servir".

"Nous avons récupéré ces lance-roquettes il y a deux jours, par un ami qui les a pris dans une caserne. Mais personne n'a jamais tiré avec".

"Nous avons besoin d'entraînement, d'expérience (...) Si les hommes de Kadhafi arrivent en ville, on les combattra. Mais là (...)".

Assis aux commandes de sa mitrailleuse lourde, uniforme complet et cheich noir sur la tête, Nasser Mehdi, 30 ans, semble plus aguerri.

Il reconnaît avoir reculé, la veille, de 50 km face aux coups de boutoir de l'artillerie ennemie, mais remercie "la France d'avoir envoyé ses avions".

"Nous pouvons avancer à nouveau", dit-il. "Dieu est avec nous. Il nous a envoyé la France et son armée de l'air. Nous sommes les fils d'Omar Mohktar (héros de la guerre d'indépendance contre l'Italie). Vaincre, ou mourir !"

AFP

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Commentaires (1) | Réagir ?

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sam abed

C'est ce qu'on appelle aaskar baghdad ou aaskar bartiza.